Des combats ont fait rage vendredi à Benghazi, dans l'Est libyen, où 23 personnes ont été tuées, dont 4 dans un attentat suicide, au troisième jour d'une offensive lancée par des forces progouvernementales contre des milices islamistes.

Benghazi est l'une des zones les plus troublées de la Libye, un pays plongé dans le chaos et livré aux milices depuis le renversement de Mouammar Kadhafi au terme de huit mois de conflit en 2011.

Selon un correspondant de l'AFP, les affrontements de vendredi sont les plus violents depuis le début mercredi matin de l'offensive lancée par le général à la retraite Khalifa Haftar, appuyée par l'armée et des civils armés.

Le Centre médical de Benghazi a fait état de 23 morts vendredi, ce qui porte le bilan à 57 morts depuis le lancement de l'opération, selon un décompte de l'AFP basé sur les bilans des hôpitaux de la ville.

Parmi les victimes figurent trois jeunes tués dans la soirée dans un attentat suicide.

Selon des témoins, un kamikaze a fait exploser sa voiture à son arrivée à un barrage dressé par des jeunes qui participent aux combats aux côtés des militaires, à l'entrée du quartier de Bouhdima dans le centre de Benghazi.

Le Centre médical de Benghazi a indiqué avoir reçu trois cadavres et les restes du corps du kamikaze, faisant état aussi d'un blessé dans un état critique.

Vendredi, les affrontements ont notamment eu lieu dans le quartier central d'al-Majouri où réside Mohamed al-Zehawi, le chef du groupe jihadiste Ansar Asharia --classé organisation terroriste par Washington-- et plusieurs de ses hommes.

Selon des témoins, des armes de différents calibres ont été utilisées dans une guerre de rues, au milieu d'un quartier résidentiel à forte densité d'habitations.

Le Croissant rouge libyen a appelé à un cessez-le-feu «même pour une heure» pour permettre aux familles de fuir les zones de combat.

Les forces aériennes ont mené par ailleurs des raids sur des fiefs des groupes islamistes à Benghazi, notamment dans les quartiers d'al-Lithi, al-Massaken et Bouatni, au sud-est de la ville.

«Confrontation nécessaire»

Sur son compte Twitter, l'ambassadrice américaine en Libye, Deborah Jones, a «condamné les attaques en cours d'Ansar Asharia contre le peuple libyen».

«La confrontation avec des organisations terroristes est nécessaire (mais) doit être menée par les forces armées régulières sous le contrôle et la responsabilité de l'autorité centrale», a-t-elle encore indiqué.

Le général Haftar, qui avait participé à la révolte contre Mouammar Kadhafi, a lancé en mai une opération baptisée «Dignité» contre les milices qu'il a qualifiées de «terroristes».

Il a été accusé dans un premier temps par les autorités de tenter un «coup d'État». Mais ces dernières ont changé de position depuis, et l'armée régulière libyenne affiche désormais clairement son soutien à l'opération du général Haftar et à sa nouvelle offensive sur Benghazi.

Ce rapprochement a été dénoncé par la coalition de milices armées, notamment islamistes, et originaires de la ville de Misrata (est de Tripoli), qui contrôle la capitale depuis août.

Cette coalition «Fajr Libya» (Aube de la Libye) a récemment élargi son offensive à l'ouest de Tripoli.

Depuis plusieurs jours, des combats font ainsi rage entre Fajr Libye et des forces de Zenten (ouest) et de leurs alliés, en particulier autour de la ville de Kekla, à une centaine de kilomètres au sud-ouest de Tripoli.

Selon des analystes, la flambée des violences en Libye ces derniers jours risque de compromettre le dialogue politique lancé fin septembre par l'ONU, dans le but de mettre fin aux violences et à l'anarchie institutionnelle dans le pays.

Les Libyens font face en effet à une situation inédite avec deux Parlements et deux gouvernements en place, compliquant la difficile transition politique dans un pays en proie au chaos depuis la chute du régime Kadhafi en 2011.

Forte de son succès militaire, Fajr Libya a formé un gouvernement parallèle à Tripoli, tandis que le Congrès général national (CGN, le Parlement sortant dominé par les islamistes et des députés de Misrata) a repris ses travaux bien que son mandat ait expiré théoriquement avec l'élection en juin du nouveau Parlement.