Les islamistes libyens ont accusé samedi les Émirats arabes unis et l'Égypte d'être responsables des raids dirigés contre leurs forces engagées dans la bataille pour le contrôle de l'aéroport de Tripoli qu'ils affirment avoir réussi à enlever à des miliciens nationalistes.

Dans un pays plongé dans le chaos, l'Assemblée libyenne sortante, le Conseil général national (CGN), dominé par les islamistes, a annoncé dans la soirée son intention de reprendre ses activités en dépit de l'existence du Parlement qui l'a remplacé.

L'accusation des islamistes visant les Émirats et l'Égypte est intervenue après cinq jours de spéculations sur l'identité des avions qui ont attaqué de nuit et à deux reprises les rangs islamistes, près de l'aéroport de Tripoli.

Dans la matinée encore, les islamistes disaient tout ignorer de l'identité de ces avions, tout comme le gouvernement provisoire sans réel pouvoir sur le pays.

La paternité de ces attaques revendiquées par le général dissident Khalifa Haftar à partir de Benghazi était jugée fantaisiste.

Les spécialistes ont estimé en effet que ce général, hostile aux islamistes, mais basé à 1.000 km de Tripoli, ne disposait pas d'avions ayant une autonomie leur permettant de lancer de tels raids, et pouvant opérer de nuit.

«Les Émirats et l'Égypte sont impliqués dans cette lâche agression», a déclaré en début de soirée Mohamed Hadia, un porte-parole de l'opération «Fajr Libya» (Aube de la Libye), à propos des raids mystérieux contre ses forces menés lundi avant l'aube et vendredi soir. Il a affirmé que le gouvernement provisoire et le Parlement étaient complices de ces raids.

Le porte-parole a indiqué que le raid de vendredi avait fait 13 morts et 20 blessés parmi les combattants islamistes et rejeté «la responsabilité de ces attaques sur les assaillants». «Nous nous réservons le droit d'y riposter au moment opportun», a-t-il ajouté.

Les Émirats et l'Égypte sont des bêtes noires des islamistes. Les Émirats en ont jugé pour complot des dizaines, dont des Égyptiens, et sont brouillés avec le Qatar, leur voisin, à propos du soutien de ce dernier aux Frères musulmans.

En Égypte, les Frères musulmans ont été déclarés hors-la-loi par le pouvoir dirigé par l'ex-général Abdel Fattah al-Sissi.

Les miliciens islamistes, venus en grande partie de Misrata (est de Tripoli) considèrent que le gouvernement provisoire et le Parlement ont «commis (en étant complices de ces raids) un acte de trahison qui leur dénie toute légitimité à gouverner le peuple».

Dans la soirée, après que les islamistes ont annoncé qu'ils retiraient leur confiance au Parlement élu lui reprochant d'être complice de l'Égypte et des Emirats, le Conseil général national (CGN), dont le mandat a expiré, a annoncé son intention de reprendre ses activités.

«Le Conseil général national va se réunir en urgence à Tripoli pour sauvegarder la souveraineté du pays», a déclaré un porte-parole Omar Ahmidane de l'assemblée sortante sur une télévision locale.

Le CGN, où les islamistes étaient bien représentés, a été remplacé par le Parlement élu le 25 juin qui siège à Tobrouk dans l'Est et qui est dominé par les non-islamistes.

Depuis son élection, le nouveau Parlement, qui s'est prononcé pour une intervention étrangère pour protéger les civils est contesté dans la rue, lors de manifestations d'islamistes.

Un véhicule émirati saisi

Peu auparavant, les miliciens islamistes avaient annoncé avoir pris le contrôle de l'aéroport international de Tripoli à l'issue de dix jours de violents combats avec des miliciens nationalistes.

Cette annonce a été peu quelque peu atténuée par l'un de leurs porte-parole qui a précisé que les combattants de Misrata et leurs alliés «sont entrés dans l'aéroport où ils s'emploient à nettoyer des poches de résistance».

Cette installation stratégique, située à 30 km au sud de la capitale et fermée depuis le début des combats, était aux mains de miliciens de Zenten (ouest) depuis la chute du régime de Mouammar Kadhafi en 2011.

Si la prise de l'aéroport est confirmée de source indépendante, elle serait un revers pour les miliciens de Zenten, qui sont alliés au général hostile aux islamistes contre lesquels il a lancé une opération dite «Karama» (Dignité) dans l'Est libyen.

Dans leur progression en direction de l'aéroport, les miliciens islamistes ont saisi aux combattants de Zenten, un véhicule militaire blindé de type Tiger, développé par les Émirats arabes unis, selon des images des télévisions locales.

Le véhicule a été saisi dans un camp militaire attenant à l'aéroport et a été exhibé par les combattants islamistes comme une preuve du soutien des Émirats à leurs adversaires de Zenten.