Les chefs de la diplomatie américaine et du Pentagone, John Kerry et Chuck Hagel, ont brandi mardi la menace de frappes militaires comme le meilleur moyen de pression pour convaincre le régime syrien de mettre ses armes chimiques sous contrôle international.

Au lendemain de l'appel lancé par la Russie à Bachar al-Assad pour qu'il place sous contrôle international son arsenal chimique en vue de sa destruction, les deux ministres américains n'ont pas caché leur circonspection, lors d'une audition devant la commission de la Défense de la chambre des Représentants.

«Pour que cette option diplomatique ait une chance de réussir, la menace d'une action militaire américaine doit rester très réelle et crédible», a estimé le secrétaire à la Défense.

La proposition russe «pourrait être une solution réelle à la crise», a estimé le chef du Pentagone. «Mais nous devons être lucides et nous assurer que ce n'est pas une tactique pour gagner du temps de la part de la Syrie et des parrains russes».

Placer l'arsenal chimique syrien sous contrôle international serait la «voie idéale» pour s'en débarrasser, mais ce serait «extrêmement difficile», a convenu son collègue John Kerry.

Ce serait, selon lui, le «moyen ultime» de «dissuader» Bachar al-Assad de recourir à de nouvelles attaques chimiques et de «dégrader» ses moyens pour le faire, l'objectif affiché par Washington pour une éventuelle action militaire.

«Nous attendons cette proposition (russe, ndlr). Mais nous n'attendrons pas longtemps», a prévenu M. Kerry, précisant que le transfèrement des armes chimiques sous contrôle international devrait être «rapide», «réel» et «vérifiable».

Damas dispose d'environ «1000 tonnes» de différents agents chimiques, qu'il s'agisse de gaz moutarde (hypérite), de sarin ou de VX, a-t-il détaillé devant les élus.

La plupart des agents sont stockés en vrac «sous forme binaire» et doivent être mélangés avant emploi, mais le régime dispose également de munitions déjà remplies de sarin notamment, a-t-il ajouté, rejoignant l'analyse des services de renseignement français divulguée la semaine passée.

Les lieux de stockage sont situés dans les zones les mieux contrôlées par le régime.

La proposition russe annoncée lundi par le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov prévoit de placer sous contrôle international le stock d'armes syrien, et ensuite de le détruire.

«J'ai été clair au cours de plusieurs entretiens avec le ministre des Affaires étrangères Lavrov que ce ne peut être être un moyen pour retarder» d'éventuelles frappes militaires américaines, a assuré M. Kerry, précisant qu'il devait à nouveau s'entretenir avec son homologue russe mardi.

Au cours d'échanges parfois tendus avec des élus qui n'ont pas caché leurs réticences face à une action militaire, John Kerry a précisé que «rien n'avait changé» en ce qui concerne le souhait du président Barack Obama de voir le Congrès approuver une opération «limitée» contre le régime syrien.

Une telle action comprend toute «une série d'options» pour s'en prendre aux centres de commandement, aux moyens militaires permettant au régime de recourir aux armes chimiques, a pour sa part expliqué le plus haut gradé américain, le général Martin Dempsey lors de l'audition.

«Il est important de noter que le président ne m'a pas encore donné sa décision finale sur ces listes de cibles», a-t-il ajouté, précisant que les cibles choisies le seraient avec l'objectif de limiter au maximum d'éventuels «dommages collatéraux» dans la population civile.

«Maintenir ouvertes toutes les options»

François Hollande et Barack Obama ont souligné la nécessité de «maintenir ouvertes toutes les options» sur la Syrie tout en rappelant «leur préférence pour une solution diplomatique», mardi lors d'un entretien téléphonique, a indiqué la présidence française.

Les présidents français et américain «ont rappelé leur préférence pour une solution diplomatique mais ils ont également souligné l'importance de maintenir ouvertes toutes les options» pour neutraliser l'armement chimique du régime syrien, et «assurer sa destruction effective et totale», indique le communiqué de la présidence française.

En outre, une réunion d'urgence du Conseil de sécurité aura lieu à 20h GMT (16h, heure de Montréal)