Le premier ministre Justin Trudeau a été contraint de justifier sa décision de mettre fin à la participation du Canada aux frappes aériennes contre des cibles du groupe armé État islamique (EI) en Irak et en Syrie devant les médias américains jeudi alors que des pays alliés se mobilisent pour intensifier la lutte contre le terrorisme.

À l'issue d'un premier entretien avec le président des États-Unis Barack Obama, en marge du Forum de coopération économique pour l'Asie-Pacifique (APEC), M. Trudeau a soutenu que le rapatriement des six avions de chasse CF18 était une promesse de son parti aux dernières élections fédérales. Du même souffle, il a affirmé que le Canada entend demeurer un joueur important dans la lutte au terrorisme en mettant davantage l'accent sur la formation des troupes kurdes dans le nord de l'Irak et en augmentant l'aide humanitaire pour les réfugiés.

M. Trudeau, qui a accepté l'invitation du président Obama de se rendre à Washington au début de la nouvelle année pour une visite officielle, a soutenu que la contribution canadienne à la coalition internationale menée par les États-Unis sera donc tout aussi robuste, a-t-il insisté en réponse à une question d'un journaliste du quotidien Los Angeles Times.

« Le Canada est déterminé à demeurer un membre important de la coalition contre l'EI », a affirmé M. Trudeau, ajoutant que le rappel des CF18 avait été discuté durant la rencontre avec M. Obama, mais il n'a pas indiqué s'il lui avait demandé de revenir sur sa décision. « J'ai fait une promesse claire aux Canadiens de retirer les six avions de chasse et c'est ce que nous allons faire en collaboration et en coordination avec tous nos alliés pour s'assurer que la coalition demeure une force contre l'EI».

Durant leur tête-à-tête, les deux leaders ont discuté de la lutte contre le terrorisme et de l'importance d'une étroite collaboration entre les agences de sécurité des deux pays pour contrer toute menace sur le territoire nord-américain étant donné la longue frontière que partagent le Canada et les États-Unis, tout en protégeant les droits et libertés.

Ils ont aussi discuté de l'économie et des échanges commerciaux entre les deux pays et des retombées potentielles du Partenariat transpacifique.  À ce sujet, le président Obama a laissé entendre que les États-Unis et le Canada « ratifieront bientôt » cet important accord, même si les libéraux de Justin Trudeau ont dit vouloir l'examiner et tenir des consultations nationales avant de décider s'il sera adopté ou rejeté par le gouvernement canadien.

Quant à la conférence de Paris sur les changements climatiques, M. Obama s'est dit encouragé par la nouvelle détermination du Canada, depuis la victoire de Justin Trudeau, de participer pleinement à la lutte contre le réchauffement de la planète. Le président américain a indiqué que son administration et le gouvernement Trudeau vont coordonner leurs efforts en prévision de cette rencontre cruciale.

« Évidemment, nos deux pays sont des producteurs importants d'énergie et nous sommes heureux de produire du pétrole conventionnel. Nous reconnaissons aussi qu'il est important de faire la transition vers du pétrole plus propre afin de protéger l'avenir de nos enfants et nos petits-enfants. Je crois que le premier ministre Trudeau tient à ce que la conférence de Paris soit couronnée de succès et nos équipes agissent déjà de manière coordonnée sur cette question. Je suis heureux d'avoir un solide partenaire au Canada », a dit le président Obama. Rappelons que le président a rejeté au début novembre le projet de TransCanada de construire l'oléoduc Keystone XL qui aurait permis d'acheminer le pétrole lourd issu des sables bitumineux jusqu'aux raffineries du Texas. M. Trudeau s'était prononcé en faveur de ce projet.

Devant journalistes, les deux hommes se sont félicités des relations canado-américaines, mais le président Obama est allé plus loin en disant « que nous avons vu l'engouement incroyable qu'a suscité Justin avec sa campagne au Canada. J'ai confiance qu'il va être en mesure de donner une dose d'énergie et de réforme à l'échiquier politique du Canada. Nous avons hâte de travailler avec lui. »

Le premier ministre a rencontré son homologue américain à Manille au dernier jour du sommet de l'APEC. Il s'agissait pour les deux dirigeants de leur deuxième sommet international en moins d'une semaine dans la foulée des attentats terroristes de Paris. Le sommet du G20 qui a eu lieu à Antalya, en Turquie, au début de la semaine, a aussi été dominé par la question de la lutte au terrorisme et de la réponse adéquate de la communauté internationale pour combattre ce fléau.

Dans le communiqué final du sommet de l'APEC, les dirigeants des 21 pays membres de l'organisation ont souligné l'urgence d'une plus grande collaboration internationale dans la lutte contre le terrorisme. Ils ont vertement condamné « tous les gestes, méthodes et pratiques liés au terrorisme ».

L'APEC, dont font partie le Canada, les États-Unis, la Chine, l'Australie, la Russie, le Chili, entre autres, se penche normalement sur les enjeux d'ordre économique et de commerce. Mais les événements tragiques de Paris ont bouleversé l'ordre du jour de ce sommet. « Nous n'allons pas laisser le terrorisme menacer les valeurs fondamentales sous-jacentes nos économies libres et ouvertes », peut-on lire dans la déclaration finale.