De violents combats entre soldats et rebelles ont secoué lundi les souks d'Alep, joyau historique classé par l'UNESCO dans la deuxième ville de Syrie, tandis que des raids aériens ont encore coûté la vie à des enfants dans le nord-ouest.

À New York, le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon a appelé le régime syrien «à montrer de la compassion pour son propre peuple» et a solennellement mis en garde Damas contre toute utilisation de son arsenal d'armes chimiques.

Le ministre syrien des Affaires étrangères, Walid Mouallem, a pour sa part assuré à la tribune des Nations unies que Damas «croit toujours en une solution politique», tout en accusant les États-Unis et la France notamment «de soutenir le terrorisme» en Syrie.

À Alep, deuxième ville du pays et enjeu majeur du conflit qui dure depuis plus de 18 mois, de violents combats avaient repris dans la soirée aux abords des souks historiques, déjà victimes de destructions durant le week-end.

Une source militaire a affirmé à l'AFP que les rebelles «tentaient de prendre d'assaut la mosquée des Omeyyades», non loin des souks. Le chef de brigade rebelle al-Tawhid, Abdel Kader Saleh, la plus puissante à Alep, a affirmé à l'AFP que «l'armée a transformé la mosquée des Omeyyades en caserne».

Régime et rebelles se sont accusés mutuellement d'être à l'origine des dégâts causés aux souks. Classés par l'UNESCO en 1986, avec la vieille ville d'Alep, leurs quelque 1550 échoppes étaient depuis des siècles l'un des centres névralgiques du commerce au Moyen-Orient.

La France a exprimé lundi sa «vive condamnation suite à la destruction par les flammes du marché médiéval d'Alep causée par de violents bombardements». Les portes de bois des échoppes, remplies d'étoffes et de broderies, s'étaient rapidement consumées après les premiers combats samedi.

Cinq de la quarantaine des marchés du souk, comme le souk des femmes, celui de l'or ou encore celui des abayas, ont été entièrement détruits, selon des témoins, même s'il reste difficile d'estimer les dégâts en raison des combats.

Les États-Unis ont annoncé lundi l'envoi d'un émissaire en Europe pour discuter avec Paris, Berlin, Londres et Rome de la «poursuite des efforts de sanctions contre l'Iran et la Syrie» et des «priorités en matière de lutte contre le financement du terrorisme».

Toujours à Alep, des combats ont également éclaté dans d'autres secteurs. L'immeuble abritant le gouvernorat local a été la cible d'un tir, «provoquant la panique parmi les fonctionnaires», selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH).

Les violences ont fait 21 morts à Alep lundi, et 156 au total, dont 84 civils, dans tout le pays, selon l'OSDH.

«Que Dieu te maudisse Bachar»

À Idleb, province voisine d'Alep dans le nord-ouest du pays, au moins 21 civils, dont huit enfants, tués dans un raid aérien mené par les troupes du régime de Bachar al-Assad sur la localité de Salqine, selon l'OSDH et des militants.

Une vidéo postée sur internet montre des images insoutenables de corps carbonisés et démembrés, dont ceux d'enfants.

La télévision d'État syrienne a affirmé que les forces du régime «ont tué la plupart des terroristes qui ont attaqué la ville de Salqine», évoquant «des terroristes d'Al-Qaïda et des non-Syriens».

La mort a frappé ailleurs dans le pays, dans les régions défendues farouchement par les rebelles comme à Deraa, berceau de la contestation, où au moins cinq personnes, dont une femme, ont péri dans le pilonnage par l'armée, selon l'OSDH.

«Que Dieu te maudisse Bachar, toi, tes soldats et ta famille, nous nous vengerons», clame un homme dans une vidéo.

Au moins 18 soldats syriens ont par ailleurs été tués et 30 autres blessés dans une embuscade rebelle contre un convoi de voitures, de camions et de véhicules sur la route de Homs, dans le centre du pays, selon l'OSDH.

La rébellion a par ailleurs affirmé avoir pris des missiles antiaériens longs de plusieurs mètres dans un arsenal de l'armée situé dans le secteur de Ghouta, dans la province de Damas.

Le conflit a fait plus de 30 000 morts depuis le début du conflit en mars 2011, selon l'OSDH.

Une «chimère» des États-Unis

Avant son intervention à l'ONU, le chef de la diplomatie syrienne a accusé sur la chaîne arabe Al-Mayadeen les États-Unis de vouloir de prétexter du dossier des armes chimiques pour abattre le régime, comme en Irak en 2003.

«C'est une chimère qu'ils ont inventée pour lancer une campagne contre la Syrie comme ils l'ont fait en Irak», a-t-il déclaré. L'argument des États-Unis de la présence d'armes de destruction massive en Irak avait servi à justifier l'invasion de ce pays en mars 2003 et s'était ensuite révélé faux.

M. Mouallem a toutefois gardé le flou sur la détention d'un tel arsenal par le régime, deux mois après que Damas a reconnu pour la première fois posséder des armes chimiques et menacé de les utiliser en cas d'intervention militaire occidentale, mais pas contre sa population.

La semaine dernière, le secrétaire américain à la Défense Leon Panetta avait affirmé que Damas avait déplacé des armes chimiques pour les sécuriser. Washington est défavorable à une intervention armée en Syrie.

Un journaliste américain pigiste, Ausqtin Tice, porté disparu depuis la mi-août en Syrie et probablement entre les mains du régime de Damas, selon Washington, est apparu lundi sur une vidéo diffusée sur internet.

La Turquie a par ailleurs évalué lundi à près de 100 000 le nombre de Syriens réfugiés sur son territoire, et a réclamé une aide internationale pour continuer à les accueillir.

Au total, 93 576 réfugiés sont logés dans 13 camps dispersés dans le sud-est de la Turquie, frontalière avec la Syrie, selon Ankara.