La Corée du Nord a tiré coup sur coup mercredi deux puissants missiles à moyenne portée qui semblent avoir volé sur des distances nettement plus importantes que lors de précédents lancements infructueux, d'après le ministère sud-coréen de la Défense.

Les engins seraient des missiles Musudan à portée intermédiaire susceptibles, en théorie, de menacer les bases américaines de l'île de Guam, dans le Pacifique.

Les condamnations internationales n'ont pas tardé, Washington, l'OTAN comme Tokyo parlant de violations claires des résolutions de l'ONU, Séoul promettant de rechercher un durcissement des sanctions contre cet État doté de l'arme nucléaire.

Le Conseil de sécurité de l'ONU interdit à la Corée du Nord tout programme nucléaire et balistique.

Le premier engin a été tiré peu avant 6 h (heure locale) et a vraisemblablement volé sur 150 kilomètres au-dessus de la mer Orientale, également appelée mer du Japon.

Le second Musudan a atteint une altitude de 1000 mètres et parcouru 400 kilomètres de distance, selon des analystes militaires japonais.

Cette trajectoire aurait été calculée de façon à éviter toute violation de l'espace aérien japonais, d'après certains analystes.

Quatre Musudan tirés cette année ont explosé sur le pas de tir ou peu après leur lancement.

Des progrès inquiétants

Un tir réussi représenterait une avancée considérable pour les programmes militaires de la Corée du Nord, qui aspire à se doter d'une force de frappe nucléaire capable d'atteindre le continent américain.

Melissa Hanham, spécialiste des armes de destruction massive nord-coréennes à l'Institut Middlebury des études internationales de Californie, estime que ces deux tirs constituent un pas en avant inquiétant.

« Le second tir était vraisemblablement un succès. Les tests sont des répétitions et ils tirent les leçons de chaque vol », a-t-elle dit à l'AFP. « Les décideurs doivent se concentrer sur l'interdiction des essais pour empêcher que ce missile ne devienne opérationnel ».

Le porte-parole du département d'État américain John Kirby a déclaré que ces derniers tirs ne feraient qu'accélérer les efforts de la communauté internationale pour mettre en échec le programme d'armements illicite de Pyongyang.

« Nous avons l'intention de faire part de nos préoccupations à l'ONU afin de renforcer la détermination internationale pour que la Corée du Nord rende des comptes pour ces actions provocatrices », a-t-il dit.

Le premier ministre japonais Shinzo Abe a jugé que ce genre d'essais était « intolérable », selon la télévision NHK.

Le ministère sud-coréen des Affaires étrangères a prévenu Pyongyang qu'il risquait un alourdissement des sanctions, dénonçant « l'hypocrisie et le caractère trompeur » de la récente proposition nord-coréenne de dialogue avec Séoul.

La Chine, traditionnellement l'allié le plus proche de Pyongyang, a mis en garde contre « toute action qui pourrait déboucher sur une escalade des tensions », appelant à une reprise du dialogue sur le programme nucléaire nord-coréen.

Tensions

Le Musudan, qui aurait une portée de 2.500 à 4.000 kilomètres, pourrait atteindre la Corée du Sud et le Japon, mais également, dans l'hypothèse haute, l'île de Guam.

En avril, trois tirs ratés de ce missile dévoilé lors d'un défilé militaire à Pyongyang en 2010, avaient été perçus comme un revers avant un congrès historique du parti unique nord-coréen, censé célébrer les réussites du régime.

Un autre tir de Musudan en mai est également considéré comme un ratage.

Markus Schiller, un ingénieur allemand qui se penche depuis longtemps sur le programme balistique nord-coréen, a averti que les informations sur le Musudan étaient souvent spéculatives et qu'il ne fallait pas tirer de conclusions trop hâtives des derniers tirs.

« On n'en sait même pas si ce sont bien des missiles Musudan qui ont été lancés aujourd'hui », a-t-il dit, relevant que les missiles Rodong étaient capables de voler selon des trajectoires similaires.

Le climat s'est considérablement dégradé sur la péninsule depuis le quatrième essai nucléaire nord-coréen du 6 janvier, suivi le 7 février par le lancement d'une fusée, largement considéré comme un essai déguisé de missile longue portée.

Le conseil de sécurité de l'ONU avait réagi en adoptant les sanctions les plus lourdes jamais infligées à Pyongyang.

Ces derniers mois, le Nord a revendiqué toute une série d'avancées techniques vers ce qui semble être l'objectif ultime de son programme nucléaire : la mise au point d'un missile balistique intercontinental (ICBM) capable de véhiculer une tête nucléaire jusqu'au continent américain.