Un ex-officier de l'ancien dictateur irakien Saddam Hussein a été le «plus important stratège» du groupe État islamique (EI) lorsque ce dernier a pris le contrôle du nord de la Syrie, a rapporté dimanche l'hebdomadaire allemand Der Spiegel.

Selon Der Spiegel, il s'agirait de Samir Abd Muhammad al-Khlifawi, surnommé Haji Bakr, un ancien membre du conseil militaire de l'EI, vraisemblablement tué par l'armée syrienne libre (ASL) à Tal Rifaat, dans le nord de la Syrie, en janvier 2014.

L'homme était un ancien colonel des services secrets de l'armée de l'Air de Saddam Hussein, selon l'hebdomadaire.

Der Spiegel dit s'appuyer sur une liasse de documents d'une trentaine de pages (graphiques, emplois du temps) rédigés par Bakr et obtenus après de longues négociations avec des rebelles d'Alep (nord).

Ils montrent un programme précis visant à l'instauration d'un califat dans le nord de la Syrie: implantations de cellules d'espions dans des villes et des villages, assassinats, enlèvements... «comme préalables à la prise de pouvoir», écrit Der Spiegel.

L'hebdomadaire explique que Bakr s'est retrouvé sans emploi et «aigri» après la dissolution en 2003 de l'armée irakienne par Paul Bremer, chargé d'administrer le pays après la chute du régime de Saddam Hussein, défait par la coalition emmenée par les États-Unis.

Haji Bakr a rencontré ensuite Abou Moussab Al-Zarqaoui, un ex-dirigeants d'Al-Qaïda, tué en 2006, puis, entre 2006 et 2008, a passé deux années dans les geôles américaines, notamment dans la prison d'Abou Ghraib.

Plus tard, la route de Bakr va croiser celle des islamistes et, en 2010, cette «éminence grise», qualifiée par Der Spiegel de «plus important stratège» de l'EI, va comploter avec un groupe d'anciens officiers de renseignements irakiens pour placer l'islamiste Abou Bakr al-Baghdadi à la tête de l'EI, soucieux de donner une dimension religieuse à l'organisation.

Un témoin, cité par Der Spiegel, le décrit comme «absolument pas islamiste», plutôt un nationaliste qui «utilise la religion comme un moyen en vue d'une fin». «Il était extrêmement intelligent, décidé, un excellent logisticien», se souvient encore ce témoin.

L'EI a proclamé en juin 2014 un «califat» islamique dans les territoires qu'il contrôle en Syrie et en Irak où il multiplie les exactions.