Le procès de l'ex-chef des services de renseignements extérieurs sous le régime de Mouammar Kadhafi, Bouzid Dorda, s'est ouvert mardi dans un tribunal de Tripoli, entouré de mesures de sécurité exceptionnelles.

Il s'agit du premier procès d'un responsable de si haut rang depuis la chute du régime de Mouammar Kadhafi en octobre dernier.

M. Dorda, arrêté en septembre à Tripoli est accusé notamment d'avoir « ordonné aux forces des services de sécurité extérieurs, de tuer des manifestants et tirer des balles réelles sur eux ».

M. Dorda a plaidé non coupable pour chacun des six chefs d'accusation lus par le juge lors de cette audience ouverte à la presse.

« Je nie ces accusations qui sont contraires à ce que j'ai accompli durant la période des évènements », a-t-il dit, en allusion à la révolte libyenne qui avait éclaté à la mi-février 2011 et qui avait fini par faire tomber le régime de Mouammar Kadhafi, tué par des rebelles en octobre.

M. Dorda est accusé également d'avoir formé une force armée de sa tribu, « dans le but de déclencher une guerre civile et de commettre des agressions contre la région ouest de la Libye », et d'avoir commis un « abus de pouvoir » en emprisonnant et tuant des manifestants.

Cet ancien responsable est arrivé à la salle d'audience en tenue bleue de prisonnier, appuyé sur deux béquilles. Selon des sources proches du dossier, il souffre d'une fracture à la hanche après avoir sauté d'une fenêtre lors d'une tentative d'évasion.

Il est détenu et jugé dans le même établissement, une académie militaire transformée par le nouveau régime pour juger les anciens responsables kadhafistes.

À la fin de l'audience qui a duré une trentaine de minutes, le juge a décidé le report du procès au 26 juin, à la demande de l'avocat de M. Dorda, Me Daw al-Mansouri. Ce dernier a réclamé du temps pour pouvoir examiner le dossier de son client et préparer sa plaidoirie.

Ex-premier ministre sous Kadhafi, M. Dorda, avait remplacé Moussa Koussa à la tête des services de renseignements extérieurs en 2009. Il avait également occupé le poste de représentant de la Libye à l'ONU durant une dizaine d'années.

En commençant à juger les responsables de l'ancien régime, Tripoli souhaite prouver à la communauté internationale qu'elle était capable de tenir des procès équitables.

Les nouvelles autorités tentent notamment de convaincre la Cour pénale internationale (CPI) de leur capacité à juger Saïf al-Islam, fils de Mouammar Kadhafi, qui fait l'objet d'un mandat d'arrêt de la Cour pour des crimes contre l'humanité commis à partir du 15 février 2011 pendant la répression de la révolte populaire.

Tripoli avait demandé à la Cour de dire que la procédure contre Saïf al-Islam devant la CPI est « irrecevable ».

La Libye avait également demandé aux juges d'« annuler » la requête de la CPI ordonnant aux autorités libyennes de lui livrer Saïf al-Islam.

Elle tente aussi d'obtenir l'extradition d'Abdallah Senoussi, ex-chef de renseignements intérieurs et le beau frère de Kadhafi, qui avait été arrêté en Mauritanie et qui fait lui aussi l'objet d'un mandat d'arrêt de la CPI.