La secrétaire américaine d'État Hillary Clinton quitte son poste dans quelques semaines, au sommet de sa popularité dans son pays et à l'étranger. Mais ce pilier du gouvernement de Barack Obama s'en va sur un bilan neutre, sans succès majeur ni échec retentissant.

Hillary Clinton, 65 ans, et son mari l'ancien président Bill Clinton dominent la politique américaine depuis deux décennies et personne n'imagine que celle qui fut Première dame, sénatrice, candidate aux primaires démocrates de 2008 avant de diriger le premier réseau diplomatique de la planète, mette fin à sa carrière politique.

Alors que Washington bruisse de rumeurs sur sa candidature pour la présidentielle de 2016, la secrétaire d'État a maintes fois assuré qu'elle «arrêt(ait) la politique» après quatre années à sillonner plus de 110 pays. Un record pour un secrétaire d'État.

Au rythme effréné de deux voyages par mois, toujours suivie par une imposante délégation et la presse accréditée, elle a brandi sans relâche le drapeau américain aux quatre coins du monde, souvent adulée comme une «rock star», selon l'expression du New York Times.

Elle fut encore accueillie la semaine dernière au Kosovo par des pancartes proclamant «Hillary, on t'aime!».

Qu'elle soit dans les Balkans ou en Afrique de l'Ouest, en Asie du Sud-Est ou en Amérique latine, Mme Clinton y vante toujours haut et fort les valeurs de l'Amérique: droits de l'homme, démocratie, libéralisme et sécurité. Auprès de ses interlocuteurs européens, africains, arabes ou asiatiques et devant la presse, elle alterne, parfois avec humour, félicitations, encouragements et rodomontades.

Mais cette as de politique, à la forte personnalité qui semble apprécier sa grande popularité, a confirmé qu'elle quitterait la tête du département d'État après l'investiture le 20 janvier 2013 du prochain président des États-Unis, même si M. Obama est réélu.

«Loyale»

«Je ne suis pas vraiment disposée à rester plus longtemps», a-t-elle promis il y a dix jours au Washington Post, ajoutant qu'elle attendrait la désignation de son successeur.

Toutefois, lâchant quelques mots au Wall Street Journal, Mme Clinton avait paru laisser la porte entrouverte pour rester un peu plus longtemps, notamment afin de gérer l'affaire de l'attaque du consulat de Benghazi (Libye) le 11 septembre, un dossier qui a déclenché une tempête politique et dont elle s'est engagée à «assumer la responsabilité».

Des experts y voient la volonté de protéger le président américain.

L'adversaire malheureuse de M. Obama aux primaires de 2008 a d'ailleurs été d'une fidélité politique sans faille à l'égard de M. Obama, relève Justin Vaïsse, de la Brookings Institution.

Elle «a été une secrétaire d'État loyale et très efficace, qui a utilisé son "star power" de façon très utile pour Obama et qui a mis sa marque sur des sujets mineurs comme la liberté sur internet ou la meilleure intégration des politiques de développement dans la politique étrangère», résume-t-il pour l'AFP.

De fait, en dépit de son activisme, des experts ont du mal à dresser un bilan de la politique étrangère de l'ère Clinton, sans pouvoir lui attribuer de réussites spectaculaires, ni d'échecs marquants.

«Elle a toujours été dominée --parce que c'est la pente naturelle d'Obama-- par une Maison Blanche qui décidait d'absolument tout, même si elle a pu avoir une influence sur l'Afghanistan, l'Iran ou le raid contre Ben Laden», explique M. Vaïsse.

«Ça ne lui enlève rien. Elle est vraiment remarquable d'intelligence, d'énergie, de subtilité et de finesse. Mais la situation politique a été telle qu'elle a été très largement tenue en laisse», juge ce spécialiste français, auteur du livre «Barack Obama et sa politique étrangère».

Le professeur de Harvard Stephen Walt est encore plus sévère dans le magazine Foreign Policy: «On ne peut pas vraiment la considérer comme une grande secrétaire d'État, mais ce n'est pas de sa faute».