Julian Assange et ses avocats ont repris mardi leur offensive contre la demande d'extradition formulée contre lui par la Suède, lors de la deuxième journée d'audience consacrée à cette affaire par la justice britannique qui devrait se prononcer dans les semaines à venir.

Après avoir démonté lundi point par point la requête du parquet suédois, la défense a fait citer mardi devant le tribunal de Belmarsh, à Londres, un ancien procureur, aujourd'hui chroniqueur judiciaire en Suède, qui s'est lui aussi interrogé sur les fondements de la demande de Stockholm.

La Suède réclame l'extradition d'Assange pour l'entendre, après la plainte de deux jeunes femmes qui l'accusent de les avoir forcées à avoir des relations sexuelles non protégées.

«Je ne comprends pas très bien pourquoi Julian Assange ne pourrait pas être entendu ici, si les autorités britanniques sont d'accord», a commenté Sven Erik Alhem, soulignant que son interrogatoire pouvait être mené par visio conférence. Il s'est également étonné que le nom d'Assange ait été divulgué alors qu'il n'est même pas inculpé.

Mardi, une juge suédoise à la retraite, également appelée à la rescousse par les avocats d'Assange, avait mis en cause à la barre la procureure suédoise, jugeant qu'elle avait «plutôt un parti-pris contre les hommes» dans les affaires d'agressions sexuelles.

Toute la stratégie des défenseurs d'Assange depuis 48 heures consiste à convaincre la justice britannique de l'illégalité de la demande d'extradition et de l'invalidité des accusations de viol.

L'Australien, âge de 39 ans, a toujours assuré que les jeunes femmes étaient consentantes. Et pour ses partisans, leurs accusations relèvent d'un complot pour museler le fondateur du site WikiLeaks, qui a mis nombre de gouvernements sous pression en publiant ces derniers mois des milliers de documents officiels confidentiels.

Lundi, ses avocats ont d'abord remis en question la qualification de viol, soulignant que «ce qui est considéré comme viol en Suède ne l'est pas dans les autres pays».

Il faudrait que le délit soit reconnu en Grande-Bretagne pour que la justice britannique puisse répondre favorablement à la demande d'extradition suédoise.

Il faut aussi que cette demande respecte la Convention des droits de l'Homme: les défenseurs d'Assange mettent donc en avant le «risque réel» qu'une fois extradé en Suède, l'Australien soit envoyé aux Etats-Unis pour être «interné sur la base de Guantanamo» voire «condamné à mort».

Ils plaident aussi que le mandat d'arrêt n'est pas recevable dans la mesure où leur client n'a pas été inculpé.

En prenant place mardi matin dans le prétoire, Assange, en costume bleu, chemise blanche et cravate rouge, a salué amicalement ses supporteurs massés dans la tribune réservée au public.

Le fondateur de WikiLeaks, qui en est à sa cinquième comparution depuis son arrestation en Grande-Bretagne début décembre, joue cette fois très gros, mais de multiples recours s'offrent encore à lui si le tribunal, qui devrait mettre son jugement en délibéré, venait à suivre le parquet suédois.

Un appel est en effet possible devant la Haute Cour dans un délai de sept jours. Un nouveau pourvoi est ensuite envisageable devant la Cour d'appel, dans un délai d'un mois, puis une ultime contestation devant la Cour suprême, dans le même délai.

La Cour suprême statue en dernier ressort au Royaume-Uni, mais il reste ensuite la Cour européenne des droits de l'Homme.

Assange pourrait bien ainsi rester encore plusieurs mois dans le manoir cossu prêté par un de ses amis dans la campagne anglaise, où il a été placé en résidence surveillée depuis la mi-décembre.