Le pape Benoît XVI a été confronté d'emblée aux scandales de pédophilie jeudi en commençant une visite de quatre jours dans son Allemagne natale, où il est contesté.

«Je peux comprendre que devant de telles informations, surtout pour ceux qui sont proches des personnes touchées, quelqu'un dise: «ce n'est plus mon Église», a déclaré Benoît XVI, 84 ans, en répondant à des journalistes qui l'accompagnaient de Rome à Berlin.

Mais il a invité les fidèles à surmonter «ces terribles scandales» en demeurant à l'intérieur de l'Église, qui est bien plus qu'une «association sportive ou culturelle».

Faisant allusion à l'évangile de la pêche miraculeuse, le pape a déclaré que l'Église était «le «filet» du Seigneur dans lequel les poissons bons et mauvais sont tirés des eaux de la mort vers la terre de la vie».

Le président de l'association de victimes allemandes Eckiger Tisch, Matthias Katsch, a commenté: «Si on espère changer quelque chose, on doit rester. Mais quand on a perdu l'espoir, on doit partir pour montrer que l'Église est sur la mauvaise voie».

Des dizaines de milliers de catholiques, mais aussi des protestants, ont formellement demandé à être rayés des registres de ces Églises, secouées par des affaires de pédophilie.

Une rencontre entre Benoît XVI et des victimes était probable, selon le Vatican, comme ce fut le cas dans d'autres pays.

Peu chrétienne et traditionnellement contestataire, la capitale allemande devait être l'étape la plus délicate du voyage. Environ 6000 policiers étaient mobilisés.

«C'est normal dans une société libre marquée par une forte sécularisation (...) Je respecte ceux qui s'expriment», a déclaré le pape dans son avion.

Mais seuls quelques milliers de manifestants ont manifesté à l'appel d'un collectif hétéroclite d'associations d'homosexuels et de victimes de pédophilie alors que le pape prononçait un discours au Bundestag, chambre basse du Parlement, loin des 20 000 personnes espérées.

Une centaine d'élus, sur les 620 que compte le Bundestag, ont boycotté cette première intervention de Benoît XVI devant un Parlement, estimant notamment que la Constitution prévoyait une séparation claire entre l'Église et l'État.

Pendant cette intervention philosophique d'une vingtaine de minutes, qui fut longuement applaudie, le pape a mis en garde contre les lois contraires à la liberté et à la dignité humaines.

Alors que certains élus Verts ont refusé d'écouter son discours, il a également salué l'aspiration à «l'air frais» que constitue le mouvement écologiste, parvenant même par deux fois à faire rire l'assemblée.

Rencontrant ensuite la communauté juive, il a assuré que la voie vers des relations d'amitié entre catholiques et juifs était «irrévocable» et devait être celle de «l'Église tout entière», un message direct aux intégristes qui refusent ce rapprochement.

Auparavant, le pape avait affirmé qu'il n'était «pas venu ici avant tout pour poursuivre des intérêts politiques ou économiques déterminés (...) mais pour rencontrer les personnes et parler de Dieu» face à une «indifférence croissante dans la société».

Les sondages montrent qu'une grande majorité d'Allemands est indifférente à cette visite.

Dans cette journée marathon, Benoît XVI, reçu d'abord par le président Christian Wulff, a ensuite rencontré la chancelière Angela Merkel, protestante, fille de pasteur et divorcée, avec laquelle il a évoqué la crise de l'euro.

En début de soirée, il célébrait une messe pour 70 000 fidèles dans le Stade olympique de Berlin, symbole nazi pendant les JO de 1936.

Vendredi, Benoît XVI sera à Erfurt (Thuringe, centre) pour une journée sous le signe de l'oecuménisme. Samedi et dimanche, il se rendra à Fribourg (Bade-Wurtemberg, sud-ouest) pour rencontrer l'Église catholique allemande sans sa diversité.