L'étau se resserre sur le maire de Moscou Iouri Loujkov, un des derniers poids lourds de la scène politique russe, critiqué par le Kremlin pour sa gestion de la situation dans la capitale, dont les 10 millions d'habitants suffoquaient ces derniers jours dans la fumée et la canicule.

Le premier ministre russe Vladimir Poutine a convoqué mardi Iouri Loujkov, et le Kremlin a critiqué son retour tardif de vacances une dizaine de jours après le début d'incendies autour de la capitale.

«C'est bien que Iouri Mikhaïlovitch (Loujkov) soit rentré et ait repris ses fonctions, mais c'est dommage qu'il ne l'ait pas fait plus tôt», a déclaré une source du Kremlin citée par les agences russes.

«Vous avez bien fait d'être rentré de vacances, vous l'avez fait à temps», a déclaré aussi un Vladimir Poutine très froid, assis en face de M. Loujkov, 73 ans, selon les images de la télévision publique.

Le maire, très bronzé sur les images de la télévision russe, avait été vertement critiqué par les médias pour son absence.

Abeilles évacuées

Le quotidien populaire Tvoï Dien a même affirmé mardi que ce personnage haut en couleurs, dont le goût pour l'apiculture est connu, avait fait évacuer ses abeilles en raison de la chaleur vers une région de lacs, alors que Moscou battait «un record de mortalité».

Un responsable de la mairie de Moscou a indiqué lundi que la mortalité à Moscou avait doublé ces derniers temps et que les morgues étaient pleines. Des médias ont affirmé que les services de secours médicaux étaient proches de la saturation.

Maire de Moscou depuis près de 20 ans, Iouri Loujkov est sous une pression croissante alors que le Kremlin a entrepris de remplacer les gouverneurs les plus influents.

«Loujkov est affaibli et ses jours sont comptés. La question maintenant, ce sont les conditions dans lesquelles il quittera son poste, les siennes ou celles du Kremlin», a commenté mardi Nikolaï Petrov, du centre Carnegie à Moscou.

Autre signe des attentions suscitées par le maire de Moscou, un responsable du Parquet, dans un entretien diffusé mardi par l'agence Interfax, a accusé ses services d'avoir violé les procédures et de porter la responsabilité du chaos créé en juin par des travaux sur la route de l'aéroport de Cheremetievo.

Vladimir Poutine était personnellement intervenu pour débloquer la situation, la mairie de Moscou ayant été accusée d'avoir organisé à dessein ce chaos pour favoriser un autre aéroport.

Selon M. Petrov, le maire de Moscou «se prépare depuis des années à sa démission et sa femme Elena Batourina a arrêté nombre de projets dans la capitale ou les a déplacés dans d'autres régions», rappelle-t-il.

L'épouse du maire, de 27 ans sa cadette, est la femme la plus riche de Russie, à la tête d'un empire très actif notamment dans le BTP dans la capitale russe.

Si Loujkov ne perd pas son poste dans les mois à venir, «il restera maire jusqu'à l'élection présidentielle» de 2012, nuance M. Petrov. L'analyste indépendant Dmitri Orechkine observe lui aussi que la marge de manoeuvre du maire de Moscou, jadis tout puissant, est désormais «limitée».

«Ce n'est qu'un début de campagne contre lui, mais il a des ressources pour riposter», poursuit-il.

Selon M. Orechkine l'attaque contre Loujkov a aussi pour but «de trouver un bouc émissaire» dans la crise des incendies qui met à mal la confiance des Russes dans leur gouvernement.