Les forces irakiennes s'efforçaient samedi de déloger les combattants du groupe Etat islamique (EI) de leurs dernières poches de résistance dans leur bastion de Fallouja, dont la perte marquerait l'un des plus importants revers infligés aux djihadistes en Irak depuis plus de deux ans.

Revigorées par leur percée à Fallouja, à 50 km à l'ouest de Bagdad, les forces armées ont repris leurs opérations autour de Mossoul, le dernier grand bastion de l'EI en Irak que le premier ministre Haider al-Abadi a promis de «libérer très prochainement».

Même si Fallouja n'a pas été encore entièrement reconquise, elle constitue la dernière en date des batailles perdues par l'EI qui a vu se rétrécir ces derniers mois son «califat» proclamé il y a deux ans sur les territoires occupés en Irak et en Syrie.

Au lendemain de la prise du centre de Fallouja et du principal QG gouvernemental sur lequel elles ont hissé le drapeau national, les forces d'élite «continuent d'avancer pour libérer les quartiers nord» de la ville, où se sont redéployés les djihadistes, selon le commandant Abdelwahab Saadi.

Les forces de police ratissaient pour leur part les quartiers ouest reconquis à la recherche de djihadistes et d'explosifs, a ajouté le commandant de l'offensive pour reprendre Fallouja lancée le 23 mai avec le soutien aérien crucial de la coalition internationale dirigée par les États-Unis.

Vendredi, M. Abadi a affirmé que les forces d'élite du contre-terrorisme (CTS) et les autres unités militaires avaient quasiment repris Fallouja, «à l'exception d'une petite part», après s'être heurtées à une résistance limitée de l'EI.

Exode massif

Selon des responsables de la sécurité, de nombreux membres de l'EI ont réussi à fuir en se fondant parmi les civils sortis de la ville ces derniers jours.

Selon le Conseil norvégien pour les réfugiés (NRC), le retrait de l'EI de Fallouja a entraîné un exode massif avec la sortie de quelque 20 000 civils de la ville en seulement quelques heures vendredi.

Des images diffusées sur les réseaux sociaux montrent des centaines de personnes traversant à la nage l'Euphrate pour se réfugier dans un lieu sûr.

Le NRC a dit craindre pour les civils restés à Fallouja qui seraient les plus vulnérables - femmes enceintes, vieillards, personnes handicapées - sans pouvoir préciser leur nombre.

Depuis plusieurs jours, les ONG alertaient sur la crise humanitaire créée dans et autour de Fallouja où des camps ont été installés pour les déplacés.

L'EI s'est emparé de Fallouja, ville de la grande province d'Al-Anbar, en janvier 2014, cinq mois avant son offensive fulgurante en Irak qui lui avait permis de prendre le contrôle d'autres régions dont Mossoul, la deuxième ville d'Irak (nord).

L'enjeu Mossoul et Raqa

Alors que M. Abadi a promis de vaincre l'EI en Irak avant la fin 2016, les forces irakiennes ont lancé une nouvelle bataille pour libérer la province de Ninive dont Mossoul est le chef-lieu.

«Nous avons commencé à 5 h (22 h au Québec) la deuxième phase de l'opération pour la libération de Ninive» avec l'objectif de reprendre la localité de Qayyarah et «d'en faire un tremplin pour reconquérir Mossoul», environ 60 km plus au nord, a déclaré à l'AFP le ministre de la Défense Khaled al-Obeidi.

Pour Patrick Martin, analyste spécialiste de l'Irak à l'Institute for the Study of War, basé à Washington, l'EI pourrait survivre à la perte de Fallouja.

«La machine de propagande de l'EI sur les réseaux sociaux trouvera probablement toujours les moyens d'attirer les recrues et d'encourager les attaques de loups solitaires», estime-t-il.

L'EI a enregistré de minimes succès militaires sur le terrain en Syrie et en Irak ces derniers mois, mais il a fait les gros titres en revendiquant des attentats meurtriers notamment en Occident.

En Syrie, il fait face à plusieurs offensives dans les régions qu'il contrôle dans le nord, mais parvient à se défendre en recourant principalement aux attentats suicide surtout dans ses fiefs de Minbej, dans la province d'Alep, et Tabqa dans celle voisine de Raqa.

Le ministre russe de la Défense Sergueï Choïgou, dont le pays est le principal allié du régime syrien, a effectué samedi une visite surprise à Damas où il a rencontré le président Bachar al-Assad, selon l'agence officielle syrienne.

Cette visite intervient alors que des responsables du Pentagone ont fait part à leurs homologues russes de leur «vive» préoccupation sur des bombardements de Moscou contre, selon Washington, des combattants soutenus par la coalition internationale menée par les États-Unis dans le sud de la Syrie.