Les résultats officiels du second tour des législatives en Égypte ont confirmé la victoire écrasante des islamistes, qui ont raflé plus de deux tiers des sièges à l'issue de la phase initiale de cette première élection de l'ère post-Moubarak.

Les diverses formations islamistes ont remporté au total 113 sièges sur 168 en lice pour les deux tours de la première phase de l'élection, selon ces résultats rapportés par la presse jeudi.

Les Frères musulmans se taillent la part du lion, avec 80 sièges, suivis par le parti salafiste (fondamentaliste) al-Nour (La Lumière) avec 33 sièges, lors des deux tours qui se sont tenus les 28-29 novembre et les 5-6 décembre.

Les partis libéraux laïques obtiennent quant à eux 33 sièges, le reste allant à des candidats indépendants ou de petites formations.

Les chiffres pouvaient varier légèrement d'un quotidien à l'autre, chacun faisant ses propres calculs par parti sur la base de données brutes fournies par la commission électorale, sans toutefois remettre en cause les grandes tendances.

Ces résultats concernent le premier tiers des gouvernorats d'Égypte, dont les grandes villes du Caire et d'Alexandrie, où était organisé le vote. Les autres régions doivent élire leurs députés à partir du 14 décembre et jusqu'au 11 janvier.

Les partis islamistes comptent sur leur forte implantation dans les nombreuses régions rurales qui vont voter dans les prochaines semaines pour consolider les gains déjà enregistrés.

La percée des salafistes, tenants d'un islam rigoriste, avait surpris rivaux et analystes lors de la première phase du vote.

Au second tour, l'écart s'est creusé entre les Frères musulmans, qui ont tissé depuis plus de 80 ans d'importants réseaux dans la société égyptienne, et ces nouveaux venus sur la scène politique, qu'ils ont longtemps rejetée comme un «péché».

Les Frères musulmans ont également tenu à se démarquer des salafistes, en se présentant comme les tenants d'un islam «modéré» et en n'excluant pas de nouer des alliances au-delà de la mouvance islamiste.

Le bon score du parti des Frères musulmans, le parti de la Liberté et de la Justice (PLJ), face aux salafistes au second tour montre que «les électeurs votent pour les Frères par peur des positions radicales des salafistes», titrait jeudi le quotidien indépendant al-Masry al-Youm.

La participation, de 52% au premier tour, a marqué le pas au second tour, avec officiellement 39% d'électeurs qui se sont rendus aux urnes lundi et mardi.

L'élection des députés du plus peuplé des pays arabes, avec plus de 80 millions d'habitants, sera suivie de la fin janvier à la mi-mars par celle des sénateurs.

Le futur Parlement égyptien devra former une commission chargée de rédiger une nouvelle Constitution, étape cruciale pour l'équilibre des pouvoirs de l'Égypte après la démission en février du président Hosni Moubarak, qui a régné en autocrate sur le pays pendant trois décennies avant d'être emporté par le «Printemps arabe».

L'armée au pouvoir depuis sa chute a promis de rendre le pouvoir aux civils après une présidentielle prévue au plus tard fin juin 2012.

Le Conseil militaire qui dirige le pays a investi mercredi un nouveau gouvernement de transition, dirigé par un premier ministre, Kamal el-Ganzouri, aux pouvoirs renforcés pour faire face notamment à la crise qui mine l'économie du pays et à la dégradation de la sécurité.

Le CSFA a précisé qu'il lui attribuait «les prérogatives qui sont accordées au président de la République en vertu de la loi, à l'exception de celles concernant les forces armées et les institutions judiciaires», sans donner plus de détails sur ces pouvoirs.

Un grand nombre des manifestants qui occupaient la place Tahrir, emblématique foyer de la révolte de janvier/février au Caire, campent désormais devant le siège du gouvernement, pour affirmer leur rejet de M. Ganzouri, qu'ils considèrent comme un vestige de l'ancien régime.

Ces militants demandent le départ sans délai du pouvoir militaire.