Les députés britanniques, qui avaient infligé l'an dernier un camouflet à David Cameron en recalant son projet de frappes aériennes en Syrie, s'apprêtent cette fois à voter vendredi largement en faveur d'une participation aux raids contre les djihadistes du groupe État Islamique (EI) en Irak.

Ce vote interviendra alors que Scotland Yard a annoncé l'arrestation jeudi à Londres de neuf hommes, dont le prédicateur radical Anjem Choudary, soupçonnés de liens avec un groupuscule islamiste interdit au Royaume-Uni, Al Muhajiroun.

Cependant, si leur arrestation s'inscrit dans le cadre d'une enquête contre le «terrorisme islamiste», elle ne répond pas à «un risque immédiat pour la sécurité publique», a précisé la police.

Après avoir longtemps hésité, le premier ministre conservateur David Cameron a profité de la tribune des Nations unies mercredi pour appeler le Royaume-Uni à se joindre à la coalition dirigée par les États-Unis face au «mal» d'une «barbarie médiévale».

Depuis New York, il a exhorté les députés, qu'il a convoqués en session extraordinaire vendredi, à ne pas être «pétrifiés de peur» à l'idée de commettre les mêmes erreurs que lors du déclenchement par Tony Blair de l'offensive terrestre en Irak, aux côtés des Américains, en 2003. Une décision toujours vivement critiquée onze ans plus tard.

«Cela ne doit pas devenir une excuse pour choisir l'indifférence et l'inaction», a insisté David Cameron.

Que M. Cameron obtienne l'aval du Parlement ne fait guère de doute parce que, échaudé par l'échec humiliant de l'été 2013, il a pris la précaution de s'assurer au maximum d'un vote positif, et parce que les dirigeants des deux partis travailliste et libéral-démocrate ont d'ores et déjà exprimé leur soutien de principe.

Le texte qui sera soumis au vote autorise «l'usage des frappes aériennes» dans le cadre d'un soutien requis par le gouvernement irakien, et précise que Londres «ne déploiera aucun soldat britannique dans les zones de combat».

Comme la France, la Grande-Bretagne compte donc limiter ses frappes au seul territoire irakien. Bombarder les positions du groupe EI en Syrie, comme le font les États-Unis depuis mardi avec l'appui de cinq pays arabes, nécessiterait un nouveau vote du Parlement et n'est pour l'instant pas à l'ordre du jour.

Impact plus politique que militaire

Un feu vert des députés permettrait aux chasseurs bombardiers britanniques d'entrer en action rapidement, selon les experts militaires.

Six avions de combat Tornado sont déjà engagés depuis quelques semaines dans des missions de surveillance au-dessus de l'Irak. Un sous-marin équipé de missiles Tomahawk pourrait se joindre à eux.

Selon les experts, une participation britannique aura toutefois un impact plus politique que militaire.

«On n'a pas vraiment besoin du Royaume-Uni. Les États-Unis ont la capacité nécessaire, d'autres pays comme la France sont déjà engagés. La question est plutôt de savoir si le Royaume-Uni estime qu'il en va de sa responsabilité», a expliqué à l'AFP Afzal Ashraf, chercheur au Royal United Services Institute.

«Nous sommes confrontés à un mal contre lequel le monde entier doit s'unir. La Grande-Bretagne jouera son rôle», a souligné David Cameron.

Pour légitimer sa volonté d'entrer en guerre, «peut-être pour un bon moment», a-t-il admis, le premier ministre a pris soin de s'adresser directement aux Britanniques depuis New York.

Le groupe EI constitue «une menace claire et directe» pour le Royaume-Uni, notamment en raison des quelque 500 Britanniques soupçonnés d'avoir rejoint ses rangs. Selon la presse britannique, jusqu'à cinq d'entre eux auraient trouvé la mort dans les bombardements américains en Syrie.

David Cameron est d'autant plus déterminé à agir depuis que le groupe EI a diffusé des vidéos d'otages britanniques, dont un, David Haines, a été décapité, comme l'ont été deux journalistes américains.

«L'EI doit être éradiqué», a déclaré sa fille, Bethany Haines, dans une interview diffusée sur la chaîne ITV News. «Et s'il faut recourir à des frappes aériennes ou à des forces terrestres, et bien qu'à cela ne tienne».

L'usage de la force a fait toutefois l'objet de critiques lors d'une manifestation pacifiste qui a rassemblé 200 personnes jeudi devant le 10, Downing Street.

«Nous ne voulons pas d'une autre guerre», ont scandé les participants, tout en brandissant des pancartes «Non aux bombardements en Irak».