Une foule en colère défiait vendredi les forces de sécurité déployées en force à Alexandrie, réclamant plus de liberté et mettant le feu au siège du gouvernorat, symbole du régime du président Hosni Moubarak.

Des nuages de fumée s'élevaient au dessus du bâtiment officiel dans le centre de la cité portuaire méditerranéenne, deuxième ville d'Égypte, incendié après de violents accrochages avec la police.

C'est en criant leur souhait de voir le président Moubarak quitter le pouvoir, qu'il occupe depuis près de 30 ans, que des centaines de fidèles sont sortis de la mosquée principale de la ville.

«Nous ne voulons pas de lui», scandaient les manifestants. Dispersés par des gaz lacrymogènes et des tirs de balles en caoutchouc, ils se sont regroupés ensuite en plusieurs petits groupes.

D'autres manifestants, furieux, ont débordé la police à plusieurs endroits, s'emparant de véhicules anti-émeutes, et y mettant le feu.

Ailleurs, une foule déchaînée a foncé sur la police à la vue d'un manifestant gravement blessé à la main, que des amis emportaient loin de l'agitation.

Le Mouvement du 6 avril, un regroupement de jeunes hostiles au régime de M. Moubarak né sur le site Facebook, avait lancé un appel national à la protestation via internet, dont le réseau a été coupé vendredi pour tenter de briser le mouvement de contestation.

En dépit de cette mesure, au quatrième jour de ces manifestations sans précédent débutées mardi et qui ont fait huit morts et entraîné un millier d'arrestations, les rangs des contestataires grossissent. Et en plus des militants chevronnés, des citoyens lambda ont rejoint le mouvement.

«C'est la première fois que je participe à une manifestation», dit Abdou, un des milliers d'Égyptiens présents dans les rues d'Alexandrie.

«Je ne peux pas me marier, je ne peux pas acheter d'appartement. Tout est cher et les salaires sont bas», se désole ce vitrier, résumant la frustration de beaucoup de jeunes Égyptiens.

Même constat pour Ossama Abdel Wadoud, qui foule également le pavé pour la première fois. «C'est la première fois que je participe. J'en ai marre. J'en ai assez d'Hosni», lâche cet employé d'une station service âgé de 31 ans.

«On est opprimés», renchérit Aziza, le visage recouvert d'un voile noir. «La jeunesse n'a nulle part où aller, elle n'a rien à faire».

«Nous voulons notre liberté», dit Moustafa Sayed, 28 ans, qui gagne environ 750 livres égyptiennes, soit environ 130 dollars.

Le long de la plage, des centaines de jeunes plein de rage descendaient la corniche, chantant l'hymne de la contestation: «Le peuple veut la chute du régime».

Dans le désordre, des voix s'élevaient pour appeler au calme, enjoignant les manifestants à maintenir la protestation «pacifique».

Depuis les fenêtres des immeubles du front de mer, des gens encourageaient les manifestants.

Au sol, des tas de cailloux utilisés par les manifestants dans leur riposte face aux forces de l'ordre jonchaient les rues, alors que les heurts continuaient, tout comme la chasse-poursuite entre manifestants et policiers.