Le piano de la salle communautaire a été repoussé contre le mur. À l'endroit où, la semaine dernière, on donnait des cours sur la Bible, des lits de camp ont été installés. Les tables du repas du dimanche sont couvertes de médicaments.

Hier, tout était prêt dans l'église évangélique d'Héliopolis pour accueillir les blessés si les manifestations pro- et anti-Morsi tournaient au vinaigre.

«Il y a une vingtaine de médecins musulmans et chrétiens prêts à accourir s'il se passe quoi que ce soit», a expliqué le pasteur Naguib Makran, en faisant visiter l'hôpital que sa congrégation et lui ont improvisé la semaine dernière.

L'église, qui se trouve à moins de 10 minutes à pied du palais présidentiel, a offert de pousser à la roue quand des affrontements entre manifestants ont fait 800 blessés dans la nuit de mercredi dernier. «L'argent est venu de partout. De l'église copte d'à côté. De la communauté», a raconté le pasteur.

Les blessés, eux, venaient des deux camps. «La plupart étaient des Frères musulmans», a-t-il dit. «Mais pour nous, ça ne fait aucune différence.» Des blessures à la tête, au visage ou au dos ont été pansées, raccommodées, soignées, sans tenir compte de l'appartenance à un camp ou à un autre.

Le pasteur Makran ne cache pas qu'il n'est pas particulièrement heureux de l'arrivée au pouvoir d'un président islamiste.

«Nous sommes assurément inquiets du mélange entre la politique et la religion», a-t-il dit, traduisant du coup la principale préoccupation de la grande minorité chrétienne d'Égypte, forte de près de 10 millions d'âmes.

Mais il est convaincu que les maux du pays pourraient être réglés comme dans la clinique - qu'il était plus que content de voir vide, hier. «Nous pouvons travailler ensemble, chrétiens et musulmans, sans distinction, pour un but commun. C'est ça, la vraie Égypte.»