Les avions de combat américains ont étendu pour la première fois à l'ouest de l'Irak leur zone de frappes contre les djihadistes afin de protéger un barrage vital, au moment où Washington s'emploie à bâtir une coalition pour tenter d'en finir avec ces extrémistes.

Mettant ces frappes à profit, les forces irakiennes appuyées par des tribus sunnites ont lancé une vaste offensive contre les djihadistes de l'État islamique (EI) dans la région de Haditha, près du barrage, dans la province à majorité sunnite d'Al-Anbar.

Jusque-là, les États-Unis avaient concentré leurs raids sur les positions de l'EI au nord de Bagdad, aidant l'armée appuyée par les combattants kurdes et les miliciens chiites à reprendre quelques secteurs à l'EI, principalement le barrage de Mossoul, le plus important du pays.

Ce groupe extrémiste, responsable d'atrocités en Irak mais aussi en Syrie voisine, avait pris dès janvier des secteurs de la province d'Al-Anbar, frontalière de la Syrie, et s'était emparé de nouvelles régions à la faveur de son offensive lancée le 9 juin en Irak.

«À la demande du gouvernement irakien, les forces militaires américaines ont attaqué les terroristes de l'EI près de Haditha (...) en soutien aux forces de sécurité et aux tribus sunnites protégeant le barrage», a annoncé le Commandement central américain à Washington.

Les frappes avaient pour objectif «d'empêcher les terroristes de menacer la sécurité du barrage», a-t-il affirmé. Une éventuelle prise par l'EI du barrage, «ou sa rupture catastrophique pourrait menacer le personnel et les installations américaines dans et autour de Bagdad, de même que des milliers d'Irakiens».

L'EI a tenté maintes fois de s'emparer du barrage de Haditha, qui avec celui de Mossoul, sont vitaux pour la production d'électricité et l'irrigation.

Offensive irakienne 

Mettant à profit ces frappes, les forces armées «soutenues par des raids aériens irakiens et des tribus ont lancé une offensive d'envergure dans les régions entourant le secteur de Haditha», a déclaré un porte-parole militaire.

Le gouverneur d'Al-Anbar, qui supervisait l'offensive, a été blessé par des tirs d'obus, selon un correspondant de l'AFP sur place.

La force conjointe a repris la ville de Barwana, à l'est de Haditha, aux djihadistes qui ont laissé derrière armes et véhicules. L'armée a hissé le drapeau irakien sur le principal barrage de la ville après avoir retiré celui de l'EI.

Après le départ du pouvoir du premier ministre chiite Nouri al-Maliki, honni par la minorité sunnite concentrée à Al-Anbar, les membres des tribus sunnites ont annoncé avoir pris les armes contre l'EI.

Le premier ministre irakien désigné Haïdar al-Abadi poursuit les tractations pour former un gouvernement rassemblant toutes les communautés réclamé par la communauté internationale, et a jusqu'au 9 ou 10 septembre pour l'annoncer.

L'extension des frappes témoigne de la détermination des États-Unis à combattre l'EI, moins de trois ans après le départ des dernières troupes américaines du pays.

Outre ces raids, Washington a envoyé des armes aux forces kurdes et plus de 800 conseillers militaires et soldats pour aider l'armée et défendre le personnel américain.

Mais le président Barack Obama, dont une interview sera diffusée à partir de 14H40 GMT (10h40, heure de l'Est), s'active surtout à mettre en place une forte coalition contre ce groupe qui compte dans ses rangs des centaines de combattants européens et américains qui risquent d'exporter en Occident leurs actes de «terrorisme».

Outre ses exactions - viols, exécutions, enlèvements - contre les habitants des régions qu'ils contrôlent, l'EI a décapité deux journalistes américains enlevés en Syrie -James Foley et Steven Sotloff- et menacé un otage britannique du même sort.

Appel à des «décisions courageuses»

Ces décapitations montrées dans des vidéos ont soulevé l'indignation internationale, l'ONU affirmant que l'EI doit «être vaincu».

Le projet de coalition, salué par l'Irak, a commencé à s'esquisser vendredi en marge du sommet de l'OTAN au Royaume-Uni, où M. Obama s'est dit «confiant» que l'OTAN et ses partenaires «sont prêts à rejoindre une vaste coalition» pour éradiquer l'EI.

Selon eux, «pour être efficace», la coalition doit apporter un «soutien militaire» à l'Irak, «stopper le flux des combattants étrangers, contrer le financement de l'EI, et traiter la crise humanitaire» provoquée par la fuite de 1,8 million d'Irakiens. Mais sans troupes au sol.

Le secrétaire d'État John Kerry, attendu prochainement dans la région, s'est entretenu samedi avec le patron de la Ligue arabe Nabil Al-Arabi.

Ce dernier a appelé, lors d'une réunion ministérielle de l'organisation dimanche au Caire, les États arabes à faire face «militairement et politiquement» à l'EI. Il faut prendre «des décisions courageuses pour faire face à ce phénomène qui menace l'existence de certains États arabes».

De l'autre côté de la frontière, en Syrie, le régime a poursuivi ses frappes contre l'EI dans son bastion de Raqa (est), tuant 53 personnes dont 31 civils et 15 djihadistes, selon une ONG.

La question d'une éventuelle intervention étrangère contre l'EI en Syrie reste en suspens, les Occidentaux excluant pour le moment toute coopération avec le régime.