La communauté internationale a unanimement condamné mercredi la dispersion sanglante au Caire des partisans du président islamiste déchu Mohamed Morsi par l'armée, Washington appelant à des élections en Égypte tandis que Paris saisissait l'ONU.

Déplorant des événements «lamentables», le secrétaire d'État américain John Kerry a appelé le gouvernement intérimaire et l'armée à «empêcher davantage de violence» et à «proposer des options constructives parmi lesquelles le remaniement de la Constitution et l'organisation d'élections législatives et présidentielles».

La répression de mercredi est «un grave coup porté à la réconciliation et aux espoirs du peuple égyptien pour une transition démocratique», a estimé le secrétaire d'État américain, sans dire un mot de l'assistance militaire annuelle de 1,3 milliard de dollars que les États-Unis versent à l'armée égyptienne.

De son côté, la France, qui a demandé «l'arrêt immédiat de la répression», a annoncé qu'elle saisissait le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-Moon, et ses principaux partenaires «pour qu'en urgence une position internationale soit prise en ce sens».

Un peu plus tôt, le premier ministre turc islamo-conservateur, Recep Tayyip Erdogan, avait appelé «la communauté internationale avec en tête le Conseil de sécurité de l'ONU et la Ligue arabe» à «immédiatement passer à l'acte pour faire cesser ce massacre».

Dans un communiqué, M. Erdogan avait souligné que l'attitude conciliante de la communauté internationale à l'égard du «coup d'État» en Égypte «n'avait fait qu'encourager l'actuel gouvernement en vue de son intervention d'aujourd'hui (mercredi)».

Au total 149 partisans de Mohamed Morsi ont été tués mercredi en Égypte, selon le ministère égyptien de la Santé. Ce bilan est probablement bien plus élevé, un journaliste de l'AFP ayant dénombré 124 cadavres sur la seule place Rabaa al-Adawiya, QG des manifestants pro-Morsi au Caire.

Le président turc Abdullah Gül a, lui, jugé inacceptable une «intervention armée contre des civils qui manifestent» et dressé un parallèle avec le début de la contestation en Syrie, avant qu'elle ne dégénère en conflit armé.

Le terme de «massacre» a également été employé par le mouvement palestinien du Hamas et par Téhéran qui a évoqué «la possibilité d'une guerre civile» en Égypte.

Le Qatar, principal soutien des Frères musulmans, a condamné «avec force» l'intervention de la police contre des «manifestants pacifiques».

Le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, a «condamné dans les termes les plus fermes les violences qui se sont produites au Caire quand les services de sécurité égyptiens ont utilisé la force» contre les manifestants. Il a demandé «à tous les Égyptiens de concentrer leurs efforts sur la promotion d'une réconciliation sans exclusive», selon son porte-parole.

Appels à la retenue

Partout en Occident, où le renversement le 3 juillet du président Morsi, démocratiquement élu au printemps 2012, n'a guère suscité de critiques, les appels à la retenue se sont multipliés.

À Moscou, le ministère russe des Affaires étrangères a appelé «toutes les forces politiques» à la «retenue» et au «sang-froid» afin d'éviter une nouvelle escalade des tensions et d'autres victimes.

Le chef de la diplomatie de l'Union européenne, Catherine Ashton, a appelé «les forces de sécurité à faire preuve de la plus grande retenue et tous les citoyens égyptiens à éviter de nouvelles provocations et une escalade» de la violence. Le président du Parlement européen, Martin Schulz, a, quant à lui, jugé que «les nombreux morts dénombrés ce matin au Caire étaient inacceptables».

Le chef de la diplomatie britannique, William Hague, «profondément inquiet de l'escalade de la violence en Égypte», a condamné le recours à la force et appelé «les forces de sécurité à agir avec retenue».

La Suède a estimé, par la voix de son ministre des Affaires étrangères, Carl Bildt, que la «principale responsabilité» des «tueries» en Égypte incombait au régime.