Le groupe djihadiste État islamique a annoncé mardi la mort de son porte-parole, le Syrien Abou Mohammed al-Adnani, tué dans la province d'Alep (nord de la Syrie) ravagée par les combats.

«Après un long voyage couronné de sacrifices, cheikh Abou Mohammed al-Adnani a rejoint les martyrs et les héros ayant défendu l'islam et combattu les ennemis de Dieu», a indiqué l'EI dans un message relayé par son agence de propagande Amaq.

Il est «mort dans la province d'Alep en inspectant les opérations militaires», a ajouté Amaq, sans préciser la date, ni les circonstances de sa mort.

Dans les heures suivantes, un responsable militaire américain avait indiqué que la coalition internationale antidjihadiste avait «mené une frappe aérienne à al-Bab (nord-est d'Alep, NDLR) en Syrie visant un haut responsable de l'EI», sans autre précision.

En début de soirée, le porte-parole du Pentagone Peter Cook a confirmé dans un communiqué que «les forces de la coalition ont mené aujourd'hui une frappe de précision près d'Al-Bab, Syrie, ciblant Abou Mohammed al-Adnani, l'un des plus hauts dirigeants de l'EI». Le résultat de cette frappe est en cours d'évaluation.

«Le retrait d'al-Adnani du champ de bataille porterait un nouveau coup important à l'EI», a poursuivi M. Cook, qualifiant le djihadiste de «principal architecte des opérations extérieures de l'EI et porte-parole en chef de l'EI».

Selon lui, al-Adnani «a coordonné le mouvement des combattants de l'EI, encouragé directement les attaques par des loups solitaires sur des civils et des membres de l'armée, et activement recruté de nouveaux partisans».

Abou Mohammed al-Adnani s'est illustré en exhortant les partisans de l'EI à passer à l'action dans leur pays d'origine en utilisant n'importe quelle arme disponible contre les ressortissants des pays de la coalition. Cet appel aurait notamment inspiré des attentats en Europe.

Un responsable américain de la Défense a cité à ce sujet plusieurs «opérations importantes» comme les attentats à Paris, à Bruxelles et à l'aéroport d'Istanbul, dans un café au Bangladesh ou encore contre un avion russe dans le Sinaï. Ces attaques ont fait au total, d'après cette source, plus de 1800 morts et près de 4000 blessés.

Selon lui, al-Adnani était «beaucoup plus» qu'un porte-parole.

Ministre des attentats

Originaire d'Idleb, dans le nord-ouest syrien, selon une biographie de l'EI, il s'était engagé dans le djihadisme au début des années 2000, prêtant allégeance au redouté chef d'Al-Qaïda en Irak (précurseur de l'EI) Abou Moussab al-Zarqaoui. Ce chef djihadiste jordanien a été tué dans un raid américain en Irak en 2006.

Al-Adnani est progressivement devenu un personnage important au sein du groupe extrémiste, au point que les services de renseignements occidentaux avaient tendance à le considérer comme le «ministre des attentats», chargé de motiver des djihadistes isolés et de superviser des campagnes de terreur en Occident.

Dans un message audio diffusé en septembre 2014 par Al Furqan, le principal média de l'EI, il avait appelé à attaquer «les forces de police et de sécurité, les services de renseignement et leurs collaborateurs» en Occident.

Ce même mois de septembre 2014, le gouvernement américain l'a estampillé «terroriste international» et le département d'État a promis une récompense de 5 millions de dollars pour quiconque fournirait des informations «permettant de le traduire en justice».

Quelques semaines plus tôt, le 29 juin 2014, il avait annoncé dans un enregistrement audio «le rétablissement du califat» par le groupe EI et la désignation de son chef Abou Bakr al-Baghdadi comme «calife». Ce «califat» devait être imposé sur les régions conquises en Syrie et en Irak.

Indication du «déclin» de l'EI

«Dans la mémoire collective djihadiste, Abou Mohammed al-Adnani restera celui qui a annoncé la «restauration du Califat» en juin 2014», a commenté sur Twitter Romain Caillet, spécialiste français des mouvements djihadistes.

Pour l'analyste Charles Lister, expert du djihadisme, sa mort est «un grand coup» porté au groupe djihadiste.

Autre expert des mouvements extrémistes, Aymenn Jawad Al-Tamimi, a estimé que sa disparition était «symboliquement importante et, plus largement, une indication du déclin de l'État islamique».

«Si une frappe aérienne de la coalition l'a touché, cela montre que la pénétration des renseignements de la coalition est très élevée. Sinon, il n'aurait pas été possible d'éliminer autant de personnes de haut rang», a-t-il poursuivi.

Début mai, le colonel américain Steve Warren, un porte-parole militaire de la coalition, indiquait que depuis début 2015, «plus de 40 cibles de haute valeur» de l'EI et d'Al-Qaïda en Irak et Syrie avaient été tués.

En juillet, l'EI a annoncé la mort d'un de ses commandants influents, Omar al-Shishani dit «Omar le Tchétchène», près de Mossoul en Irak. Le Pentagone a confirmé l'avoir visé, tout en restant prudent sur la réalité de sa mort.

Le 25 mars 2016, le secrétaire américain à la Défense Ashton Carter révèle «l'élimination» dans une opération américaine en Syrie d'Abdel Rahmane al-Qadouli, présenté par Washington comme le N.2 de l'EI. Le 6 mai, le chef du groupe djihadiste pour la province irakienne d'Al-Anbar, Abou Wahib, est tué dans un bombardement de la coalition.