Un puissant attentat revendiqué par le groupe État islamique (EI) a frappé mercredi un convoi blindé de l'OTAN dans le centre de Kaboul, faisant au moins huit morts et 28 blessés, dont trois soldats étrangers.

Les victimes de l'explosion, qui s'est produite à l'heure de pointe matinale, sont «pour la plupart des civils», a indiqué à l'AFP le porte-parole du ministère de l'Intérieur, Najib Danish.

L'OTAN a pour sa part précisé que trois soldats de la coalition avaient été blessés. «Leurs jours ne sont pas en danger», selon un communiqué des forces américaines sous mandat de l'OTAN en Afghanistan.

Le groupe État islamique (EI) a revendiqué l'attentat via son agence de propagande Amaq, affirmant qu'il avait été mené par un kamikaze ayant déclenché des explosifs à bord d'un véhicule.

Les États-Unis ont mis la pression ces dernières semaines sur les combattants de l'EI en Afghanistan, espérant éliminer toute présence de ce groupe dans le pays d'ici la fin de l'année et dissuader ainsi des jihadistes expérimentés, chassés d'Irak et de Syrie, de venir se réfugier en Afghanistan.

Selon des témoins, les militaires étrangers visés circulaient à bord de véhicules blindés de transport de troupes (MRAP), conçus pour résister à de fortes explosions.

Au moins trois véhicules civils et deux blindés ont été endommagés par l'explosion qui a laissé un cratère sur une route passante à proximité de l'ambassade américaine, a constaté l'AFP. Vitrines et fenêtres des bâtiments alentour ont été soufflées par la déflagration, ressentie jusqu'à 600 mètres à la ronde a indiqué un témoin.

L'EI, qui a émergé en Afghanistan en 2015, a revendiqué plusieurs attentats ces derniers mois, dont la sanglante attaque contre le principal hôpital militaire en mars à Kaboul, mais les autorités mettent cette dernière revendication en doute et soupçonnent les talibans.

L'attaque de mercredi intervient quelques jours après l'annonce par les talibans du lancement de leur «offensive du printemps», lors de laquelle ils ont plus particulièrement menacé de s'en prendre aux troupes étrangères.

Pour l'expert afghan Ahmad Muradi, «que l'attaque ait été menée par l'EI ou par les talibans, le résultat est le même: cela épuise le gouvernement (...) et les forces de sécurité». Il souligne que l'EI, composé de combattants issus des talibans, «revendique surtout les attentats faisant des victimes civiles».

«Une année difficile»

Le chef du Pentagone Jim Mattis, qui a effectué une visite surprise à Kaboul en avril, au moment où les États-Unis réfléchissent à leur stratégie pour l'Afghanistan, avait dit s'attendre à «une nouvelle année difficile» pour les troupes afghanes comme étrangères.

Il ne s'est pas prononcé cependant sur l'envoi de «quelques milliers» d'hommes supplémentaires, comme réclamé par le commandant des troupes américaines et alliées en Afghanistan, le général John Nicholson.

Le secrétaire général de l'OTAN Jens Stoltenberg a pour sa part déclaré dimanche au journal allemand Welt am Sonntag que l'Alliance étudiait une augmentation des effectifs de sa mission en Afghanistan, «Resolute Support», pour sortir de l'impasse actuelle.

Les États-Unis, qui ont chassé les talibans du pouvoir en 2001, sont engagés en Afghanistan dans le plus long conflit de leur histoire.

Ils comptent 8400 hommes stationnés dans le pays et conduisent, en marge de l'opération Resolute Support d'appui aux troupes afghanes, des frappes aériennes contre des positions d'Al-Qaïda, des talibans et de l'EI.

Outre les troupes américaines, 5000 soldats de pays alliés sont déployés sous la bannière de l'OTAN.

Depuis la fin de la mission de combat et le retrait de la majorité des forces occidentales fin 2014, l'armée afghane est confrontée à un regain d'activité des insurgés islamistes qui enfoncent ses lignes. Plus du tiers du territoire national échappe au contrôle du gouvernement.

La capitale afghane elle-même est la cible d'attentats majeurs à répétition.

L'ONU a indiqué récemment que la province de Kaboul avait enregistré le plus grand nombre de victimes civiles du conflit au premier trimestre 2017, appelant à des «mesures adéquates de la part des parties au conflit pour épargner les civils».

Kaboul, cible de nombreux attentats depuis 2016

L'attentat visant un convoi de l'OTAN vient allonger la liste des attaques depuis début 2016 dans la capitale afghane, de plus en plus prise pour cible à la fois par les talibans et le groupe État islamique.

2016

20 janvier: un kamikaze précipite sa voiture piégée contre un minibus de la télévision afghane Tolo, tuant sept employés. Il s'agit du premier attentat d'envergure contre un média afghan.

1er février: vingt policiers sont tués et 29 personnes blessées dans un attentat suicide taliban contre une base de la police à Kaboul.

27 février: un kamikaze se fait exploser face au ministère de la Défense, faisant 12 morts.

19 avril: l'explosion d'un camion bourré d'explosifs aux abords d'un complexe gouvernemental, suivie d'une fusillade fait 64 morts et 340 blessés.

25 mai: dix personnes sont tuées dans un attentat suicide visant un minibus transportant des employés d'un tribunal dans la banlieue ouest de Kaboul.

20 juin: quatorze gardes de sécurité népalais employés par des ambassades occidentales sont tués en sortant de leur résidence aux abords de Kaboul.

30 juin: un double attentat suicide contre un convoi de recrues de la police à Kaboul fait au moins 30 morts.

23 juillet: double attentat suicide contre la minorité chiite hazara, revendiqué par l'EI. Au moins 85 morts et plus de 400 blessés.

24 août: attaque non revendiquée contre l'Université américaine d'Afghanistan. 16 personnes sont tuées.

5 septembre: un double attentat taliban près du ministère de la Défense fait 41 morts et plus d'une centaine de blessés. Dans la nuit, une troisième attaque, non revendiquée, vise les locaux abritant l'association humanitaire CARE International.

12 octobre: l'EI revendique une attaque contre une foule de chiites commémorant la fête religieuse de l'Achoura. Au moins 18 personnes périssent.

19 octobre: deux Américains dont un civil sont tués par un homme armé près d'une base de l'OTAN. Selon des responsables afghans, c'est une «attaque de l'intérieur».

21 novembre: une attaque suicide visant des fidèles chiites priant dans une mosquée fait au moins 27 morts. Elle est revendiquée par l'EI.

2017

10 janvier: 38 morts, essentiellement des civils, et 86 blessés dans un double attentat contre une annexe du Parlement afghan. L'attaque visait, selon les talibans, les services de renseignement.

7 février: un kamikaze à pied fait exploser sa charge parmi des employés de la Cour Suprême, tuant au moins 20 personnes. Pas de revendication.

1er mars: 16 personnes sont tuées dans des attentats-suicides simultanés des talibans contre deux complexes de sécurité.

8 mars: des assaillants habillés en personnel médical attaquent six heures durant le plus grand hôpital militaire de la ville, une opération revendiquée par l'EI. Le bilan officiel fait état de 50 morts mais des sources de sécurité et des survivants estiment qu'il dépasse les 100 morts.

3 mai: une attaque vise un convoi de l'OTAN près de l'ambassade américaine. Au moins 8 personnes sont tuées et 28 blessées, dont trois militaires étrangers.