La coalition menée par Washington a frappé dans la nuit de dimanche à lundi un complexe gazier syrien contrôlé par les djihadistes de l'État islamique, selon une ONG, tandis que la branche syrienne d'Al-Qaïda menace l'Occident de représailles.

L'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH), ONG proche de l'opposition syrienne, a annoncé que les forces de la coalition avaient attaqué pour la première fois un complexe gazier situé dans l'est de la Syrie, dans la province de Deir Ezzor, proche de la frontière irakienne et riche en hydrocarbures.

L'usine Coneco, qui est «sous le contrôle de l'EI», est «la plus grande de Syrie», a déclaré à l'AFP le directeur de l'OSDH, Rami Abdel Rahman.

Selon lui, l'attaque visait à pousser les hommes de l'EI à abandonner ce complexe gazier, et elle «n'a pas fait de morts chez les djihadistes, mais quelques blessés».

Les États-Unis et un groupe de pays arabes, principalement du Golfe, ont commencé le 23 septembre à mener des frappes aériennes contre des positions djihadistes en Syrie, un mois et demi après le début, le 8 août, des attaques américaines contre l'EI dans l'Irak voisin.

Par des attaques comme la dernière en date, la coalition veut tarir la principale source de financement des djihadistes, qui vendent en contrebande les hydrocarbures des installations dont ils ont pris le contrôle.

Dans la journée de dimanche, les raids aériens ont ainsi pris pour cible quatre raffineries de taille moyenne, ainsi que le centre de commandement de l'EI près de Raqa, dans le nord de la Syrie, selon le commandement américain chargé du Moyen-Orient (Centcom).

Au moment où les frappes de la coalition se multiplient, le chef du Front al-Nosra, branche syrienne d'Al-Qaïda, a menacé d'attaques de représailles les populations des pays occidentaux engagés dans la coalition.

C'était la première fois que le chef d'Al-Nosra, Abou Mohammad al-Joulani, s'exprimait publiquement depuis le début des frappes contre son groupe et contre l'EI.

Dans un enregistrement sonore diffusé sur internet, il a appelé les peuples «d'Amérique et d'Europe» à s'opposer à leurs gouvernements et les a menacés de «déplacer la bataille» jusque dans leurs «foyers». «Vos dirigeants ne paieront pas seuls le prix de la guerre, vous allez payer le prix fort», a prévenu le chef d'Al-Nosra.

«Ground Zero» des djihadistes

«Qu'avez-vous gagné de votre guerre contre les musulmans et les djihadistes, si ce n'est les tragédies et les douleurs qui se sont abattues sur vos pays et vos enfants?», a lancé le chef djihadiste, se référant aux soldats occidentaux tués en Irak et en Afghanistan et aux civils qui ont péri dans les attentats du 11-Septembre.

Samedi déjà, un porte-parole d'Al-Nosra avait menacé de représailles «dans le monde entier» les pays de la coalition, qualifiant leurs opérations de «guerre contre l'islam» et fustigeant un «axe du mal» dirigé par «le pays des cowboys».

Et la semaine dernière, un porte-parole de l'EI avait appelé les musulmans à tuer des citoyens des pays de la coalition.

Les États-Unis et leurs alliés ciblent en Syrie, outre l'EI, des positions d'Al-Nosra et des membres de Khorassan, un groupuscule lié à Al-Qaïda dont le chef présumé aurait été tué.

Le président américain Barack Obama a admis dimanche que les États-Unis avaient sous-estimé le fait que le chaos en Syrie pourrait fournir un terrain propice à l'émergence de groupes djihadistes aussi dangereux que l'EI.

«Le chef de nos services de renseignement a reconnu qu'ils avaient sous-estimé ce qui se passait en Syrie», a déclaré M. Obama sur la chaîne de télévision CBS. Il a par ailleurs qualifié la Syrie de «Ground Zero pour les djihadistes à travers le monde».

La Turquie ne peut pas «rester en dehors»

Malgré les frappes, les djihadistes de l'EI poursuivent leur offensive pour s'emparer de la ville syrienne kurde d'Aïn al-Arab (Kobané en kurde), proche de la frontière avec la Turquie.

Les derniers combats ont poussé plusieurs centaines d'habitants à se réfugier en Turquie, qui accueille déjà plus de 160 000 personnes parties de la région d'Aïn al-Arab.

La Turquie ne peut rester «en dehors» de la coalition internationale, a estimé dimanche le président turc Recep Tayyip Erdogan, dont le pays décidera la semaine prochaine de la nature de son implication.

Depuis plusieurs mois, la position prudente de la Turquie contre l'EI décevait l'Occident, mais le récent voyage de M. Erdogan aux États-Unis semble avoir changé la donne.

Le Premier ministre turc, Ahmet Davutoglu, a indiqué que le gouvernement déposerait lundi un projet de mandat autorisant l'intervention des forces armées turques en Irak et en Syrie. Ce document sera débattu jeudi au Parlement.

Le Royaume-Uni, qui vient de se joindre à la coalition, fait désormais voler «quotidiennement» des avions de combat au-dessus de l'Irak, a déclaré dimanche le ministre britannique de la Défense, Michael Fallon.