Des milliers de civils syriens sont retournés samedi dans les ruines de la vieille ville de Homs, tentant de sauver le peu qui reste dans leurs maisons détruites par deux ans de combats féroces entre rebelles et soldats.

Ce retour a été rendu possible par la conclusion d'un accord inédit entre les belligérants au terme duquel près de 2000 rebelles exsangues ont été évacués du Vieux Homs assiégé et bombardé quasi-quotidiennement par les troupes du régime pendant plus de 24 mois.

L'armée, qui contrôlait déjà 80 % de la ville (centre), a pu entrer vendredi dans l'ex-bastion rebelle. Les insurgés ne contrôlent plus que le quartier de Waer à Homs, et des négociations pour leur retrait sont en cours.

Avec cette prise de la quasi-totalité de la troisième ville du pays en guerre, le régime se targue d'une «victoire» à l'approche de l'élection présidentielle controversée du 3 juin que le président Bachar al-Assad remportera sauf surprise.

La campagne électorale débute dimanche dans les seuls secteurs contrôlés par le régime, le scrutin étant qualifié de «farce» par l'opposition et ses alliés occidentaux.

Après la proclamation par le gouverneur Talal al-Barazi que le Vieux Homs est désormais «sûr et totalement libéré des hommes armés», des milliers de civils -hommes, femmes et enfants- y sont entrés pour inspecter ce qui reste de leurs logements ou commerces.

«Comme en Europe, on reconstruira»

À vélo ou à motos, certains emportaient ce qu'ils ont pu trouver comme vêtements et autres affaires, abandonnés lors de leur fuite il y a deux ans, selon une journaliste de l'AFP sur place.

«Mon mari a retrouvé notre maison détruite. Nous sommes revenus prendre nos affaires», affirme à l'AFP Rima Battah, 37 ans, en emportant cinq sacs.

Beaucoup d'habitants ont refusé de parler à la presse. «Laissez-moi tranquille», a lancé un homme au bord des larmes, en poussant une carriole avec des pièces de sa voiture endommagée.

Nawal al-Masri, 51 ans, a, elle, perdu son atelier de couture. «Tout est détruit, toutes les machines à coudre ont été volées, même le réfrigérateur et le générateur ont disparu», se lamente-t-elle. «Je n'ai retrouvé que mes ciseaux».

Alors que la plupart des logements sont inhabitables, la Chambre de commerce de Homs a créé un «fonds de secours» de l'ordre de près de 600.000 dollars en vue de reconstruire le centre-ville, appelant des donateurs à y contribuer.

«S'il y a de bonnes intentions, le Vieux Homs sera reconstruit dans un an», lance Abou Rami Abaibo, un commerçant. «Comme au Vietnam, au Japon, en Europe, on reconstruira après la guerre. C'est comme s'il y avait eu un tremblement de terre et maintenant c'est fini».

Exode et eau coupée

Des images de la ville diffusées par la télévision d'État montrent des slogans peints sur les murs comme «A bas Bachar al-Assad» ou encore «les jours sont comptés, la fin approche».

C'est à Homs, surnommée «capitale de la révolution», qu'a été lancée l'insurrection armée après la répression du mouvement de contestation pacifique lancé en mars 2011 contre le régime.

Selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), les rebelles qui ont été évacués de mercredi à vendredi du Vieux Homs ont remis leurs armes lourdes et moyennes et emporté leurs armes légères.

La prise de la ville est cruciale, car elle relie Damas au littoral ouest, de même que le nord au sud du pays, ce qui facilite les déplacements des renforts militaires.

Le conflit entre rebelles et régime en Syrie a fait plus de 150 000 morts, 6,5 millions de déplacés et quelque 2,6 millions de réfugiés depuis mars 2011.

Il est néanmoins devenu plus complexe avec des combats entre groupes jihadistes rivaux venus de l'étranger pour aider les rebelles syriens à combattre le régime.

Dans la province de Deir Ezzor (est), plus de 100 000 civils ont fui leurs villages depuis le 30 avril en raison des combats entre le Front Al-Nosra, la branche syrienne d'Al-Qaïda, et l'État islamique en Irak et au Levant (EIIL) qui a poursuivi ses avancées en prenant samedi la cité industrielle à l'entrée nord.

Enfin à Alep (nord), l'eau est coupée depuis une semaine, le Front Al-Nosra ayant stoppé la principale station de pompage de la ville, selon l'OSDH. L'intention est de priver les quartiers prorégime, mais les coupures affectent également les quartiers rebelles.