Les deux principaux candidats de la campagne présidentielle française avaient convié hier leurs partisans à se rassembler dans la capitale française pour montrer leur force à une semaine du premier tour du scrutin.

Des dizaines de milliers de militants ont convergé en après-midi vers l'esplanade du château de Vincennes, dans l'est de la ville, pour entendre le candidat socialiste François Hollande alors que les partisans du président Nicolas Sarkozy envahissaient la place de la Concorde, dans l'ouest.

Avant même que les deux hommes n'aient pris la parole, leurs organisateurs respectifs ont annoncé des foules supérieures à 100 000 personnes, un total impossible à vérifier faute de validation de la part des autorités.

D'emblée, les partisans socialistes, d'humeur festive, ont eu droit à une mise en garde de la part de leur héraut, donné largement favori pour remporter l'élection dans les plus récents sondages.

«Nous avons aussi à nous méfier de nous-mêmes, repousser l'anesthésiante euphorie : celle qui consiste à croire que nous avons gagné avant que le premier bulletin de vote n'ait été glissé dans l'urne», a lancé le politicien.

Il a accusé son principal adversaire de vouloir «faire peur» à la population en évoquant, par exemple, la possibilité d'attaques spéculatives dans le cas d'une victoire de la gauche.

«La droite n'a jamais fait autrement quand elle est menacée. Elle coalise les craintes, elle agite les spectres», a déclaré le candidat socialiste, qui a dû interrompre son discours à plusieurs reprises tandis que la foule criait «François président».

Tout en soulignant leur optimisme, les partisans rencontrés sur place ne manifestaient aucune certitude sur le résultat du scrutin présidentiel à venir.

«Ce serait génial qu'on gagne, mais ce n'est pas sûr, sûr. Ce serait catastrophique si on perdait parce que le pays va à la dérive», a déclaré Catherine Colo.

La femme de 65 ans ne veut rien entendre du président sortant, qui mène, tonne-t-elle, «une politique de merde». «Je lui reproche surtout d'être à la solde des banques et de favoriser les riches», a déclaré la militante, qui trouve le candidat socialiste «solide et loyal».

Elle dit espérer qu'il adoptera une fois au pouvoir un programme plus à gauche que celui qu'il met de l'avant dans ses discours.

«Si je votais avec mon coeur, je voterais pour Jean-Luc Mélenchon. Mais il existe une chose qui s'appelle le vote utile. Il y a trop de risque», souligne Mme Colo en évoquant le candidat du Front de gauche, qui récolte environ 15% des voix dans les sondages, loin derrière les deux favoris.

Richard Mollet, un partisan socialiste qui était venu assister au rassemblement avec son fils, juge que François Hollande n'a pas un «charisme extraordinaire».

«Mais je pense que c'est un homme estimable qui dit les choses vraies», a noté le Parisien de 49 ans, qui reproche à Nicolas Sarkozy de n'avoir pas incarné avec suffisamment de hauteur la fonction présidentielle.

Sada Anne, un immigrant d'origine mauritanienne arrivé en France en 2002, pense que le président va payer le prix dans les urnes des «promesses non respectées».

«Il joue trop avec le peuple. Il croit qu'il est plus intelligent que lui. C'est quelque chose qu'il ne faut pas faire», a déclaré l'homme de 36 ans, qui voit en François Hollande un politicien «honnête et digne de confiance».

Le candidat socialiste a appelé ses partisans à lui donner la «puissance» requise pour remporter la mise finale en votant socialiste dès le premier tour dans une allusion au Front de gauche.

Le camp du président sortant ne cesse de souligner les qualités politiques de Jean-Luc Mélenchon dans l'espoir de baisser le score socialiste au premier tour. François Hollande est crédité d'une avance variant entre six et douze points de pourcentage au second tour selon les sondages.

Nicolas Sarkozy, qui dit ne pas croire aux prévisions des sondeurs, a invité hier ses partisans à se mobiliser en masse pour remporter l'élection.

«Peuple de France, n'ayez pas peur, ils ne gagneront pas si vous décidez que vous voulez gagner», a-t-il déclaré en soulignant la portée «historique» du vote à venir.

La voie socialiste, a prévenu le chef de l'État, est basée sur des «solutions du passé» et contribuera à «ruiner les classes moyennes sans enrichir les plus pauvres». «L'autre voie,  c'est celle qui sera tournée vers l'avenir», a déclaré le politicien.