Djihadistes et insurgés ont exécuté 67 civils et pris en otage 200 personnes de la même confession que le clan Assad en Syrie, dans les crimes les plus marquants commis par l'opposition armée depuis le début du conflit, affirme vendredi une ONG internationale.

Sur un autre plan, l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC) qui a poursuivi vendredi ses opérations en vue du démantèlement en Syrie de ces armes prohibées, a reçu le prix Nobel de la paix.

Dénonçant des «crimes contre l'Humanité», Human Rights Watch (HRW) a affirmé que des jihadistes et des rebelles avaient tué le 4 août au moins 190 civils, dont 67 exécutés alors qu'ils n'étaient pas armés, et pris en otage 200 personnes dans des villages alaouites de la province côtière de Lattaquié, fief du président Bachar al-Assad.

Dans son rapport, HRW explique avoir interrogé des survivants de l'attaque et compilé une liste des victimes, parmi lesquelles 57 femmes et 18 enfants.

Selon HRW, basée à New York, au moins 20 groupes, principalement des jihadistes affiliés à Al-Qaïda, ont participé à l'offensive.

L'État islamique en Irak et au Levant (EIIL) et un autre groupe détiennent toujours les plus de 200 civils, en majorité des femmes et des enfants, selon l'organisation.

Les alaouites -une branche du chiisme à laquelle appartiennent la plupart des cadres du régime- sont minoritaires en Syrie. Les rebelles qui tentent de renverser le régime sont en grande majorité des sunnites.

La Coalition de l'opposition syrienne a «condamné sans équivoque toutes les violations des droits de l'Homme commises par les groupes armés, y compris les meurtres extrajudiciaires et les enlèvements».

Depuis que la révolte populaire contre le régime s'est militarisée face à la répression, des ONG et l'ONU ont dénoncé des crimes de guerre et contre l'humanité commis par les forces du régime, mais aussi, à une moindre échelle, par des rebelles.

Les exécutions du 4 août constituent les crimes les plus importants attribués aux jihadistes et aux rebelles selon HRW, qui a déploré un conflit «de plus en plus confessionnel et sanglant».

Le régime, appuyé par le Hezbollah chiite libanais et par des milices locales, combat une rébellion hétéroclite composée au départ de déserteurs de l'armée, rejoints par des civils ayant pris les armes puis des jihadistes étrangers.

Mercredi, un Français musulman s'est ainsi fait exploser contre une position de l'armée dans la province d'Alep (nord), tuant dix soldats, a annoncé l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH).

Le rapport de HRW a été diffusé au lendemain d'une vidéo relayée sur internet et montrant des membres présumés du Hezbollah achevant des rebelles blessés.

Nobel de la paix à l'OIAC

Dans ce contexte macabre, une équipe de l'OIAC et de l'ONU, à l'oeuvre depuis le 1er octobre en Syrie, s'est de nouveau rendue sur le terrain vendredi, quittant son hôtel pour une destination inconnue.

Méconnue du grand public, l'OIAC s'est trouvée sous le feu des projecteurs depuis le début de sa mission en Syrie, une première dans un pays en guerre, et s'est vu décerner le Nobel de la paix, une façon de soutenir cette périlleuse opération, selon gouvernements et ONG.

Les inspecteurs ont déjà commencé à superviser la destruction, par les autorités syriennes, de certaines munitions et d'installations de production d'armes chimiques qui doivent avoir été toutes démantelées au 1er novembre.

L'équipe mixte a reçu des renforts et compte désormais une soixantaine de personnes selon l'ONU. Vingt sites doivent être inspectés dans les prochaines semaines, dont certains dans «des zones dangereuses».

L'OIAC a d'ailleurs appelé à des cessez-le-feu temporaires, mais son appel n'a pas eu d'écho.

Cette mission survient après une attaque chimique ayant a fait près de 1500 morts le 21 août près de Damas, selon les États-Unis qui accusent le régime.

Les autorités syriennes ont démenti et accusé les rebelles, mais elles ont finalement donné leur accord pour démanteler l'arsenal chimique syrien, sur proposition de l'allié russe, ce qui a éloigné la menace de représailles militaires américaines qui semblaient imminentes fi août.

À New York, le Conseil de sécurité prépare une lettre destinée à l'OIAC proposant une «mission conjointe» ONU-OIAC forte d'une centaine d'hommes.

Sur le terrain, les violences ne baissent pas d'intensité: pour le 4e jour consécutif, des combats particulièrement durs opposent soldats et rebelles près de Damas et dans la province d'Alep.

Le conflit a fait plus de 115 000 morts, selon l'OSDH, et a poussé plus de six millions de personnes à fuir leur foyer.