La «révolution du jasmin», qui a entraîné vendredi la chute du président tunisien Zine el-Abidine Ben Ali, a des répercussions jusqu'en France.

La ministre des Affaires étrangères, Michèle Alliot-Marie, est prise à partie depuis plusieurs jours par l'opposition, qui lui reproche d'avoir, la semaine dernière, proposé au régime maghrébin le «savoir-faire» sécuritaire hexagonal alors même que des manifestants tombaient sous les balles.

La dirigeante du Parti socialiste, Martine Aubry, a indiqué que la ministre avait commis une faute «grave» en faisant cette «hallucinante déclaration» et qu'elle devrait «en tirer les conséquences».

Un député communiste a pressé pour sa part la ministre des Affaires étrangères de démissionner, jugeant que sa proposition de coopération sécuritaire constituait «une honte».

Mme Alliot-Marie a indiqué hier à la commission des Affaires étrangères, qui lui demandait de s'expliquer, qu'elle avait été mal citée. «Il est évidemment inenvisageable que la France prête un concours direct aux forces de l'ordre d'un autre pays», a-t-elle assuré.

Timides mea-culpa

Lundi, l'Élysée a semblé se distancer de la ministre en relevant qu'elle s'était exprimée la semaine dernière «à partir d'une analyse qui était la sienne». Le conseiller spécial du président, Henri Guaino, a reconnu à cette occasion qu'il avait pu y avoir des «maladresses» dans la position de la France au cours de la dernière semaine. Ce n'est qu'une fois Ben Ali parti que la présidence a fait connaître son «soutien déterminé» à la volonté de démocratisation du peuple tunisien.

Ces timides mea-culpa n'ont guère satisfait les médias français proches de l'opposition, qui multiplient les critiques. Le quotidien L'Humanité a souligné hier en éditorial: «Les Tunisiens ne sont pas près d'oublier l'attitude cynique des dirigeants français, qu'aucune excuse ne pourra jamais pardonner aux yeux de l'Histoire.»

Sur l'internet, où la mobilisation contre Ben Ali était importante, les commentaires contre l'attitude de la France continuent de fuser. Sur Facebook, un «mur de la honte» recense les déclarations d'appui au régime tunisien faites au fil des ans par plusieurs politiciens français de droite et de gauche. On y rappelle notamment que l'actuelle ministre des Affaires étrangères avait passé ses vacances d'été en Tunisie en 2009 sans rien dire du régime.

«Je vais offrir un vélo, rouge et blanc, aux couleurs de la Tunisie, avec rétropédalage à Michèle Alliot-Marie», a ironisé hier un usager de Twitter pour se moquer du changement de ton de la politicienne.