L'opposant islamiste tunisien Ghannouchi devait rentrer dimanche midi dans son pays depuis Londres après plus de 20 ans d'exil, grâce à la chute du président Zine El Abidine Ben Ali qui avait maté durement les islamistes au début des années 90.

Un porte-parole du vieil opposant, âgé de 69 ans, a indiqué que ce retour, craint par certains secteurs de la société tunisienne, notamment les féministes et les milieux laïcs, ne sera pas «triomphal» et qu'au contraire Rached Ghannouchi, qui veut passer la main à des jeunes à la tête du mouvement, veut simplement revenir comme «un homme libre».

Lors d'une manifestation, des centaines de femmes ont crié samedi à Tunis leur détermination à défendre l'émancipation acquise depuis plus d'un demi-siècle, juste à la veille du retour de Rached Ghannouchi.

«Nous sommes là pour affirmer les droits acquis de la femme et éviter tout retour en arrière, pour dire que nous ne sommes pas prêtes à négocier notre liberté avec les islamistes», a affirmé Amel Betaib, une avocate.

Rached Ghannouchi avait fondé en 1981 Ennahda (Renaissance), avec des intellectuels inspirés par les Frères musulmans égyptiens, et dit aujourd'hui représenter un islam modéré proche de l'AKP turc.

Toléré, y compris à l'arrivée au pouvoir de Ben Ali en 1987, le parti avait été réprimé après les élections de 1989, où la liste qu'il soutenait avait recueilli au moins 17% des suffrages.

M. Ghannouchi avait alors quitté la Tunisie pour l'Algérie, puis pour Londres. En 1992, il avait été condamné par contumace à la prison à perpétuité avec d'autres responsables religieux, pour un complot contre le président.

Le gouvernement tunisien de transition, mis en place après la chute de Ben Ali le 14 janvier, a adopté un projet de loi d'amnistie générale qui concernera aussi les islamistes, et doit être voté par le Parlement. Ce qui n'est pas encore fait mais ne devrait toutefois pas constituer un obstacle à son retour.

Ghannouchi, qui n'est plus président du mouvement islamiste, affirme par ailleurs qu'il ne sera pas candidat à la présidence aux prochaines élections et veut transformer son mouvement en parti politique legal pour participer aux prochaines législatives que l'équipe de transition au pouvoir depuis la chute de Ben Ali a pour tâche d'organiser.

Une loi toujours en vigueur interdit de former un parti politique sur une base strictement religieuse.