La Corée du Nord tient jeudi le monde en alerte avant un possible tir d'essai de missile en célébrant, en pleine tourmente sur la péninsule coréenne, ses dirigeants défunts ou vivants, hérauts de la croisade anti-américaine du régime communiste.

Les États-Unis et la Corée du Sud ont sommé la Corée du Nord d'arrêter de «jouer avec le feu» et de renoncer au tir de missile qu'elle semble vouloir effectuer au mépris des sanctions internationales et au risque d'embraser la péninsule.

Jeudi, les organes officiels de la propagande nord-coréenne ont toutefois observé une pause dans la litanie d'invectives et de menaces proférées quotidiennement depuis plusieurs semaines pour chanter les louanges du dirigeant Kim Jong-Un à l'occasion du premier anniversaire de son accession au pouvoir suprême.

Troisième Kim du nom depuis la fondation du régime en 1948 par son grand-père Il-sung, Jong-un, qui a succédé à son père Jong-Il à la mort de celui-ci en décembre 2011, a été nommé le 11 avril 2012 à la tête du parti du Travail, parti unique du pays auquel les 24 millions de Nord-Coréens doivent une allégeance absolue.

Le quotidien officiel du parti, le Rodong Shinmun, a exalté en Jong-Un «l'homme de conviction et de volonté numéro 1» le créditant du succès du lancement en décembre d'une fusée et de l'essai nucléaire de février.

«L'Histoire n'a jamais vu un leader socialiste comme lui», affirme le journal.

La Corée du Nord s'apprête par ailleurs à commémorer en grande pompe lundi le 101ème anniversaire de Kim Il-Sung, décédé en 1994, pour lequel des délégations étrangères ont commencé à affluer dans la capitale Pyongyang, assurent les médias officiels.

«La Corée du Nord joue avec le feu»

Depuis février 2012, la Corée du Nord a effectué deux tirs de fusée, considérés par les Occidentaux comme des essais déguisés de missiles balistiques, ainsi qu'un essai nucléaire qui lui a valu un nouveau train de sanctions à l'ONU. Pyongyang a également annoncé le redémarrage de ses activités nucléaires et positionné des missiles de moyenne portée sur sa côte est.

«Avec sa rhétorique belliqueuse, la Corée du Nord joue avec le feu et n'aide pas à désamorcer une situation instable», a déclaré mercredi le secrétaire américain à la Défense Chuck Hagel, selon qui les États-Unis sont «prêts à faire face à toute éventualité».

Ignorant les mises en garde de son voisin et allié chinois, Pyongyang a déployé sur sa côte orientale deux missiles Musudan, d'une portée théorique de 4000 kilomètres, soit la capacité d'atteindre la Corée du Sud, le Japon et même l'île américaine de Guam, où des exercices d'urgence ont été menés jeudi dans la perspective d'une frappe nord-coréenne.

L'éventuel tir de missile pourrait survenir autour du 15 avril, ou coïncider avec la visite à Séoul prévue vendredi du secrétaire d'État américain John Kerry et du secrétaire général de l'OTAN Anders Fogh Rasmussen.

Selon une source gouvernementale sud-coréenne, Pyongyang pourrait tirer plusieurs projectiles, des mouvements de véhicules lanceurs transportant des Scud (d'une portée de quelques centaines de kilomètres) et des Rodong (d'une portée d'un peu plus de 1000 kilomètres) ayant en effet été détectés.

La Corée du Nord a déplacé ses missiles à maintes reprises ces derniers jours, dans le dessein de compliquer la tâche des services de renseignement étrangers et de «fatiguer» les agents chargés de la surveillance des rampes, a rapporté jeudi l'agence de presse sud-coréenne Yonhap.

Une ou deux rampes de lancement du Musudan est orientée vers le ciel, ont indiqué jeudi des médias japonais citant un responsable du ministère nippon de la Défense, mais il pourrait là encore s'agir d'un leurre.

Visiblement agacée par la réaction d'une partie de la communauté internationale qui a qualifié ses menaces de pure gesticulation, la Corée du Nord a surenchéri mardi en parlant à nouveau d'une guerre «thermonucléaire» et en conseillant aux étrangers présents en Corée du Sud de quitter ce pays.

Elle avait déjà averti les pays étrangers possédant une mission diplomatique à Pyongyang qu'elle ne serait plus en mesure de garantir leur sécurité à compter du 10 avril en cas de conflit.

Mais l'Union européenne a prévenu mercredi qu'elle n'envisageait pas à ce stade d'évacuer ses missions diplomatiques ni à Pyongyang, ni à Séoul.

Dans ce contexte de fortes tensions, Pyongyang a retiré les 53 000 employés nord-coréens travaillant dans le centre industriel inter-coréen de Kaesong, situé sur son sol, dont l'accès était déjà interdit depuis le 3 avril aux travailleurs sud-coréens.