Le candidat républicain Joe Miller menait depuis des mois dans les sondages en Alaska. Cette semaine, sa candidature s'est effondrée: il est maintenant troisième. Que s'est-il passé?

Joe Miller semblait imbattable. Appuyé par le mouvement du Tea Party et par Sarah Palin, Miller incarnait le candidat républicain prometteur, un homme de principe qui allait faire cesser les dépenses à Washington.

«Il faut transférer les pouvoirs aux États, a-t-il dit récemment. Cela donnerait à l'Alaska l'occasion d'étendre son économie. Ce sont là des visées largement partagées. Ce n'est pas une position extrême.»

Cet automne, M. Miller a pris les devants contre le démocrate Scott McAdams et l'actuelle sénatrice de l'Alaska, Lisa Murkowski, vaincue par M. Miller à la primaire républicaine, et qui se présente comme candidate indépendante.

Or, un problème le suivait partout: M. Miller refusait de parler de son passé.

Depuis des mois, le candidat se battait pour garder confidentiel son dossier à la ville de Fairbanks, où il a travaillé comme avocat de 2002 à 2009.

Le 11 octobre, le politicien néophyte a perdu son sang-froid.

«Nous avons tracé une limite, a-t-il dit à des journalistes qui voulaient l'interviewer. Vous pouvez me poser des questions sur mon passé, sur des histoires personnelles. Je ne répondrai pas.»

Mercredi, un juge de la Cour supérieure de Fairbanks a ordonné la publication du dossier de M. Miller. Le document dépeint l'image d'un homme «paranoïaque, stressé et malhonnête», écrit l'Alaska Dispatch.

«J'ai menti»

En mars 2008, Miller a profité d'une pause-café de trois avocats de la Ville pour utiliser leurs ordinateurs portables afin d'appuyer sa propre candidature dans un sondage en ligne.

Miller a ensuite effacé la mémoire cache des appareils, faisant disparaître du même coup les mots de passe utilisés par les avocats lors de connexions à des sites de recherche en droit.

Confronté sur place, Miller a nié avoir utilisé les ordinateurs. Il a ensuite dit avoir utilisé les appareils pour consulter le site d'un professeur de l'Université de l'Alaska.

«Ses réponses nous semblaient bizarres, a écrit l'un des avocats. Il nous accusait de ne pas avoir respecté les politiques sur la sécurité informatique.»

Mis en congé administratif, Miller a finalement vidé son sac. «J'ai été bête. J'ai été stupide. J'ai menti au sujet des ordinateurs. C'était une erreur de jugement.»

Miller a démissionné en 2009, après avoir tenté sans succès de prendre un congé de maladie sans avoir consulté un médecin.

Plus tôt ce mois-ci, son ancien patron, Jim Whitaker, a pris publiquement la parole pour exprimer ses réserves au sujet de Miller.

«Il a un comportement de duplicité, un problème avec la vérité, et c'est très troublant».

Cette semaine, Miller a qualifié de «malavisée» sa réaction au sujet du dossier des ordinateurs. Il a blâmé ses conseillers politiques «naïfs» pour sa décision de ne pas avoir abordé la question plus tôt.

Candidate indépendante

Joe Miller a aussi été propulsé dans l'actualité nationale, la semaine dernière, quand ses gardes du corps ont menotté un journaliste de l'Alaska Dispatch qui cherchait à l'interroger. Les policiers ont libéré le journaliste, contre qui aucune accusation n'a été portée.

Les scandales répétés semblent avoir changé la course en Alaska. Un sondage Hays Research, publié hier, place désormais Joe Miller en troisième position, à 11 points dernière Mme Murkowski. Plus précisément, 60% des répondants ont une opinion «fortement négative» de Miller, comparativement à 38% il y a trois semaines.

Le groupe national Tea Party Express a dépensé 600 000$ pour faire mousser la candidature de Joe Miller contre celle de Lisa Murkowski, l'été dernier. Aujourd'hui, Mme Murkowski tente de garder son poste. En tant que candidate indépendante, son nom ne figure pas sur les bulletins de vote. Les électeurs qui voudront voter pour elle devront l'écrire. Sa victoire serait historique: aucun candidat write-in n'a été élu au Sénat depuis 1954.