L'ex-premier ministre libyen Al-Baghdadi Al-Mahmoudi a réclamé vendredi le statut de réfugié politique auprès du HCR et multiplie les démarches pour éviter l'extradition vers la Libye, qu'autorise depuis mardi la justice tunisienne.

Une demande de statut de réfugié politique a été déposée par la défense de M. Al-Mahmoudi auprès de la représentation du HCR (Haut commissariat pour les réfugiés) à Tunis, a indiqué l'un de ses avocats, Taoufik Wanas.

«M. Al-Mahmoudi a demandé au HCR de le considérer comme réfugié politique et, si le HCR lui octroie ce statut, il n'y aura plus de possibilité d'extradition», a déclaré Me Wanas.

La Cour d'appel de Tunis avait donné son feu vert mardi à une première demande d'extradition vers la Libye de M. Al-Mahmoudi, 70 ans, arrêté sur le sol tunisien le 21 septembre alors qu'il se dirigeait vers l'Algérie.

La Cour s'est une nouvelle fois réunie vendredi pour examiner une deuxième demande d'extradition avant de reporter sa décision au 26 novembre.

M. Al-Mahmoudi, vêtu d'un costume beige à rayures, chemise ouverte, était présent à cette audience et a pu lancer aux journalistes: «j'ai un espoir inébranlable dans le peuple et les institutions du peuple de la Tunisie. J'espère que la décision de justice sera révisée».

La défense a fait savoir qu'elle avait parallèlement saisi le Comité des Nations Unies contre la torture, basé à Genève.

«Cette juridiction internationale s'est engagée à prendre en charge le dossier. Nous la remercions et, puisque la Tunisie fait partie de l'organisation, la loi lui interdit d'extrader M. Al-Mahmoudi jusqu'à ce que la demande soit examinée» par le Comité, a souligné Me Mabrouk Kourchid, un autre avocat de M. Al-Mahmoudi.

Des risques réels en Libye

Le travail de la défense a trouvé un écho auprès de l'ONG basée à New York Human Rights Watch (HRW) qui, dans un communiqué, invite la Tunisie «à arrêter les procédures visant à extrader M. Al-Mahmoudi, car, selon elle, il y a un réel risque de torture», en Libye.

«Les autorités libyennes, écrit HRW, n'ont pas les structures adéquates pour contrôler les forces de sécurité et les centres de détention afin de garantir la sécurité» de l'ex-premier ministre.

De son côté, «Amnesty International avait estimé il y a quelques jours que s'il rentrait en Libye, M. Al-Mahmoudi pourrait être exposé à de réels risques, de graves violations des droits de l'homme, notamment la torture (...), une exécution extrajudiciaire et un procès injuste».

Un courrier a été remis «en mains propres»  au président de la République libyenne par intérim, Foued Mebazaa, dans lequel la défense de M. Al-Mahmoudi lui demande «de ne pas signer» le décret d'extradition.

«Le décret ne peut être signé par un président intérimaire», a indiqué Me Kourchid, déniant toute légitimité à l'actuel chef de l'État après l'élection le 23 octobre d'une Assemblée constituante qui doit mettre en place un nouvel exécutif.

«Nous avons également dit au président que cette affaire était de nature à entacher la réputation de la Tunisie et qu'il ne pouvait finir sa carrière politique de cette manière en livrant une personne à la mort et à la torture», a poursuivi Me Kourchid».

Mercredi, la Cour d'appel avait rejeté une nouvelle demande de remise en liberté de l'ancien responsable, réclamée par la défense.

Premier ministre jusqu'aux derniers jours du régime du colonel Kadhafi, M. Al-Mahmoudi est maintenu depuis septembre à la prison de la Mornaguia, près de Tunis.