Les autorités américaines sont convaincues que l'organisation djihadiste État islamique tentera d'agir aux États-Unis en représailles de leurs frappes en Syrie, a déclaré jeudi le patron du FBI, annonçant avoir identifié l'assassin de journalistes américains décapités.

«Il n'y a aucun doute», a déclaré le directeur du FBI James Comey. Les djihadistes de l'EI «veulent faire quelque chose en représailles aux actions de l'Amérique et de ses alliés (...). Je suis certain qu'ils désirent trouver un moyen de frapper ici», a-t-il assuré lors d'une table ronde au siège du FBI avec quelques journalistes.

Les États-Unis et leurs alliés arabes frappent depuis mardi des cibles djihadistes en Syrie et ont commencé, dans la nuit de mercredi à jeudi, à frapper les installations pétrolières contrôlées par le groupe extrémiste EI. Depuis le 8 août, les États-Unis mènent des frappes aériennes contre l'EI en Irak.

«La logique, s'ils aspirent à devenir les leaders du djihad mondial, est qu'ils ne peuvent pas y parvenir sans frapper l'Amérique», a poursuivi le patron de la police fédérale américaine. «Je n'ai absolument aucun doute que s'ils avaient la capacité --ce dont je doute-- de mener des attaques sophistiquées simultanées (du type du 11-Septembre), ils le feraient», a-t-il ajouté.

Le responsable américain n'a pas donné de détails sur le type d'attaques que les autorités redoutent mais il a estimé que l'objectif de l'EI était de «tuer ou de brutaliser des Américains innocents».

Il a du même coup annoncé l'identification de l'assassin des journalistes américains James Foley et Steven Sotloff et du Britannique David Cawthorne Haines, tous trois exécutés par décapitation sur revendication de l'EI.

«Nous l'avons identifié», a déclaré le chef du FBI, en refusant de donner des indications sur l'identité ou la nationalité du bourreau.

Sur les vidéos diffusées par l'EI, le meurtrier dont le visage était masqué sous une cagoule noire, proférait, avec un fort accent britannique, des menaces à l'adresse de Barack Obama s'il poursuivait les frappes américaines contre l'EI.

«Je suis de retour, Obama, et je suis de retour à cause de ton arrogante politique étrangère envers l'EI», déclarait notamment l'assassin masqué, debout derrière l'une de ses victimes vêtue d'une combinaison orange, pour rappeler la tenue des prisonniers de Guantanamo.

L'organisation EI avait revendiqué la décapitation le 19 août du journaliste américain James Foley, le 3 septembre celle de son compatriote Steven Sotloff, et le 13 septembre, celle du travailleur humanitaire britannique David Haines, qui avaient été tous trois enlevés en Syrie.

Dans une autre vidéo de 55 minutes de l'EI, intitulée «Flames of war» et diffusée le 19 septembre, on voit un militant djihadiste masqué parlant parfaitement anglais mais cette fois avec un accent américain ou canadien.

«Il n'y a pas de doute que quelqu'un s'exprime avec un accent nord-américain sur cette vidéo, donc c'est l'une de nos grandes préoccupations à présent», a déclaré M. Comey.

Il a parlé de son inquiétude au sujet des combattants djihadistes recrutés aux États-Unis pour aller renforcer les rangs de l'EI en Syrie et en Irak.

Une douzaine de ressortissants américains, selon lui, combattent actuellement avec les organisations terroristes, quelles qu'elles soient. Au total, une centaine ont cherché à les rejoindre, y sont parvenus et sont rentrés sur le sol américain ou se trouvent toujours en Syrie.

Le chef du FBI s'est dit «inquiet du fait que l'EI cherche encore à motiver et à radicaliser les gens aux États-Unis».

Interrogé sur l'efficacité les récentes frappes ciblées des États-Unis contre les membres de Khorassan, un groupuscule proche d'Al-Qaïda, le patron du FBI a dit «continuer à travailler avec l'hypothèse qu'ils sont toujours indemnes».

Les autorités américaines n'ont pas pu confirmer l'ampleur des dommages subis par Khorassan, ni si son chef avait été tué lors des frappes mardi.

Elles avaient indiqué que ce groupe s'apprêtait à conduire «une attaque majeure» sur le sol américain. «Cette organisation est au top de la liste de mes préoccupations» depuis «longtemps», a déclaré M. Comey.

Car «c'est un regroupement de terroristes très, très, très mauvais et expérimentés, sur lequel nous avons peu de visibilité», a-t-il dit. Ils «travaillaient à une attaque», a ajouté le chef de la police, sans pouvoir dire si celle-ci était prévue «demain, dans trois semaines ou dans trois mois».

«Mais je dois faire comme si c'était demain», a-t-il dit.

Nouveau renforcement de la sécurité à New York

Le chef de la police de New York a annoncé jeudi un renforcement des mesures de sécurité dans la ville, après des déclarations du premier ministre irakien évoquant de possibles attentats dans le métro, mais il a aussi cherché à rassurer les New-Yorkais.

«Nous n'avons pas actuellement de menace confirmée contre New York ou son métro», a déclaré le chef de la police Bill Bratton, lors d'un point de presse avec le maire Bill de Blasio.

«Nous sommes convaincus que les New-Yorkais sont en sécurité», a affirmé de son côté M. de Blasio.

M. Bratton a affirmé que la police choisissait cependant toujours la prudence, et avait donc mis en place dans les cinq arrondissements et les 450 stations de métro de New York «des ressources accrues de manière significative», dans les deux heures ayant suivi les déclarations du premier ministre irakien.

Il a notamment évoqué un renforcement des effectifs, des fouilles, et l'utilisation de chiens spécialisés dans la détection d'explosifs.

Selon des médias américains, M. Haïdar al-Abadi a affirmé jeudi matin à un petit groupe de journalistes américains, en marge de l'assemblée générale de l'ONU, qu'il avait été informé d'un projet d'attentats par des combattants étrangers de l'organisation État islamique (EI) visant des métros aux États-Unis et à Paris.

La sécurité avait déjà été très visiblement accrue à New York ces derniers jours, en raison de l'Assemblée générale de l'ONU, qui attire dans la ville de très nombreux chefs d'État et de gouvernement, et en raison aussi de ce que le gouverneur de l'Etat Andrew Cuomo a appelé les «récentes tensions internationales».

M. Cuomo a lui aussi cherché à rassurer jeudi les New-Yorkais, en prenant le métro.

«Il n'y a pas de menace immédiate spécifique crédible», a-t-il déclaré, en écho à M. Bratton.

La Maison-Blanche avait plus tôt affirmé qu'elle ne disposait d'aucune information sur ce prétendu projet. «Nous avons vu des articles sur les propos du premier ministre Abadi. Nous n'avons pas confirmé un tel complot et aurions besoin d'examiner toute information de la part de nos partenaires irakiens avant de nous prononcer», a déclaré Caitlin Hayden, porte-parole du Conseil de sécurité nationale.

«Personne au sein du gouvernement américain n'est au courant d'un tel complot et cela n'a pas été évoqué lors de nos rencontres avec les responsables irakiens ici à New York», a également indiqué un haut responsable américain sous couvert d'anonymat.

En France, une source gouvernementale française a de son côté indiqué que les services de renseignement français ne disposaient «à cette heure d'aucun élément permettant de confirmer les menaces évoquées par le premier ministre irakien».

De même source, les mesures de renforcement de sécurité «dans les lieux publics et les transports» annoncées jeudi, l'ont été «indépendamment et préalablement à cette déclaration, en raison du niveau général des menaces liées aux opérations militaires et à celles de l'organisation EI».