La bourde d'un élu républicain américain, qui avait affirmé qu'une femme victime d'un «viol légitime» ne peut pas tomber enceinte, a suscité lundi sarcasmes et colère, illustrant l'obsession anti-avortement d'une partie des conservateurs américains, élus en tête.

Todd Akin, un élu républicain du Missouri candidat au Sénat, a affirmé dimanche que lorsqu'une femme est victime d'un «viol légitime», elle tombe rarement enceinte, grâce à des réactions biologiques naturelles de défense.

L'élu, membre de la commission des Sciences de la Chambre des représentants, a affirmé sur la chaîne KTVI : «De ce que j'entends de la bouche des docteurs, la grossesse après un viol est très rare (...). S'il s'agit d'un véritable viol, le corps de la femme essaie par tous les moyens de bloquer tout ça».

«Un viol "légitime", ah bon? et la preuve est ... C'est quoi exactement?», ironisait lundi un intervenant sur le blog du Washington Post, en évoquant après «les procès en sorcellerie». «On vous jette à l'eau. Vous flottez, vous êtes coupables. Vous coulez, vous êtes innocents».

L'élu s'est pour sa part excusé lundi, évoquant une «erreur». «Soyons clairs: un viol (...) est un acte diabolique, commis par de violents prédateurs».

Mais sa déclaration initiale a vite remis en lumière la question de l'avortement, sujet permanent de conflit aux États-Unis, exacerbé par les enjeux électoraux de la présidentielle de novembre.

Saisissant la balle au bond, le président Barack Obama a jugé ces déclarations «choquantes»: «L'opinion exprimée (par M. Akin) est choquante. Un viol est un viol», a-t-il affirmé lors d'un point presse à la Maison-Blanche.

Son rival Mitt Romney n'a pas été en reste: les déclarations de M. Akin sont «insultantes, impardonnables et franchement, fausses. Comme des millions d'Américains, je les trouve insultantes», a-t-il déclaré au National Review Online.

«Beaucoup de conservateurs le croient»

Ces affirmations sont «médicalement fausses, choquantes et dangereuses», a pour sa part réagi dans un communiqué l'Association américaine des obstétriciens et gynécologues (ACOG).

«Chaque année aux États-Unis, entre 10 000 et 15 000 avortements suivent une grossesse après un viol ou un inceste et un nombre inconnu de grossesses sont menées à leur terme», ajoute l'ACOG selon qui suggérer qu'une femme violée contrôle sa fertilité «va à l'encontre des vérités biologiques de base».

Les déclarations de M. Akin sont «scandaleuses, insensibles et mal informées», a jugé auprès de l'AFP Brenda Smith, professeur de droit à l'American University de Washington, spécialiste de la loi et du viol. Selon Mme Smith, l'élu du Missouri «croit à ce qu'il dit et beaucoup de conservateurs le croient».

Les associations anti-avortement s'en sont d'ailleurs immédiatement saisies pour brandir leur drapeau: Family Research Council a ainsi souligné lundi que «pendant ses 12 ans au Congrès, Todd Akin a soutenu les lois qui honorent la vie humaine».

«Personne ne conteste que le viol soit un crime abominable», a pour sa part affirmé l'organisation Susan B. Anthony, accusant les démocrates d'utiliser «un rideau de fumée pour cacher leurs bilans pro-avortement».

Les sites internet des défenseurs de l'avortement ironisaient au contraire, rappelant d'anciennes déclarations républicaines du même acabit: l'élu Henry Aldridge estimait en 1995 que les «fluides ne coulent pas» quand les femmes sont «vraiment violées» et son collègue Stephen Freind croyait savoir en 1988 que la femme violée produisait «certaines sécrétions» qui empêchait la grossesse, rappelait le site Buzzfeed.

Un commentaire sur Twitter de @vampsicola estimait que «dans un monde parfait, ces commentaires (de M. Akin) auraient été un suicide politique mais dans la réalité, beaucoup de gens vont voter pour lui».