La tension était palpable samedi à Ferguson, dans le centre des États-Unis, avant la décision d'un grand jury sur l'opportunité de juger un policier blanc ayant tué un adolescent noir cet été, qui était attendue avant la fin du mois de novembre.

Le président Barack Obama a demandé vendredi aux habitants de «manifester pacifiquement».

Le gouverneur du Missouri a décrété lundi l'état d'urgence et activé la Garde nationale, et le FBI a renforcé ses équipes sur place avec une centaine d'agents supplémentaires.

Avec un objectif: éviter que les manifestations ne dégénèrent en émeutes comme ce plusieurs fois le cas en août après la mort de Michael Brown, 18 ans, tué en plein jour d'au moins six balles par Darren Wilson, 28 ans, alors qu'il n'était pas armé.

Le père du jeune homme, Michael Brown Sr, a distribué samedi matin plus de 60 dindes - dégustées traditionnellement pour Thanksgiving, jeudi prochain -et des boîtes de conserve dans le quartier où son fils a été tué le 9 août, pour tenter d'apaiser les tensions en amont de la décision.

Le grand jury n'avait toujours pas achevé ses travaux, et il ne devrait pas se réunir à nouveau avant lundi, selon la chaîne américaine CNN samedi, citant des responsables locaux et fédéraux non identifiés.

«Je voulais m'assurer que tout le monde passe un bon Thanksgiving», a déclaré à l'AFP Michael Brown Sr, vêtu d'un t-shirt à l'effigie de son fils accompagnée de la phrase «parti trop tôt». «C'est douloureux pour tout le monde, en particulier pour cette communauté».

Appels à la retenue 

Vendredi, il avait lancé un appel à la retenue dans un message vidéo sur internet.

«Blesser autrui ou détruire des biens n'est pas la solution», avait-il indiqué. «Peu importe ce que le grand jury va décider, je ne veux pas que la mort de mon fils soit vaine».

La mort du jeune homme avait déclenché plusieurs jours de manifestations parfois jalonnées de violences, sur fond de racisme dans cette bourgade où 67% de la population est noire mais où les édiles et les policiers sont quasiment tous blancs. Un couvre-feu avait même été imposé.

Quelques manifestants ont bravé le froid mordant vendredi soir dans cette ville de 21 000 habitants pour réclamer que Darren Wilson soit poursuivi en justice.

Aux États-Unis, un grand jury se réunit à huis clos pour déterminer s'il y a lieu ou non de poursuivre. Dans le cas présent, il peut inculper le policier qui pourrait par conséquent être jugé, ou décider qu'il n'y a pas lieu de le poursuivre.

La plupart des manifestants s'attendent à ce que le grand jury décide de ne pas le poursuivre.

Citoyens mécontents 

«Je suis ici pour la justice. Si nous n'obtenons pas justice, la paix sera impossible», a déclaré Ebony, manifestante de 22 ans. «Je veux voir Darren Wilson en prison».

Selon les médias, le policier a déclaré devant le grand jury avoir agi en légitime défense après une empoignade avec Michael Brown. Mais des témoins ont déclaré que le jeune homme avait les mains en l'air lorsqu'il a été tué.

Une vingtaine de minutes avant cette confrontation, il avait été filmé dans une supérette en train de voler une boîte de cigares.

«Ça ne va pas être joli joli s'il n'y a pas de poursuites. Il va y avoir de la violence, je pense», a estimé Jo Ann Davis, une fonctionnaire locale. «Je pense que ça va être pire qu'en août. Parce qu'il y a des cars entiers de gens qui sont venus ici de partout dans le monde juste pour manifester».

Le maire de Saint Louis, Francis Slay, a prévenu: «Si les manifestants ne sont pas violents, la police ne sera pas agressive».

La police locale a été vivement critiquée en août pour ses méthodes et l'utilisation d'équipements paramilitaires.

Aucune date précise n'a été fixée pour la décision du grand jury, mais le bureau du procureur du comté de Saint Louis a indiqué qu'elle interviendrait avant fin novembre.

Par précaution, plusieurs écoles ont décidé de fermer lundi et mardi avant le long week-end de Thanksgiving qui devait initialement commencer mercredi.

PHOTO JEWEL SAMAD, AFP