Le Conseil de sécurité de l'ONU devrait adopter la semaine prochaine une résolution qui vise à tarir toutes les sources de financement du groupe armé État islamique (EI), qu'elles proviennent du pétrole, du trafic d'antiquités ou de rançons, selon un diplomate.

La première mouture de ce texte, élaborée par la Russie, a été complétée après des discussions avec Américains et Européens avant d'être distribuée aux 15 pays membres.

Ceux-ci en ont discuté pour la première fois à huis clos vendredi et leur réaction a été «très positive», selon l'ambassadeur russe Vitali Tchourkine. Il table sur une adoption dès mardi prochain.

Son homologue britannique Mark Lyall Grant a indiqué qu'aucun pays n'avait élevé d'objection formelle et que le texte devrait être adopté avant jeudi. «Cette résolution, a-t-il expliqué, n'apporte pas de changement fondamental mais elle montre une nouvelle fois que le Conseil est uni dans la lutte antiterroriste et est prêt à prendre des mesures pour resserrer l'étau autour de l'EI».

Le texte s'inspire largement d'une série de décisions déjà prises par l'ONU dans le cadre de sanctions (gel d'avoirs, embargo sur les armes notamment) imposées aux organisations et individus affiliés à al-Qaïda.

Le Conseil avait aussi adopté en août 2014 une résolution visant à couper les fonds aux djihadistes en menaçant de sanctionner les pays qui leur achèteraient du pétrole. La résolution devait également endiguer le flux de combattants étrangers partant rejoindre l'EI en Irak et en Syrie.

Ces obligations imposées aux États membres et reprises dans le nouveau texte «sont déjà solides et contraignantes mais l'objectif de la nouvelle résolution est de les étendre et de clarifier ce qu'elles impliquent, en particulier dans le domaine de la contrebande de produits pétroliers», explique un responsable américain impliqué dans les discussions. S'exprimant sous couvert d'anonymat, il prévoit lui aussi l'adoption du texte la semaine prochaine.

Il reconnait que faire appliquer dans les faits cette résolution juridiquement contraignante «sera un défi» étant donné la multitude d'intermédiaires qui font affaire avec les djihadistes. «Nous espérons que ces normes et dispositions auront un véritable impact».

L'une des principales nouveautés de la résolution, souligne-t-il, est une interdiction spécifique du trafic d'oeuvres d'art et d'antiquités dérobées en Syrie, dont l'EI contrôle une partie du territoire. Une telle interdiction s'applique déjà à l'Irak.

«Tous les États membres, indique le projet de résolution, devront prendre les mesures nécessaires pour prévenir le commerce de biens culturels irakiens et syriens» qui auraient été sortis illégalement d'Irak depuis août 1990 et de Syrie depuis mars 2011 (début de la crise syrienne) et pour assurer leur retour éventuel dans leur pays d'origine.

En ce qui concerne le pétrole, le texte rappelle que les États membres sont tenus de ne pas commercer directement ou indirectement avec l'EI. Le Conseil leur demande de signaler à l'ONU lorsqu'ils saisissent du pétrole brut ou raffiné venu de zones tenues par les djihadistes.

La résolution souligne que le trafic routier en provenance de zones tenues par l'EI permet également aux djihadistes de faire commerce d'autres richesses comme l'or, les produits agricoles ou de marchandises pillées (produits électroniques, cigarettes). Elle recommande aux États voisins des contrôler ce trafic, une disposition qui vise en particulier la Turquie, important point de transit pour ces livraisons pétrolières.

Un rapport de l'ONU publié en novembre dernier recommandait, de manière plus radicale, de bloquer les camions-citernes en provenance des territoires contrôlés par l'EI. Selon ce rapport, les djihadistes gagneraient de 850 000 à 1,65 million de dollars par jour en vendant du pétrole à des intermédiaires privés.

Ces revenus ont toutefois nettement diminué récemment, à la suite des bombardements menés par la coalition et surtout de la baisse du prix du brut sur les marchés.

Dans sa résolution, le Conseil recommande par ailleurs aux États membres de ne pas verser de rançon en cas d'enlèvement ou de prise d'otages, comme il l'avait fait en janvier 2014.