Il dit s'appeler Abdallah et venir du Kazakhstan. Il n'a pas plus de 11 ans. Il a les cheveux mi-longs et les yeux en amande des peuples d'Asie centrale. Dans une nouvelle vidéo du groupe État islamique (EI), il semble exécuter deux otages.

Dans la vidéo en russe de plus de sept minutes, les deux otages confessent être des Kazakhs travaillant pour le FSB, les services secrets russes. «Ils sont maintenant aux mains des lionceaux du califat», dit un combattant du groupe État islamique, en treillis, qui se tient aux côtés de l'enfant.

Mise en ligne sur le site de propagande internationale du groupe extrémiste sunnite, Al-Hayat, la vidéo lourdement éditée montre l'enfant qui vise la tête des deux hommes avec un revolver. Il semble ensuite tirer sur eux, avant de tirer dans les airs en guise de célébration.

On ne voit ni les cadavres des deux hommes ni la moindre effusion de sang, deux éléments qui laissent croire à plusieurs observateurs que la vidéo pourrait être une mise en scène.

«L'honneur se tient debout dans le califat, au-dessus des cadavres de l'incrédulité qui gisent humiliés sous les pieds des jeunes moudjahidins», lit-on dans un surtitre en arabe et en anglais.

Mise en scène ou non, la vidéo choque profondément ceux qui travaillent auprès des enfants dans les zones de conflit.

Une triste réalité

«On sait que le groupe État islamique et d'autres forces d'opposition en Syrie utilisent des enfants. La plupart du temps dans des rôles de soutien. On a vu beaucoup de vidéos d'enfants dans des camps d'entraînement. C'est la première fois qu'on voit un enfant engagé à tuer des gens, a noté hier Samantha Nutt, fondatrice de l'organisation internationale War Child. C'est cependant une réalité qu'on a vue dans beaucoup de conflits. Au cours des 20 dernières années, j'ai fait des entrevues avec des enfants de 10 à 12 ans qui avaient tué plus de 10 fois. C'est un terrible crime d'utiliser des enfants de cette manière», ajoute-t-elle.

Au Congo-Kinshasa, en Sierra Leone ou en Ouganda, des milliers d'enfants ont joué le rôle des bourreaux.

Directrice de l'Initiative de Roméo Dallaire pour les enfants soldats, Shelly Whitman croit que l'EI essaie d'envoyer un message politique en publiant cette vidéo. «Ils veulent montrer qu'ils préparent leurs ressources humaines pour le long terme, qu'ils préparent la prochaine génération de combattants et qu'ils comptent combattre très longtemps», indique Mme Whitman, jointe à Halifax hier.

Elle explique que le processus de radicalisation et d'endoctrinement des enfants dans des organisations comme l'EI commence doucement, notamment par le biais des écoles, avant de devenir plus sérieux. «Il y a toujours un processus. Quand les enfants sont kidnappés ou recrutés, ils ne savent pas quel rôle ils vont éventuellement jouer», dit Mme Whitman.

Photo tirée de Twitter

LES ENFANTS DE SYRIE

5 600 000

Nombre d'enfants dans une situation précaire en Syrie, qu'ils soient déplacés, qu'ils souffrent de pauvreté ou qu'ils se trouvent dans les zones de combats.

1 715 048

Nombre d'enfants syriens qui vivent dans un camp de réfugiés au Liban, en Jordanie, en Turquie, en Irak, en Égypte ou dans un pays d'Afrique du Nord.

Source: UNICEF