Les accusations de négligence fragilisant Hillary Clinton dans sa campagne présidentielle ont été renforcées vendredi par des notes d'enquête inédites du FBI, révélant que la candidate a jonglé avec les données confidentielles et les téléphones portables quand elle était secrétaire d'État.

Une nouvelle fois la favorite des sondages pour l'élection du 8 novembre se retrouve rattrapée par la controverse sur ses courriels, une affaire qui empoisonne sa course vers la Maison-Blanche et fournit des munitions à ses adversaires.

Alors qu'elle dirigeait la diplomatie américaine, Mme Clinton a utilisé un serveur privé non sécurisé, malgré la sensibilité des dossiers dont elle était chargée.

Selon les 58 pages de documents publiés vendredi, elle a expliqué à la police fédérale qu'elle «faisait confiance» à ses interlocuteurs afin que ceux-ci fassent attention à ne pas lui envoyer d'informations sensibles par courriel. Et elle a confié ignorer que l'annotation «C» figurant sur certains documents signifiait «confidentiel».

Ces notes du FBI --dont de larges portions ont été expurgées de données confidentielles-- retranscrivent notamment l'interrogatoire de l'ancienne secrétaire d'État par les policiers fédéraux.

On y apprend que Hillary Clinton «a affirmé n'avoir reçu du département d'État aucune instruction ou directive quant à l'archivage ou la protection de données alors qu'elle se préparait à quitter ses fonctions de secrétaire d'État en 2013».

Trous de mémoire?

«Toutefois, Mme Clinton a subi en décembre 2012 une commotion cérébrale et souffrait vers le Nouvel An d'un caillot sanguin (dans le crâne). Suivant les conseils de son médecin, elle ne pouvait travailler au département d'État que quelques heures par jour et ne parvenait pas à se souvenir de chacun des briefings auxquels elle assistait», poursuit le rapport du FBI.

La commotion cérébrale et le caillot sanguin de Mme Clinton sont déjà connus. Mais l'affirmation du FBI sur les trous de mémoire de la responsable est nouvelle et pourrait être exploitée par le camp Trump, pour qui la santé de la candidate est un nouvel angle d'attaque.

Un porte-parole de Mme Clinton a tenté vendredi de prévenir ce danger. «Mme Clinton a dit deux choses: qu'elle ne pouvait se rappeler chaque briefing; qu'elle a été à cette époque en partie absente pour raison médicale», a résumé Brian Fallon.

«Hillary Clinton brigue une fonction dont chaque jour débute par un briefing top secret, et les notes de son entretien avec le FBI confirment ses terribles erreurs de jugement et sa malhonnêteté», a réagi dans un communiqué l'équipe de campagne de Donald Trump.

Un peu plus tard, le candidat républicain a estimé que les réponses de sa rivale au FBI «défient l'entendement», se disant «stupéfait de voir que (ces réponses) étaient en contradiction directe avec ce qu'elle a dit au peuple américain» et confiant «ne pas comprendre comment elle avait pu échapper à des poursuites».

S'engouffrant aussi dans la brèche, le président républicain de la Chambre des représentants Paul Ryan a estimé que ces notes «prouvaient la gestion imprudente et vraiment dangereuse par Hillary Clinton de données classées secret».

Pour le président de la commission du Renseignement au Sénat Richard Burr, «ces notes confirment publiquement (...) que ces courriels contenaient des informations classées secrètes, et que ceux qui envoyaient ces courriels (le) savaient».

«Les excuses sont sans fin, et personne n'est jamais tenu responsable», a-t-il déploré.

La direction de campagne de Hillary Clinton s'est de son côté déclarée «satisfaite», assurant que les notes du FBI confirmaient le bien-fondé de la conclusion de l'enquête.

Début juillet la police fédérale avait en effet recommandé de ne pas poursuivre Mme Clinton, en concluant toutefois que l'ex-secrétaire d'État avait fait preuve d'une «négligence extrême» en installant un serveur privé à son domicile dans l'État de New York.

La ministre de la Justice Loretta Lynch avait dans la foulée décidé de clore l'enquête sans enclencher de poursuites.

Républicains ulcérés

Cette absence d'inculpation de la candidate démocrate a ulcéré les républicains, qui ont accusé d'incohérence le patron du FBI, James Comey, et exigé de connaître tous les détails des investigations fédérales d'une durée d'un an qui ont visé Mme Clinton.

Soumis à de nombreuses demandes de divulgation de ces documents, émanant du camp républicain et d'organes de presse, M. Comey a finalement autorisé la publication de ces notes d'enquête.

Pour une bonne partie de l'opinion publique américaine, Hillary Clinton a bénéficié dans cette affaire d'une mansuétude en raison de relations cultivées depuis le temps où son époux était à la Maison-Blanche. M. Trump a accusé Mme Clinton d'avoir bénéficié d'un arrangement illégal avec la justice.

Mais M. Comey a balayé les soupçons d'indulgence, notamment lors d'une audition de près de 5 heures au Congrès.