Oscar Pistorius est un hypersensible dominé par le sentiment de vulnérabilité causée par son handicap bien qu'il ait donné l'image d'un surhomme, a témoigné jeudi un de ses médecins lors d'une des dernières audiences de son procès pour meurtre.

Le médecin du sport Wayne Derman, qui suit le champion paralympique sud-africain depuis six ans, a souligné à la barre que Pistorius n'était pas le superhéros invincible des publicités, lorsqu'il a tiré sur son amie Reeva Steenkamp, le 14 février 2013.

«Bien qu'il déteste qu'on le plaigne, la dure vérité, c'est qu'il n'a pas de jambes!», a déclaré le Dr Derman, médecin-chef de l'équipe paralympique sud-africaine aux Jeux de Londres en 2012. «Le handicap ne dort jamais. Il est là quand vous dormez la nuit, il est là quand vous vous réveillez le matin, il affecte tous les aspects de la vie.»

«Vous avez le paradoxe d'une personne qui est suprêmement apte et en même temps une personne qui est significativement handicapée», a ajouté ce témoin, qui devrait être le dernier cité par la défense.

Pistorius, 27 ans, a une «double personnalité», et il y a «deux Oscars», a résumé l'avocat de la défense Kenny Oldwadge, lisant un extrait du rapport des psychiatres: il est un athlète de classe mondiale, mais aussi une personne très vulnérable à cause de son handicap.

Depuis le début du procès en mars, ses avocats ont cherché à peindre le portrait d'un homme obsédé par la sécurité après une enfance marquée par une mère alcoolique et hantée par le niveau très élevé de la criminalité en Afrique du Sud.

Ces facteurs, disent-ils, contribuent à expliquer sa réaction l'an dernier, quand il a cru à la présence d'un cambrioleur caché dans les toilettes, alerté par un bruit suspect, et a abattu par erreur son amie Reeva qui s'y trouvait.

Pour le Dr Derman, l'athlète, habitué aux coups de pistolet donnés au départ des courses, est conditionné à «réagir par stimulus auditif» et c'est cette hypersensibilité qui «a abouti à cette horrible tragédie».

Pistorius a tiré en entendant un bruit «pour nullifier la peur», a-t-il estimé.

«Pas même M. Pistorius n'a perçu que l'attaque d'un cambrioleur en pleine nuit était liée à son handicap», a ensuite rétorqué le procureur Nel, qui estime que Pistorius a abattu sciemment son amie, un mannequin de 29 ans, au cours d'une dispute.

Confronté à un vigoureux contre-interrogatoire, le médecin sportif s'est montré tour à tour indigné et pointilleux, refusant de répondre à certaines questions.

«Pouvez-vous donner à M. Nel une chance de progresser étape par étape?», a dû demander la juge Thokozile Masipa.

M. Nel n'a pas laissé passer l'occasion quand Wayne Derman n'a pas pu répondre aux questions sur la façon dont Pistorius s'est déplacé dans sa maison au moment du drame, disant qu'il courait alors, pris de peur.

«Partial, je pense que vous êtes partial», a-t-il lancé, en élevant la voix. «Pourquoi parlez-vous donc de peur quand nous parlons de courir ou marcher?»

Gerrie Nel doit achever lundi le contre-interrogatoire du témoin. Il a demandé que la Cour marque une pause vendredi, afin de pouvoir consulter Carla Kotze, la psychiatre qui représentait le Parquet au cours de l'examen auquel a été soumis l'accusé en juin. Il pourrait la faire venir à la barre le cas échéant.

Oscar Pistorius risque vingt-cinq ans de prison s'il est reconnu coupable.