Le président américain Donald Trump a salué mardi les signes d'ouverture de la Corée du Nord sur un éventuel dialogue avec les États-Unis tout en appelant à la prudence dans l'attente d'avancées concrètes.

Les dirigeants des deux Corées se retrouveront fin avril pour un sommet historique dans la Zone démilitarisée (DMZ), selon Séoul qui a assuré que Pyongyang était prêt à aborder avec Washington la question longtemps absolument taboue de la dénucléarisation.

Interrogé sur ce rebondissement spectaculaire après des mois d'escalade verbale faisant redouter un affrontement armé, le locataire de la Maison-Blanche a jugé que les déclarations venues du Sud comme du Nord étaient «très positives».

«Ce serait bien pour le monde, bien pour la Corée du Nord, bien pour la péninsule, mais nous verrons ce qui va se passer», a-t-il ajouté, jugeant «sincère» l'offre de dialogue formulée par Pyongyang. À qui faut-il attribuer cette évolution? «Moi!», a-t-il répondu en conférence de presse dans un sourire.

La présidence sud-coréenne a indiqué que Pyongyang, visé par une série de sanctions imposées au fil des ans par le Conseil de sécurité des Nations unies, était prêt à un «dialogue franc» avec les États-Unis pour évoquer la dénucléarisation. Elle a précisé que le régime suspendrait tout essai nucléaire ou de missile pendant la durée des discussions.

Au vu des derniers développements, Donald Trump serait-il prêt à parler directement avec Kim Jong-un, un homme qu'il a par le passé qualifié de «fou»? «Nous verrons», a-t-il simplement répondu, reprenant l'une de ses formules préférées en matière diplomatique.

«Respirer un grand coup» 

Mais l'exécutif américain a insisté tout au long de la journée sur sa défiance vis-à-vis d'un régime qui, depuis des décennies, «ne tient pas ses promesses».

«Tout le monde doit respirer un grand coup», résumait un haut responsable de la Maison-Blanche sous couvert d'anonymat. «Nous sommes ouverts. Nous sommes impatients d'avoir des précisions. Mais les Nord-coréens ont nourri notre scepticisme, donc nous sommes un peu prudents dans notre optimisme».

Selon le conseiller du président Moon Jae-in, Chung Eui-yong, qui s'est longuement entretenu lundi avec Kim Jong-un, ce dernier est désormais prêt à bouger sur ce dossier sensible «si les menaces militaires contre le Nord disparaissent et si la sécurité de son régime est garantie».

Cette formulation laisse cependant en suspend de nombreuses questions: depuis la fin de la guerre de Corée en 1953, la Corée du Nord s'est toujours estimée menacée d'invasion militaire américaine, ce qui justifie à ses yeux l'existence de son programme nucléaire.

Le sommet intercoréen aura lieu fin avril dans le village de Panmunjom, au milieu de la Zone démilitarisée (DMZ) qui sépare le Nord du Sud.

Si cette annonce est confirmée par le Nord, il s'agira du troisième sommet entre les deux pays. Les deux précédents avaient eu lieu en 2000 et 2007.

La rencontre sera précédée d'une conversation téléphonique entre Kim Jong-un et Moon Jae-in, qui vont par ailleurs ouvrir une ligne de communication d'urgence «pour désamorcer les tensions militaires et se coordonner étroitement».

«Pour la première fois depuis des années, un effort sérieux est fait par toutes les parties concernées. Le monde regarde et attend!», avait lancé Donald Trump dans tweet matinal, avant que son vice-président Mike Pence, sur une tonalité plus prudente, ne réclame des avancées «crédibles, vérifiables et concrètes» sur la dénucléarisation.

Preuve de la volonté des États-Unis de continuer à mettre une «pression maximale» sur Pyongyang, un responsable américain a précisé que les exercices annuels militaires conjoints que Séoul et Washington avaient reporté jusqu'à la fin des Jeux paralympiques reprendraient comme prévu à l'issue de ces derniers.

Le chef des services de renseignement américain, Dan Coats, s'est par d'ailleurs dit «sceptique» sur les offres de dialogue de Pyongyang, tout en ne fermant pas complètement la porte. «C'est peut-être une avancée. J'en doute fortement. Comme je l'ai dit, il y a toujours un espoir», a-t-il lancé lors d'une audition devant la commission des Armées du Sénat.

Kim Jong-un enjoué

Lundi, les discussions entre M. Kim et les émissaires sud-coréens ont duré plus de quatre heures. Le Rodong Sinmun, organe du Parti des travailleurs, consacrait mardi toute sa «Une» à la visite, sous le titre: «Le Camarade Kim Jong-un reçoit les envoyés spéciaux du président du Sud».

La photo principale montre le leader nord-coréen avec les cinq responsables sud-coréens de la délégation. Certains clichés montrent un Kim Jong-un particulièrement enjoué. Sa soeur, Kim Yo-jong, apparaît sur plusieurs images.

Le point d'orgue de l'offensive de charme nord-coréenne lors des JO avait été la venue au Sud de Kim Yo-jong, la première visite d'un membre de la dynastie régnante de Pyongyang depuis la fin de la guerre.

Signe du difficile équilibre à trouver, M. Moon a souligné mardi qu'il fallait discuter avec le Nord, mais aussi renforcer l'alliance avec Washington.

«Nous devons parler avec le Nord de la dénucléarisation de la péninsule coréenne», a-t-il dit. «Mais en même temps, nous devons mettre notre énergie dans le développement efficace de nos capacités pour contrer les menaces nucléaires et balistiques du Nord», a-t-il jugé.

Les émissaires sud-coréens sont censés partir mercredi pour Washington afin de rendre compte de ce voyage.

Pékin appelle les deux Corées à «saisir» leur chance 

La Chine a appelé les deux Corées à «saisir la chance» de dénucléariser la péninsule, après l'annonce d'un prochain sommet entre les dirigeants des deux pays.

Dans un communiqué, le ministère chinois des Affaires étrangères a salué mardi soir «l'issue positive» de la rencontre entre le dirigeant nord-coréen Kim Jong Un et une délégation sud-coréenne à Pyongyang.

«Nous espérons que la Corée du Nord et la Corée du Sud mettront en oeuvre sincèrement ce consensus et poursuivront leurs efforts visant à progresser vers la réconciliation et la coopération», a déclaré le porte-parole chinois, Geng Shuang.

«La Chine est prête à continuer à jouer son rôle à cette fin», a-t-il assuré.

Avant l'annonce de Séoul, M. Geng avait déclaré mardi que le rapprochement entre les deux Corées «devrait être étendu» afin d'inclure les États-Unis.