Les accusations d'utilisation de gaz sarin par le régime de Bachar al-Assad et plus récemment par les rebelles eux-mêmes ont marqué un nouveau tournant dans le conflit syrien. Ahmad Abed, un médecin originaire de Homs, aujourd'hui réfugié au Liban, est convaincu d'avoir soigné des victimes d'attaques chimiques. Notre journaliste a recueilli son témoignage.

Installé dans son bureau, Ahmad Abed observe patiemment le va-et-vient des employés et des patients de sa clinique libanaise à travers les écrans des caméras de surveillance. La clinique est exceptionnellement calme. Le dimanche, elle n'est ouverte qu'aux urgences. «Venez demain et vous verrez. Nous recevons en moyenne 400 personnes par jour», lance-t-il.

Ahmad est l'un des seize médecins de cette clinique gratuite, ouverte 24 heures sur 24, pour les réfugiés syriens à Tripoli, dans le nord du Liban. Originaire du quartier de Bab Sbaa à Homs, en Syrie, ce père de famille travaillait dans un hôpital gouvernemental lorsque la guerre a éclaté dans son pays.

«Un jour, un jeune homme est arrivé à l'hôpital avec une blessure au bras. Rien de très sérieux. Le lendemain, il était mort d'une balle entre les yeux. J'ai réalisé qu'il avait été tué à l'hôpital. C'est là que j'ai décidé de rejoindre une clinique du côté des rebelles», raconte Ahmad.

Un peu plus tard, en février 2012, la guerre prend un nouveau visage pour Ahmad. «Les gens ont commencé à arriver à notre clinique avec d'étranges symptômes. Les patients, une vingtaine en tout, avaient des hallucinations, les pupilles contractées, des douleurs dans les articulations, de la difficulté à respirer, des ulcères buccaux, des sécrétions abondantes, etc. Tous venaient des mêmes endroits, Baba Amr et Bab Sbaa, et racontaient la même histoire: leur maison avait été la cible d'une roquette, puis une épaisse fumée jaune s'était dispersée dans l'air», raconte le médecin réfugié au Liban depuis dix mois.

«Ceux qui avaient inhalé trop de gaz mourraient dans les heures qui suivaient», précise-t-il.

Un gaz persistant

Il a fui la Syrie avec sa famille, suivant les conseils de ses collègues. «Les forces du régime de Bachar al-Assad arrêtaient quiconque apportait une aide humanitaire à la population», explique-t-il.

En revanche, il estime avoir soigné des victimes d'armes chimiques même au Liban. En juin dernier, il a accueilli sept patients originaires de Homs avec des symptômes similaires. Deux d'entre eux avaient été bloqués à la frontière pendant 45 jours. «Ce couple présentait toujours ces mêmes symptômes. Ce qui veut dire que le gaz était encore présent dans leur organisme.»

Aujourd'hui Ahmad est convaincu que ses patients avaient été victimes d'armes chimiques. «Au moment des faits, mes collègues et moi parlions déjà de cette possibilité, mais personne ne voulait y croire. Malheureusement, les photos que j'ai vues dans les médias la semaine dernière n'ont fait que confirmer ce que je redoutais.»

Itaï Brun général israélien, responsable de la division du renseignement

«Pour autant que nous sachions, en fonction de notre expertise, le régime a utilisé des armes chimiques mortelles contre les rebelles lors d'une série d'incidents au cours des derniers mois.»

Barack Obama président des États-Unis, faisant référence à l'invasion américaine en Irak, en comparaison avec la crise syrienne

«Je ne prends pas de décisions fondées sur les perceptions. Et je ne peux pas organiser un sommet international basé que sur des perceptions. Nous avons essayé par le passé, et ça n'a pas fonctionné.»

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Ce qu'ils ont dit sur les armes

Itaï Brun, général israélien, responsable de la division du renseignement

«Pour autant que nous sachions, en fonction de notre expertise, le régime a utilisé des armes chimiques mortelles contre les rebelles lors d'une série d'incidents au cours des derniers mois.»

Barack Obama, président des États-Unis, faisant référence à l'invasion américaine en Irak, en comparaison avec la crise syrienne

«Je ne prends pas de décisions fondées sur les perceptions. Et je ne peux pas organiser un sommet international basé que sur des perceptions. Nous avons essayé par le passé, et ça n'a pas fonctionné.»

- Hugo Pilon-Larose