Soldats irakiens, forces kurdes et miliciens chiites, appuyés par des frappes américaines, ont intensifié lundi leur contre-offensive contre les jihadistes de l'État islamique (EI) en Irak, où les violences ont tué au moins 1420 personnes en août selon l'ONU.

À Genève, le Conseil des droits de l'Homme de l'ONU a décidé à l'unanimité d'envoyer une mission pour enquêter sur les atrocités commises par l'EI en Irak, afin de lutter contre l'impunité.

«L'EI n'est pas un phénomène irakien, mais une présence transnationale qui présente un danger imminent pour tous les pays du monde», a souligné le ministre irakien des droits de l'Homme, Mohammed Chia al-Soudani, dont le pays a demandé cette enquête.

L'ONU espère que ses 11 enquêteurs pourront être sur le terrain d'ici quelques semaines, a précisé un porte-parole.

Réputés pour leurs exactions -exécutions, viols- et accusés de «nettoyage ethnique» et de crimes contre l'Humanité par l'ONU, ces extrémistes sunnites sont aussi engagés dans la guerre en Syrie voisine et ont proclamé fin juin un califat sur les régions conquises à cheval sur ces deux pays.

Après avoir brisé dimanche avec l'armée le siège imposé depuis le 18 juin par les jihadistes à la ville turcomane chiite d'Amerli, les combattants kurdes et les miliciens chiites ont réussi à reprendre lundi la localité de Souleimane Bek, à 175 kilomètres au nord de Bagdad.

«En quelques heures, nous avons réussi à sécuriser complètement» Souleimane Bek, qui était aux mains des insurgés depuis onze semaines, a déclaré à l'AFP le commandant de la milice chiite Badr, Hadi al-Ameri.

Les combattants ont célébré cette victoire en tirant en l'air et en criant des slogans hostiles à l'EI, selon un correspondant de l'AFP sur place.

À quelques kilomètres de là, les forces kurdes et chiites ont encerclé le village de Yankaja, qu'ils tentent de prendre aux jihadistes en le soumettant à un pilonnage intense.

Après ces succès, le premier ministre sortant Nouri al-Maliki a assuré que l'Irak allait devenir un «cimetière» pour les jihadistes, lors d'une visite à Amerli où les habitants manquaient d'eau, de nourriture et de médicaments.

Le début de l'offensive des insurgés, le 9 juin, avait été marqué par la débandade des forces irakiennes, les jihadistes s'emparant en quelques jours de larges pans de territoires au nord du pays.

1420 morts en août

Alors qu'aucun bilan précis des pertes humaines depuis le début de l'attaque des jihadistes n'est disponible, l'ONU a annoncé lundi qu'au moins 1420 personnes avaient été tuées et 1370 blessées dans les violences en août.

Au cours de ce mois, les jihadistes ont relancé leurs assauts dans le nord de l'Irak, s'emparant de plusieurs localités et poussant les combattants kurdes à se retrancher dans leur région autonome du Kurdistan.

Selon l'ONU, 1,6 million d'Irakiens ont été déplacés cette année par les violences, dont 850 000 en août, parmi lesquels un grand nombre de membres des minorités chrétienne, yazidie et turcomane.

Cette crise a poussé les États-Unis à intervenir avec des frappes aériennes limitées, comme à Amerli où ils ont mené quatre raids.

Commencé le 8 août, ce soutien américain, premier engagement militaire des États-Unis en Irak depuis le retrait de leurs troupes fin 2011, a joué un rôle crucial dans la prise à l'EI le 17 août du barrage de Mossoul (nord).

Menaces sur l'Europe

Les Occidentaux ont également apporté une aide humanitaire et décidé d'armer les combattants kurdes.

L'Allemagne a ainsi annoncé qu'elle ferait une première livraison d'armes aux Kurdes, dont des milliers de fusils d'assaut. La chancelière Angela Merkel a justifié cette aide par les menaces que fait peser l'EI «sur l'Europe et l'Allemagne», soulignant que quelque 400 Allemands étaient en Syrie et Irak.

Faisant état de son côté de 500 Britanniques ayant rejoint les jihadistes dans les deux pays, le premier ministre britannique David Cameron a annoncé lundi des mesures renforcées pour faire face à cette menace. Les services de police vont notamment se voir doter du pouvoir provisoire de confisquer les passeports des voyageurs suspects aux frontières.

Face à la montée en puissance des jihadistes, les États-Unis pourraient préciser leur stratégie dès «la semaine prochaine», a indiqué l'élu américain Dutch Ruppersberger, après que le président Barack Obama a reconnu jeudi ne «pas encore avoir de stratégie».

Le chef de la diplomatie John Kerry, attendu dans la région après un sommet de l'OTAN les 4 et 5 septembre, a souligné que M. Obama proposerait un plan d'action à l'ONU en septembre.

En Syrie, où le conflit a fait plus de 191 000 morts depuis mars 2011, l'EI a été accusé lundi par Human Rights Watch d'utiliser des bombes à sous-munitions dans le nord, une arme interdite.