La nouvelle Assemblée du peuple égyptienne, issue des premières élections de l'ère post-Moubarak, a entamé lundi matin sa première session, avec sur ses bancs des députés aux trois quarts islamistes.

Les 508 députés, parmi lesquels à peine une poignée de femmes, ont prêté serment un par un dans l'hémicycle, sous la présidence du doyen, Mahmoud al-Saqqa.

Cette session est la première depuis la chute de Hosni Moubarak en février 2011, qui avait été suivie par la dissolution du Parlement contrôlé à l'époque par le parti présidentiel.

Les députés sont issus d'un scrutin-marathon qui s'est déroulé par phases depuis la fin novembre, dans le cadre d'un processus de marche vers la démocratie promis après la chute du régime Moubarak.

Le parti de la liberté et de la justice (PLJ), issu des Frères musulmans, a raflé quelque 47% des sièges. Le secrétaire-général du PLJ, Saad al-Katatni pourrait devenir le président de la Chambre.

Les fondamentalistes salafistes du parti Al-Nour (la Lumière) détiennent quant à eux environ 24% des députés. D'autres formations islamistes ont elles aussi décroché quelques sièges.

Le camp libéral a connu une débâcle. Sa formation la plus importante, le parti libéral Wafd, ne compte que 9% des députés, suivi par le Bloc égyptien avec 7% des sièges.

Peu après l'ouverture de la séance, un député islamiste a été rappelé à l'ordre pour avoir évoqué «la loi de Dieu» dans son serment, en plus de la formule rituelle de «préserver la sécurité de la nation et les intérêts du peuple, et respecter la constitution et la loi».

D'autres, qui ont ajouté à leur serment la promesse de «protéger les objectifs de la révolution», se sont également vus rabrouer par le président de séance.

Des députés soucieux de marquer leur distance avec le pouvoir militaire qui a remplacé M. Moubarak, ont siégé avec une écharpe jaune portant une inscription dénonçant le recours à la justice militaire pour juger des civils.

Cette session survient à deux jours du premier anniversaire, mercredi, du début de la révolte qui poussa l'ancien raïs à la démission après trente ans de règne.

Plusieurs centaines de militants islamistes se sont rassemblés près du siège du Parlement pour manifester leur joie.

D'autres manifestations sont prévues dans l'après-midi pour demander à la nouvelle Assemblée de consolider les espoirs démocratiques issus de la révolte.

Le raz-de-marée électoral islamiste, particulièrement le score élevé des salafistes, a provoqué des craintes dans les milieux libéraux et laïques, ainsi que parmi la minorité chrétienne.

Les Frères musulmans, soucieux d'apparaître comme un mouvement prêt à participer au pouvoir après des décennies de semi-clandestinité, ont multiplié les assurances de modération et se sont distancés des salafistes.

La seconde chambre parlementaire, la Choura (Sénat consultatif), doit être élue à partir du 29 janvier.

Le Parlement une fois au complet aura pour principale mission de nommer une commission chargée de rédiger une nouvelle Constitution.

En attendant, les prérogatives des parlementaires sont encore imprécises, face à l'armée qui gouverne par décrets et contrôle un gouvernement civil chargé des affaires courantes.

Les Frères musulmans ont alterné ces dernières semaines déclarations conciliantes à l'égard de l'armée et prises de positions, plus conflictuelles, en faveur de larges pouvoirs pour le Parlement au détriment des généraux.

L'armée a promis de rendre le pouvoir aux civils après une élection présidentielle qui doit se tenir avant la fin juin.