Des déclarations controversées du président russe Vladimir Poutine et du chef d'État ougandais Yoweri Museveni sont venues rappeler hier, si besoin était, que les homosexuels de plusieurs dizaines de pays demeurent dans la ligne de mire des autorités en raison de leur orientation sexuelle.

Russie

À Moscou, l'homme fort du Kremlin a profité d'une rencontre avec des bénévoles qui accueilleront les athlètes lors des Jeux olympiques de Sotchi pour revenir sur une loi controversée pénalisant la «propagande homosexuelle» devant mineurs. Il a assuré que les personnes s'adonnant à des «formes non traditionnelles de relations sexuelles» ne risquaient pas d'être appréhendées. «Vous pouvez être tranquilles et détendus, mais laissez les enfants tranquilles», a ajouté le président en insistant sur le fait que la «pédophilie» est interdite dans le pays. L'adoption de la loi en juin dernier a soulevé un tollé à l'échelle internationale et entraîné de multiples appels au boycottage de l'événement sportif. Des hauts dirigeants politiques ont annoncé qu'ils ne seraient pas présents aux cérémonies officielles.

Ouganda

En Ouganda, le président en exercice a semblé vouloir freiner la persécution des homosexuels cette semaine en refusant d'avaliser une loi visant à durcir les mesures pénales existantes. La loi en question, votée par une large majorité de députés en décembre, prévoyait une peine de prison à vie pour les récidivistes. Le dirigeant ougandais a souligné dans une lettre aux élus dévoilée par un quotidien du pays qu'il voyait l'homosexualité non pas comme une «orientation sexuelle alternative» mais plutôt comme une «anomalie» de la nature. «La question au coeur du débat sur l'homosexualité est de savoir ce que l'on fait avec une personne anormale. Est-ce qu'on la tue? Est-ce qu'on l'emprisonne? Ou est-ce qu'on la contrôle?», a-t-il écrit selon le Daily Monitor. Le dirigeant africain a affirmé que certaines personnes devenaient homosexuelles pour des raisons pécuniaires et que les lesbiennes étaient victimes d'un manque de relations sexuelles avec les hommes.

Nigeria

Le Nigeria, un pays fortement religieux comptant 170 millions d'habitants, s'est aussi attiré les critiques de la communauté internationale cette semaine en adoptant une loi très répressive pour les homosexuels. Le texte, largement soutenu par la population, prévoit notamment une peine de 10 ans d'emprisonnement pour les personnes de même sexe qui affichent ouvertement leur relation. Les personnes chapeautant des bars ou des organisations pour homosexuels s'exposent à une sanction similaire. Le porte-parole du président Goodluck Jonathan a indiqué qu'il avait donné son aval à l'initiative parce qu'elle correspond aux «croyances culturelles et religieuses» des Nigérians. Le secrétaire d'État américain John Kerry a affirmé pour sa part que la loi restreignait «dangereusement» la liberté d'expression et d'association de la population. Plusieurs personnes ont été arrêtées dans les jours suivant l'entrée en vigueur de la loi. Selon l'Agence France-Presse, un jeune homme de 20 ans accusé d'avoir eu des relations homosexuelles a reçu une vingtaine de coups de fouet devant une foule dans le nord du pays.

Ailleurs dans le monde

L'Ouganda et le Nigeria sont loin de faire figure d'exceptions en Afrique puisque les relations homosexuelles sont encore considérées comme illégales dans 38 des 54 États du continent, selon Amnistie internationale. Dans un rapport paru l'été dernier, l'organisation relève que l'existence de ces lois et leur application «violent toute une série de normes régionales et internationales en matière de droits de la personne...». Bien que la région soit souvent montrée du doigt, elle n'est pas la seule à faire preuve d'intolérance. Le Parlement européen a adopté cette semaine une résolution déplorant le fait que 78 pays dans le monde «considèrent toujours les activités consenties entre adultes de même sexe comme un délit» et qu'une demi-douzaine de ces États maintient la peine de mort comme sanction possible. Cette répression a notamment pour effet de freiner la lutte contre le sida puisque les personnes des communautés ciblées craignent d'être dénoncées si elles interagissent avec des professionnels du monde de la santé, ont relevé les élus.