Les forces du régime ont marqué jeudi un point décisif dans la ville clé d'Alep, en bloquant l'une des principales routes d'approvisionnement des rebelles, à deux semaines de la réélection attendue de Bachar al-Assad à la tête de l'État syrien.

Signe des divergences profondes et persistantes au sein de la communauté internationale sur le régime syrien, la Russie et la Chine ont mis leur veto à un projet de résolution français à l'ONU qui prévoyait de saisir la Cour pénale internationale (CPI) des crimes commis en Syrie par les deux camps.

L'armée syrienne, épaulée par les supplétifs des Forces de défense nationale (FDN), par le mouvement chiite libanais Hezbollah et des combattants arabes, a réussi à briser le siège imposé depuis plus d'un an par les rebelles à la prison centrale d'Alep (nord).

Le porte-parole de l'armée a annoncé la prise de la prison. «Ce succès est important, car il resserre l'étau autour des cellules terroristes à l'est et au nord-est d'Alep et coupe la route que les terroristes utilisaient pour relier la campagne septentrionale à Alep».

Pour sa part, le directeur de l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH) Rami Abdel Rahmane a déclaré à l'AFP qu'«après 13 mois de siège imposé par le Front Al-Nosra - branche syrienne d'Al-Qaïda - et des brigades islamistes rebelles, les forces de l'armée régulière soutenues par des combattants pro-régime sont parvenues à briser le siège de la prison».

Des images de la télévision syrienne officielle ont montré des gardiens et même des prisonniers à l'intérieur de la prison remerciant l'armée.

Cette avancée dans le secteur de la prison, située dans le nord d'Alep, a permis «de couper une voie de ravitaillement essentielle aux combattants rebelles, entre les secteurs qu'ils contrôlent et la frontière turque», selon l'OSDH.

«La seule voie de ravitaillement qui leur reste entre Alep et la frontière turque est celle connue sous le nom de route de Castello, dans le nord-ouest de la ville», explique M. Abdel Rahmane.

Les combats dans le secteur de la prison ont fait au moins 50 morts parmi les rebelles depuis mardi selon l'OSDH, qui fait état également de morts parmi les soldats et les combattants pro-régime, sans préciser leur nombre.

Les insurgés qui encerclaient depuis avril 2013 la prison affirmaient vouloir libérer les quelque 4000 détenus, selon l'OSDH.

Jeudi, l'armée de l'air a lancé des barils d'explosifs dans un large périmètre autour de la prison pour empêcher une contre-attaque des insurgés et ouvrir la voie à une avance loyaliste, a précisé cette organisation.

Selon le quotidien al-Watan, proche du pouvoir, «ce succès (...) aidera à resserrer l'étau autour de la ville, notamment des quartiers contrôlés par les hommes armés, et ainsi imposer un compromis similaire à celui du vieux Homs».

Le 9 mai, l'armée était entrée pour la première fois depuis plus de deux ans dans la vieille ville de Homs, après le retrait des 2000 derniers rebelles en vertu d'un accord inédit entre belligérants.

Par ailleurs, dans l'est du pays, où des combats font rage entre les membres de l'État islamique d'Irak et du Levant (EIIL) d'un côté et le Front al-Nosra et le Front islamique de l'autre, l'EIIL s'est emparé d'un champ pétrolier à Kharata, à 40 km au sud-ouest de Deir Ezzor, et 26 combattants de Nosra et du Front islamique ont été tués, selon l'OSDH.

À New York, la Chine et la Russie ont bloqué une résolution occidentale, pour la quatrième fois depuis le début de la crise en Syrie. Moscou, qui protège systématiquement son allié syrien de toute pression, a affirmé qu'une saisine de la CPI risquait de nuire aux maigres chances de relancer les pourparlers de paix.

«La résolution se concentre sur le droit, elle n'a rien de politicien», avait plaidé avant le vote, dans une tribune publiée dans le Wall Street Journal et Le Monde.fr, le chef de la diplomatie française Laurent Fabius, rappelant qu'elle visait «tous les crimes commis en Syrie, quels qu'en soient les auteurs».

Human Rights Watch et Amnesty International ont estimé que les vétos chinois et russe étaient une «trahison» envers les Syriens victimes de graves crimes.