Trois mois et demi après le massacre des 20 petits écoliers de Newtown, le Connecticut, théâtre de la tragédie, est devenu jeudi le troisième État américain à durcir considérablement ses lois sur les armes à feu, alors que le débat s'enlise au Congrès à Washington.

Dan Malloy, le gouverneur démocrate de ce petit État du nord-est du pays encore profondément traumatisé par le drame, a signé en milieu de journée un projet de loi de 139 pages, adopté tard mercredi par le Sénat et la Chambre du Connecticut, après de longues heures de discussions passionnées, mais qui ont su éviter les divisions partisanes.

La nouvelle loi, négociée pendant des semaines entre démocrates et républicains, rend obligatoire la vérification des antécédents de tous les acheteurs d'armes à feu, qu'il s'agisse de ventes privées ou publiques.

Plus de 160 armes d'assaut sont désormais interdites, contre 66 précédemment. Il faudra avoir 21 ans (et non plus 18) pour acheter une arme semi-automatique. L'achat et la revente de chargeurs de grande capacité (plus de dix balles) sont également interdits. Ceux qui en possèdent n'auront pas à s'en débarrasser, mais devront être enregistrés.

La nouvelle loi avait été vivement dénoncée mercredi par des centaines de manifestants rassemblés près du Capitole du Connecticut, y voyant une atteinte à leurs droits constitutionnels. Certains s'étaient d'ailleurs précipités ces derniers jours chez les armuriers pour acheter ce qui ne sera plus autorisé.

La loi prévoit aussi la création d'un fichier des personnes condamnées pour des actes impliquant des armes, une première aux États-Unis.

Après l'État de New York (nord-est) en janvier et le Colorado (ouest) en mars, le Connecticut devient ainsi le troisième État américain à durcir sa législation. Le Maryland (est), où un projet de loi est dans sa phase finale de discussion, devrait lui emboîter le pas.

Forte résistance au Congrès

M. Malloy était jeudi entouré de parents ayant perdu un enfant le 14 décembre à Newtown, quand Adam Lanza, un jeune déséquilibré de 20 ans, a ouvert le feu avec un fusil d'assaut dans deux classes de CP de l'école de Sandy Hook, tuant en moins de cinq minutes 20 petits élèves et six femmes de l'encadrement.

Et il a exprimé l'espoir que le Connecticut serve d'exemple au pays pour la façon dont démocrates et républicains ont su dépasser leurs divisions.

«Il n'y a pas d'excuses pour les représentants (à la Chambre) ou les sénateurs qui ne viennent pas à l'aide de ceux qu'ils représentent», a-t-il déclaré.

Mais en dépit des efforts du président Barack Obama, contrés par la National Rifle Association (NRA), le puissant lobby des armes aux États-Unis, tout espoir de voir le Congrès renforcer de manière significative la législation sur les armes au niveau national a disparu.

L'interdiction des armes d'assaut, en vigueur de 1994 à 2004, ne sera notamment pas renouvelée.

Et les autres réformes que le président a appelé de ses voeux --interdiction des chargeurs de grande capacité, contrôle systématique des antécédents au niveau fédéral-- se sont heurtées à une forte résistance du Congrès, y compris chez certains alliés démocrates.

Quelque 91% des Américains sont pourtant favorables à la vérification des antécédents de tous les acheteurs d'armes, selon un sondage Quinnipiac publié jeudi.

Mais depuis trois mois, «l'effet Newtown» s'est estompé, et la proportion d'Américains favorables à des restrictions supplémentaires sur les armes est tombée à 47%, contre 57% immédiatement après la tuerie, selon un sondage CBS.

Les armes à feu tuent chaque année près de 30 000 personnes aux États-Unis.