Trois semaines après la chute de Ramadi, capitale de la plus grande province d'Irak, Barack Obama a annoncé mercredi un renforcement prudent du dispositif américain pour contrer les djihadistes de l'organisation État islamique, sans modifier sa stratégie sur le fond.

Le président américain a autorisé le déploiement de 450 soldats américains supplémentaires - portant leur nombre total à 3550 - pour accélérer la formation des troupes irakiennes, en particulier des Sunnites, engagées dans la lutte contre l'EI.

Il a également approuvé la livraison rapide de matériel militaire aux forces irakiennes, y compris les forces kurdes peshmergas et combattants des tribus locales opérant sous commandement irakien.

«Cette décision ne marque pas un changement de mission», a souligné avec force le Pentagone, rappelant que ces soldats américains, comme ceux déjà présents sur place, ne participeraient pas aux opérations de combat au sol.

Selon l'exécutif américain, les soldats supplémentaires auront pour rôle d'«entraîner, conseiller et aider» les forces de sécurité irakiennes sur la base d'Al-Taqadoum (province d'Al-Anbar), dans l'objectif de reprendre Ramadi.

Les États-Unis et leurs partenaires de la coalition, qui mènent des frappes aériennes en Irak en Syrie contre l'EI, ont à ce jour donné une formation militaire de base à quelque 9000 militaires irakiens. Environ 3.000 autres sont en cours de formation.

Pour l'instant, les troupes irakiennes déjà formées par la coalition ont été déployées près de Samarra, dans le nord de Bagdad, aux côtés des forces kurdes dans le nord de l'Irak, et à al-Karmah, dans la province sunnite d'Al-Anbar.

La Maison-Blanche insiste depuis plusieurs mois sur la nécessité d'impliquer plus étroitement les tribus sunnites dans la lutte contre l'EI.

«Sans cette participation locale, même si vous enregistrez des succès à court terme, il est très difficile de garder le contrôle de ces régions», a expliqué lundi M. Obama lors d'une conférence de presse en Allemagne à l'issue du sommet du G7.

«Nous avons vu des tribus sunnites qui sont non seulement prêtes à se battre contre l'EI mais qui l'ont également fait avec succès», a--t-il souligné, regrettant que cela n'aille «pas assez vite».

Les États-Unis veulent notamment s'inspirer de l'expérience de 2006, lorsqu'ils avaient réussi à mobiliser des tribus sunnites contre al-Qaïda en Irak, qui mettaient à feu et à sang la province d'Al-Anbar.

«Décision tactique»  

Interrogé sur d'éventuelles augmentations ultérieures du nombre de soldats américains en Irak, l'exécutif américain n'a rien exclu.  «Nous sommes déterminés à revoir régulièrement notre approche et à faire des ajustements en fonction de l'évolution sur le terrain», a indiqué Ben Rhodes, conseiller de M. Obama.

La chute de Ramadi a suscité des interrogations sur la stratégie américaine, mais aussi provoqué des tensions entre Washington et Bagdad, le secrétaire à la Défense américaine Ashton Carter s'interrogeant en particulier ouvertement sur «la volonté» de l'armée irakienne «de se battre».

A l'issue d'une rencontre lundi avec le Premier ministre irakien, Haider al-Abadi, M. Obama a affiché son soutien à ce dernier. Il a aussi insisté sur la nécessité de renforcer l'aide aux forces irakiennes pour qu'elles puissent mener des opérations «offensives et pas simplement défensives» contre les djihadistes de l'EI.

Nombre d'élus républicains réclament depuis plusieurs mois une réponse militaire américaine plus marquée face à la progression de l'EI.

Mercredi Le président républicain de la Chambre des représentants John Boehner a apporté son soutien à la «décision tactique» de M. Obama, mais dénoncé sa portée limitée. «Où est la stratégie globale pour faire face à l'Iran, l'État qui soutient le plus le terrorisme à travers le monde, et pour contrer l'État Islamique?», a-t-il lancé.

Il y a quelques jours, le numéro deux de la diplomatie américaine, Antony Blinken, a défendu la stratégie de la coalition. Selon lui, l'EI contrôle «25% de moins de l'Irak», beaucoup de matériel a été détruit et plus de 10 000 djihadistes ont été tués. «Cela va finir par avoir un effet», a-t-il estimé.