L'Allemagne et les États-Unis développent conjointement et secrètement, sous couvert d'activités commerciales, de nouveaux satellites espions malgré des objections françaises, selon des câbles diplomatiques obtenus par WikiLeaks et publiés lundi par le journal norvégien Aftenposten.

Le projet, baptisé HiROS, verrait la construction d'un nombre indéterminé de satellites d'observation de haute résolution capables de discerner des objets de 50 cm, d'envoyer leurs images sur Terre beaucoup plus rapidement que les satellites actuels ou encore de prendre des photos infrarouges la nuit.

Officiellement destiné à des fins environnementales civiles --70% de la capacité des satellites serait vendue à des acteurs privés--, le programme serait en fait «sous le contrôle complet» des services secrets allemands (BND) et de l'agence spatiale allemande (DLR) dépendant du ministère de la Recherche.

Un porte-parole de DLR a démenti que HiROS (High Resolution Optical Satellite System) soit un programme de satellites espions.

«Les finalités de HiROS (...) seraient la transmission de données pour les services publics, comme par exemple la gestion de crise lors de catastrophes naturelles», a affirmé Andreas Schütz dans un courrier électronique.

«HiROS n'est ni un satellite espion ni un projet secret», a-t-il dit.

Selon les notes de l'ambassade des États-Unis à Berlin citées par Aftenposten, qui couvrent la période février 2009-février 2010, certains pays, en premier lieu la France, ont tenté de faire capoter le projet par tous les moyens.

Mais l'opposition française aurait été balayée par les responsables allemands qui, toujours selon les notes, seraient excédés «d'être manipulés par la France» dont ils mettent en question les pratiques commerciales douteuses et la politique de subventions cachées.

«Absolument aucune coopération n'est prévue avec la France ou un quelconque autre État de l'UE pour le projet HiROS», aurait déclaré un responsable de DLR, Andreas Eckart, cité en norvégien.

Selon le journal, les satellites d'un coût total de 1,6 milliard de couronnes devraient entrer en exploitation en 2012-2013.

Officiellement, la France et l'Allemagne sont engagées dans le programme commun d'imagerie spatiale MUSIS (Multinational Space-based System) aux côtés de la Belgique, de l'Espagne, de la Grèce et de l'Italie.

La France devait essentiellement se charger de l'observation optique avec ses satellites Hélios alors que l'observation radar revenait à l'Allemagne avec son projet Sar-Lupe.

Les gouvernements français et allemand ont décliné tout commentaire, de même que l'ambassade des États-Unis à Oslo.

Journal de référence en Norvège, Aftenposten a obtenu par un moyen non connu en décembre la totalité des 250 000 documents diplomatiques de WikiLeaks, sans passer d'accord avec le site comme l'ont fait cinq grands journaux (New York Times, Guardian, Le Monde, El Pais et Der Spiegel).