Le parquet sud-africain a décidé jeudi de faire appel de la condamnation à six ans de prison de l'ex-athlète Oscar Pistorius pour le meurtre de sa compagne, dénonçant une peine «scandaleusement trop clémente» puisque le meurtre est passible d'au moins 15 ans de prison dans le pays.

La condamnation à six ans de prison, prononcée le 6 juillet, est «disproportionnée par rapport au crime commis», a estimé le parquet pour justifier sa décision de faire appel.

Elle est «scandaleusement trop clémente et a par conséquent conduit à une injustice», a-t-il poursuivi. Elle «a le pouvoir de discréditer l'administration judiciaire», a encore regretté le parquet.

Dans la nuit du 13 au 14 février 2013, le sextuple champion paralympique, amputé des deux jambes, avait abattu, chez lui à Pretoria, sa petite amie Reeva Steenkamp qui était enfermée dans les toilettes. Il a toujours plaidé la méprise: il était convaincu, n'a-t-il cessé de répéter, qu'un cambrioleur s'était introduit dans sa maison de Pretoria.

Lors du rendu de son jugement le 6 juillet, la juge Thokozile Masipa avait estimé que «les circonstances atténuantes l'emportaient sur les facteurs aggravants» et justifiaient «de ne pas imposer la peine plancher de 15 ans pour meurtre».

Elle avait notamment énuméré la «vulnérabilité» d'Oscar Pistorius au moment du drame puisqu'il était sur ses moignons, ses tentatives vaines de ranimer sa compagne et de demander ensuite pardon à la famille Steenkamp.

«Il ne peut pas être en paix. J'estime qu'une longue peine de prison ne servira pas la justice», avait déclaré Thokozile Masipa.

Interrogé jeudi par l'AFP, Andrew Fawcett, un des avocats de l'ancien athlète, s'est refusé à faire le moindre commentaire sur l'appel du parquet, dernier développement dans une saga judiciaire, qui tient en haleine les médias internationaux.

La défense d'Oscar Pistorius avait exclu dès le 6 juillet de faire appel de la peine prononcée.

De leur côté, les parents de Reeva Steenkamp ont expliqué jeudi «toujours soutenir pleinement» le parquet «dans sa quête de justice» pour leur fille.

Éviter un précédent

«Nous espérons, a encore dit le parquet, que cet appel clarifiera davantage le principe des condamnations, en particulier pour les crimes pour lesquels des peines planchers sont fixées par la loi, en dépit du fait qu'un juge a toute discrétion de s'écarter de la peine minimale après voir pris en compte des circonstances atténuantes».

Selon le droit sud-africain, la justice doit désormais se prononcer sur la recevabilité de l'appel du parquet.

«Je pense que l'État a de bonnes chances de voir son appel accepté» dans la mesure où «tout le monde ou presque semble d'accord sur le fait que la juge Masipa s'est plus ou moins écartée de la peine minimale», a réagi à l'AFP un expert judiciaire, Llewellyn Curlewis.

«Même si elle avait toute discrétion pour s'en écarter plus ou moins, en prenant en compte des circonstances atténuantes, la question reste de savoir si elle avait suffisamment de preuve pour s'en écarter à ce point», a-t-il ajouté.

Pour éviter un précédent en la matière, la justice «pourrait être encline à considérer une nouvelle condamnation et par conséquent prononcer une peine plus sévère», a-t-il encore avancé.

En première instance, Oscar Pistorius avait écopé de cinq ans de prison pour l'«homicide involontaire» de sa petite amie, une peine déjà prononcée par la juge Masipa et qui avait été critiquée par les experts.

Mais en appel, il avait été reconnu coupable de meurtre, avant d'être condamné à six ans de prison.

Il purge actuellement sa peine dans la prison de Kgosi Mampuru à Pretoria, dans une cellule individuelle située dans l'aide médicalisée de l'établissement. Selon le droit sud-africain, il est éligible à la libération conditionnelle en 2019.

Oscar Pistorius, 29 ans, était entré dans la légende en s'alignant avec les valides aux 400 mètres des jeux Olympiques de Londres en 2012, une première pour un double amputé. Sa vie avait de nouveau basculé moins d'un an plus tard avec ce drame.