C'est Belhassen Trabelsi, souvent décrit comme le «parrain» de la belle-famille du président tunisien déchu, qui est arrivé la semaine dernière à Montréal avec sa famille, a appris La Presse. Et malgré le mécontentement que leur venue suscite à Ottawa, ils pourraient rester encore longtemps.

M. Trabelsi a atterri jeudi dernier à l'aéroport Trudeau à bord d'un jet privé en compagnie de sa femme, de ses quatre enfants et de leur gardienne. Ils auraient d'abord séjourné dans un hôtel de l'ouest de Montréal. On ignore s'ils s'y trouvent toujours.

Belhassen Trabelsi, frère aîné de la femme de l'ancien président Zine el-Abidine Ben Ali, est considéré comme le pivot des affaires de la famille et a été mêlé à plusieurs histoires de corruption dans son pays.

«La famille élargie du président Ben Ali est fréquemment présentée comme le carrefour de la corruption en Tunisie. Souvent qualifiée de quasi-mafia, une vague allusion à la Famille suffit à indiquer de laquelle vous voulez parler», précise un câble provenant de l'ambassade des États-Unis à Tunis daté de 2008.

«Le frère de Leila (Ben Ali), Belhassen Trabelsi, est le membre le plus connu de la famille et passe pour avoir trempé dans un grand nombre d'affaires de corruption», ajoute la note diplomatique rendue publique par WikiLeaks.

Révoquer la résidence

Trabelsi détient le statut de résident permanent au Canada; c'est pourquoi il a pu entrer au pays. Or, le gouvernement fédéral a déclaré depuis son arrivée que ni lui ni les autres membres corrompus du régime Ben Ali ne sont les bienvenus au Canada.

Le ministère de l'Immigration étudie donc la possibilité de révoquer son statut de résident permanent, dernière étape avant l'accession à la citoyenneté. Il pourrait y arriver notamment si Trabelsi l'a obtenu grâce à des déclarations mensongères ou s'il n'a pas séjourné au pays assez longtemps au cours des dernières années.

Hier, La Presse a révélé que le gouvernement fédéral envisage aussi de geler les actifs de l'ex-président et de ses proches. Selon une dépêche de La Presse Canadienne que le ministère des Affaires étrangères n'a pas voulu confirmer hier, il n'attendrait qu'une requête de la Tunisie avant de mettre le processus en branle.

Un gendre de Zine el-Abidine Ben Ali aurait acheté à Westmount, en 2008, une maison qu'il aurait payée plus de 2,5 millions de dollars.

Les démarches entreprises par le Canada, quelles qu'elles soient, pourraient s'étirer sur des années. Si son statut de résident permanent était révoqué, par exemple, le beau-frère du dictateur pourrait demander celui de réfugié, en plus de contester la révocation devant les tribunaux.

Des groupes maghrébins du Québec ont mandaté un avocat pour faire pression sur le ministère fédéral de l'Immigration afin qu'il agisse tout de même.

La semaine dernière, le gouvernement provisoire de la Tunisie a annoncé qu'il ouvrait une enquête dans l'espoir de faire la lumière sur «l'acquisition illégale de biens» et sur des «placements financiers illicites à l'étranger».

La fortune du président déchu et de ses proches est évaluée à 5 milliards de dollars. À ce jour, une trentaine d'entre eux ont été arrêtés.

- Avec la collaboration de Catherine Handfield