La ville américaine de Ferguson a de nouveau vécu une nuit sous tension jeudi après des tirs contre des policiers, vivement condamnés par le président Barack Obama qui a dénoncé une «violence inacceptable» commise par des «criminels».

Dans la soirée, une centaine de jeunes manifestants s'étaient à nouveau rassemblés devant le poste de police de Ferguson, scandant des slogans et bloquant par moment la rue principale.

Plus tôt, une veillée aux chandelles de 45 minutes avait réuni une cinquantaine de personnes qui ont lancé un appel au calme, alors qu'une traque était toujours en cours pour retrouver le ou les tireurs ayant blessé deux policiers mercredi au moment où se dispersait une quarantaine de personnes, rassemblées devant le poste de police pour protester contre les comportements racistes des forces de l'ordre muncipales.

Jeudi, la municipalité de Ferguson avait annoncé que la police du comté de St. Louis et la police des routes du Missouri prenaient, à partir de 18 h (19 h à Montréal), «le commandement de la sécurité» dans la ville.

Ces deux corps de police avaient déjà relevé la police municipale, accusée de brutalité, après les émeutes qui avaient suivi le 9 août dernier la mort d'un jeune Noir non armé, Michael Brown, tué par un policier blanc.

«Rapport accablant»

Mercredi soir, quelque 150 personnes s'étaient déjà rassemblées devant le poste de police local de cette ville qui a connu de nombreuses émeutes depuis la mort du jeune Brown.

Elles entendaient saluer la démission quelques heures plus tôt de Thomas Jackson, le chef de la police de la ville accusée une semaine auparavant, dans un rapport accablant du ministère de la Justice, de pratiques racistes quasiment habituelles.

Lors de la dispersion de la manifestation, «trois ou quatre tirs» sont alors partis en direction des quelque 40 policiers encore stationnés, a raconté dans la matinée Jon Belmar, chef de la police du comté de St. Louis.

Deux policiers, âgés de 32 et 41 ans, ont été touchés au visage et à l'épaule, mais avaient pu jeudi quitter l'hôpital. L'un d'eux a toujours une balle logée derrière l'oreille, a toutefois précisé le responsable policier.

Le ou les auteurs des tirs étaient toujours recherchés vendredi.

En milieu de matinée jeudi, une équipe d'élite des Forces spéciales (SWAT) avait été filmée en train de perquisitionner une maison voisine du poste de police. Trois personnes ont été interpellées pour interrogatoire, mais n'ont pas été placées en détention, selon le journal St. Louis Post-Dispatch. Une récompense de 10 000 $ a été proposée pour toute information sur les tireurs.

«Construire la confiance»

La «violence contre la police est inacceptable», a réagi le président Obama sur le compte Twitter de la Maison-Blanche. Le «chemin de la justice est un de ceux sur lesquels nous devons marcher tous ensemble», a-t-il ajouté.

PHOTO KATE MUNSCH, REUTERS

Un policier du comté de St. Louis s'entretient, jeudi matin, avec un résidant de Ferguson dans le cadre de l'enquête visant à retrouver le ou les tireurs ayant fait feu sur ses collègues, mercredi soir. 

S'exprimant plus tard à la télévision, le président américain a réitéré que ces tirs étaient inexcusables, rappelant qu'ils étaient condamnés par ceux qui ont manifesté pacifiquement contre les mauvais traitements de la police.

«Ce sont des criminels. Il faut les arrêter», a dit le président américain.

Les parents de Michael Brown ont eux aussi condamné ces «tirs insensés», en dénonçant les actes «d'agitateurs isolés qui essayent de pervertir un mouvement pacifique et non violent».

Le ministre de la Justice, Eric Holder, a pour sa part condamné une «attaque lâche et répugnante» en évoquant un «voyou cherchant à semer la discorde».

«Ce qui s'est passé hier soir est de l'embuscade pure», a-t-il dit devant la presse en présentant un projet pilote de son ministère.

Le projet, «Construire la confiance et la justice», entend rétablir la confiance perdue entre les «communautés» et les représentants de l'État, mais surtout la police et la justice, mise à mal par de récents faits divers dans tout le pays.

Six villes pilotes ont été choisies - Birmingham (Alabama), Fort Worth (Texas), Gary (Indiana), Minneapolis (Minnesota), Pittsburgh (Pennsylvanie) et Stockton (Californie) - pour ce projet visant à «réduire la discrimination et rétablir la confiance entre police, justice et administrés là où elle s'est perdue», a ajouté le ministre.

Le ministère de la Justice avait publié mercredi dernier un rapport dévastateur montrant l'inégalité de traitement réservé par la police aux Noirs par rapport aux Blancs à Ferguson, ville à majorité noire, mais dont quasiment tous les responsables sont blancs.

Une série de cinq démissions en cascade, plus un licenciement, avait suivi dont celle du chef de la police de Ferguson.

PHOTO JIM YOUNG, REUTERS

Une veillée aux chandelles de 45 minutes avait réuni une cinquantaine de personnes qui ont lancé un appel au calme.

PHOTO JIM YOUNG, REUTERS

Dans la soirée, une centaine de jeunes manifestants s'étaient à nouveau rassemblés devant le poste de police de Ferguson, scandant des slogans et bloquant par moment la rue principale.