«La seule façon de me libérer de ma douleur, c'était d'être au milieu des miens aujourd'hui.»

Lorsque la terre a tremblé en Haïti le 12 janvier 2010, Claude Alcine a retenu son souffle. Comme tous les membres de la communauté haïtienne de Montréal, la grand-mère de 65 ans s'est plantée devant son téléviseur alors que les informations sur la tragédie entraient au compte-gouttes. Les jours ont passé et l'angoisse a laissé place à la tristesse.

Comme la majorité des membres de la diaspora, Claude Alcine a perdu des proches dans le séisme. Un an plus tard, la douleur est toujours vive. Pour commémorer le premier anniversaire du tremblement de terre, elle s'est rendue à La perle retrouvée, église du quartier Saint-Michel convertie en centre communautaire haïtien.

Quelques centaines de personnes se sont entassées dans la chapelle hier soir pour panser leurs plaies ensemble. À 16h53 - heure à laquelle le séisme a eu lieu un an plus tôt -, elles se sont recueillies en silence. Des poèmes et des chansons ont ensuite été interprétés à la mémoire des disparus. Ailleurs à Montréal, des cérémonies ont également été organisées à la Maison d'Haïti, dans le quartier Saint-Michel, ainsi qu'à la Maison culturelle et communautaire de Montréal-Nord.

«Un an après, c'est toujours très difficile, mais les Haïtiens, on se relève, même des coups les plus durs», a raconté Mme Alcine, qui a visité sa terre natale durant trois mois l'été dernier. «J'ai pleuré, j'ai braillé, j'ai hurlé. Mais il faut continuer. J'ai revu une amie là-bas qui a perdu son seul enfant, mais elle se relève et si elle peut se relever, comment perdre espoir?»

Plusieurs survivants du séisme ont aussi participé aux commémorations. La journée a été particulièrement insoutenable pour Yanique, 31 ans. La jeune femme a été jetée à la rue après le séisme et s'est réfugiée dans un camp de Port-au-Prince où, raconte-t-elle, elle a été agressée sexuellement à plusieurs reprises. Depuis le mois de mai, elle vit chez sa soeur à Montréal après avoir obtenu le statut de réfugié. Sa fille de 10 ans et son mari sont restés derrière. Ils vivent dans une tente, dans le camp de Delmas. Yanique doit accoucher dans un mois.

«Ça m'aide un peu d'être ici ce soir, mais sans ma fille et le père de mon bébé, il me manque une partie de moi», a-t-elle laissé tomber, les yeux pleins d'eau. «Je n'ai pas été capable de regarder la télévision aujourd'hui. Ça m'a rappelé trop de mauvais souvenirs. Ça m'a rappelé qu'il y a des images que je ne pourrai jamais éliminer de ma tête.»